FICHE QUESTION
13ème législature
Question N° : 11478  de  M.   Liebgott Michel ( Socialiste, radical, citoyen et divers gauche - Moselle ) QE
Ministère interrogé :  Entreprises et commerce extérieur
Ministère attributaire :  Industrie et consommation
Question publiée au JO le :  27/11/2007  page :  7408
Réponse publiée au JO le :  08/04/2008  page :  3077
Date de changement d'attribution :  08/04/2008
Rubrique :  commerce et artisanat
Tête d'analyse :  petit commerce
Analyse :  concurrence. grande distribution
Texte de la QUESTION : M. Michel Liebgott interroge M. le secrétaire d'État chargé des entreprises et du commerce extérieur sur certaines mesures contenues dans le projet de loi pour le développement de la concurrence au service des consommateurs. Les professionnels de la Confédération générale de l'alimentation en détail (CGAD) s'inquiètent d'une série de mesures inscrites dans ce projet de loi, susceptibles de porter atteinte à leur développement, voire à la pérennité de nombre d'entre elles. Les craintes exprimées se fondent essentiellement sur les effets pervers des mesures de libéralisation des pratiques commerciales. Ainsi en est-il d'une réintégration des marges arrière, véritables subventions des fournisseurs aux grandes surfaces pour voir leurs produits idéalement disposés en gondole. Ce dispositif à lui seul crée une distorsion de concurrence biaisée dans la mesure où le petit commerce, par définition atomisé, n'a pas la force de négociations des grandes centrales d'achat. Les enquêtes menées démontreraient qu'en 2005 les marges arrière ont progressé de 32,5 % pour 33,1 % en 2006 (chiffres fournis par la Direction de la concurrence et répression des fraudes DGCCRF). Estimées à hauteur de 20 à 30 milliards, elles font partie intégrante des résultats des grandes surfaces et ne sauraient donc être redistribuées, sauf à revoir, à rentabilité maintenue, les prix pratiqués à la clientèle et qui ne pourraient que partir à la hausse, entamant un peu plus le pouvoir d'achat des Français, déjà mis à mal par les dernières hausses constatées (carburant, produits alimentaires, énergie, franchises médicales, etc.). L'encadrement des marges arrière doit donc être maintenu, pour des raisons d'équité et pour de réels motifs économiques, au véritable service des consommateurs. En effet, lorsquon sait que le secteur de l'alimentation de détail représente 25 % de part de marché du secteur alimentaire, 428 000 salariés (636 000 personnes pour la grande distribution) pour un chiffre d'affaires identique, par cette politique de « produits d'appels » que permettent les marges arrière, c'est toute une profession pourvoyeuse d'emplois qui peine à se battre sur un marché concurrentiel largement faussé, avec un effet amplificateur dû à la densité territoriale des grandes surfaces dans notre pays. Il lui demande donc de renoncer à ces mesures et de lui indiquer de quelle façon il compte contribuer au développement du commerce de proximité, indispensable à la survie de quartiers et villages en voie de paupérisation et/ou désertification.
Texte de la REPONSE : La loi du 1er juillet 1996 avait permis de mettre fin aux pratiques de revente à perte préjudiciables à l'ensemble de l'économie et de préserver un équilibre entre les différentes formes de commerce. Toutefois, depuis l'entrée en vigueur de ce texte, on avait pu assister à une dérive des marges arrière entraînant un processus inflationniste défavorable au consommateur. La loi du 2 août 2005 en faveur des PME dont l'un des volets a modifié les dispositions du Livre IV du code de commerce relatif aux relations commerciales avait pour objet de lutter contre la vie chère et d'améliorer substantiellement le pouvoir d'achat des consommateurs. En vertu de ce texte, le mode de calcul du seuil de revente à perte a été modifié, permettant de faire bénéficier les consommateurs d'une partie des marges arrière réalisées par les distributeurs. Afin d'éviter une « guerre des prix » préjudiciable à l'ensemble du commerce, cette réforme a été mise en place progressivement puisqu'en 2006 il fut permis de déduire du seuil de revente à perte la partie des marges arrière dépassant 20 % du prix de vente, cette déduction étant alors plafonnée à 40 %. A partir du 1er janvier 2007, le régime en vigueur a été assoupli puisque le plafonnement en vigueur en 2006 a disparu et sont devenus déductibles du seuil de revente à perte les marges arrière dépassant seulement 15 % du prix de vente. Cette réforme a atteint son objectif de modération de l'évolution des prix. Les effets sur les prix des grandes marques de la grande distribution ont été réels avec une baisse de 3,2 % entre mars 2006 et mars 2007. Afin de poursuivre ce mouvement de réforme du cadre des relations industrie-commerce et d'amélioration du pouvoir d'achat, le Gouvernement a engagé rapidement une deuxième étape qui a d'ores et déjà abouti au vote de la loi n° 2008-3 du 3 janvier 2008 pour le développement de la concurrence au service des consommateurs. En instaurant le « trois fois net », cette loi doit permettre de poursuivre dans cette voie de modération des prix par la concurrence. Pour autant, la loi du 3 janvier n'a pas remis en cause l'encadrement des marges arrière. La loi prévoit en effet à son article 2 des règles strictes de formalisme des contrats qui assurent la transparence sur ces services comme la sanction pénale du non-respect de ces règles. En outre, l'interdiction de la revente à perte reste en vigueur, ce dispositif assurant une protection du petit commerce contre les prix prédateurs. Cette réforme sera poursuivie et approfondie en 2008 à partir notamment des propositions qui viennent d'être rendues par la commission pour la libération de la croissance française et des travaux de la mission confiée à Mme Hagelsteen, ancienne présidente du Conseil de la concurrence, pour examiner les conditions d'une plus grande négociabilité des conditions de vente entre fournisseurs et distributeurs et évaluer l'impact de ces propositions sur les filières économiques. Le Gouvernement estime toutefois qu'une telle mesure ne pourrait être adoptée que si des dispositifs d'accompagnement sont instaurés au profit du petit commerce et des PME industrielles pour éviter que se renforce à cette occasion un déséquilibre dans les relations commerciales au seul profit des distributeurs les plus puissants, dont les éventuels abus de domination continuent à être strictement poursuivis. Aussi, il est d'ores et déjà prévu que les effets négatifs de la trop longue durée des délais de paiement sur la trésorerie des entreprises, sur leur compétitivité vis-à-vis de l'extérieur, sur la capacité des PME de créer des emplois, donnent lieu à une mesure législative au début de l'année 2008, visant à limiter à 45 jours fin de mois le délai maximal de paiement et à fixer des intérêts de retard dissuasifs en cas de dépassement. La voie contractuelle, volontaire et négociée, sera également mobilisée afin que l'ensemble des professions concernées puisse trouver, au-dessous de ce plafond, des accords adaptés aux situations propres à leur filière. En cas d'échec, il sera demandé au Parlement de fixer un calendrier précis, progressif et contraignant, de réduction supplémentaire des délais de paiement. Un autre objectif de la réforme était de permettre aux commerçants de pratiquer les prix les mieux adaptés à leur propre stratégie commerciale et à l'intensité de la concurrence sur leur zone de chalandise. Les opérateurs ont eu à cet égard des comportements très divers quant à la possibilité qui leur a été faite de réintégrer une partie des marges arrière dans le seuil de revente à perte. Mais dans l'ensemble la différenciation des prix entre enseignes, manifestation d'une concurrence qui s'exprime à nouveau pleinement, s'est accentuée, ce qui a profité au consommateur comme au commerce en général. Or, il est dans l'intérêt de l'ensemble du commerce que les stratégies tarifaires se diversifient et puissent ainsi s'adapter à la segmentation du marché. Il faut également souligner que l'activité du commerce en France semble plutôt bien orientée au cours des derniers mois et que certaines craintes sur les conséquences pour l'emploi comme sur celui de la place des PME dans les linéaires émises lors du vote de la loi ne se sont pas réalisées. Ainsi, il n'a pas été constaté de destructions d'emploi dans la grande distribution et la place des PME dans les linéaires a augmenté depuis l'entrée en vigueur de la loi du 2 août 2005 en faveur des PME.
S.R.C. 13 REP_PUB Lorraine O