FICHE QUESTION
13ème législature
Question N° : 114911  de  M.   Demilly Stéphane ( Nouveau Centre - Somme ) QE
Ministère interrogé :  Travail, emploi et santé
Ministère attributaire :  Travail, emploi et santé
Question publiée au JO le :  19/07/2011  page :  7840
Réponse publiée au JO le :  29/11/2011  page :  12658
Rubrique :  sécurité sociale
Tête d'analyse :  prestations
Analyse :  fraudes. lutte et prévention
Texte de la QUESTION : M. Stéphane Demilly attire l'attention de M. le ministre du travail, de l'emploi et de la santé sur l'application de certaines mesures prises pour lutter contre la fraude à la protection sociale. En effet, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 du 21 décembre 2006 a prévu, conformément à une recommandation constante de la Cour des comptes, la création d'un répertoire national commun de la protection sociale. Ce répertoire « contient les données communes d'identification des individus, les informations relatives à leur affiliation aux différents régimes concernés, à leur rattachement à l'organisme qui leur sert les prestations ou avantages, à la nature de ces derniers, ainsi que l'adresse déclarée aux organismes pour les percevoir ». Le décret n° 2009-1577 du 16 décembre 2009 a précisé que ce répertoire doit permettre « d'améliorer l'appréciation des conditions d'ouverture, la gestion et le contrôle des droits et prestations des bénéficiaires » et qu'il doit fournir notamment « l'état de chacun des droits ou prestations ». Pour que la « nature » des droits et leur « état » soient connus des agents chargés de les attribuer, et pour que ceux-ci puissent réellement apprécier « les conditions d'ouverture » de ces droits, l'esprit de la loi exige que la totalité des montants des droits perçus par les bénéficiaires ainsi que l'ensemble de leurs revenus - nécessaires pour apprécier les versements sous condition de ressources - figurent dans le répertoire. En l'absence de ces renseignements le répertoire perdrait la plus grande partie de son intérêt, ne permettrait pas d'apprécier les conditions d'ouverture de certains droits et ne serait pas utilisé par les agents. Il lui demande donc de bien vouloir lui indiquer si ces renseignements figureront bien dans le répertoire, à quelle date et dans quelles conditions celui-ci deviendra opérationnel. De plus, suite au décret n° 2007-240 du 22 février 2007 qui a créé l'Agence nationale des titres sécurisés, le décret n° 2007-255 du 27 février 2007 a prévu la création d'une carte nationale d'identité électronique. Alors que celle-ci devait faire l'objet d'un projet de loi déposé au Parlement au premier semestre 2008 et son déploiement devait avoir lieu en janvier 2009, il lui demande de bien vouloir lui indiquer la date à laquelle ce projet de loi sera déposé et quand le déploiement aura lieu. Enfin, le rapport 2009 de la délégation nationale à la lutte contre la fraude préconisant que soient évaluées, par sondages, la fraude aux indemnités journalières et la fraude à la couverture maladie universelle complémentaire, et de « développer la mise en oeuvre des sanctions administratives et civiles, en particulier les pénalités prononcées par les directeurs d'organismes versant des prestations », il souhaiterait savoir où en est la mise en oeuvre de ces préconisations.
Texte de la REPONSE : Le ministre du travail, de l'emploi et de la santé a pris connaissance avec intérêt de la question relative à la lutte contre la fraude à la protection sociale. S'agissant du répertoire national commun de la protection sociale (RNCPS), il convient tout d'abord nécessaire d'apporter un certain nombre d'éclaircissements sur le contenu et les fonctionnalités de ce répertoire. L'article L. 114-12-1 du code de la sécurité sociale, introduit par loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 du 21 décembre 2006, indique que « le répertoire contient les données communes d'identification des individus, les informations relatives à leur affiliation aux différents régimes concernés, à leur rattachement à l'organisme qui leur sert des prestations ou avantages, à la nature de ces derniers, ainsi que l'adresse déclarée aux organismes pour les percevoir ». Ainsi, aux termes de la loi, les montants des prestations servies aux bénéficiaires, de même que leurs ressources, ne peuvent pas figurer dans le répertoire. C'est un élément important du dossier qui a été présenté à la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL), qui s'est alors félicitée de cette orientation. Nonobstant la problématique relative à la protection des données personnelles des assurés, l'intégration des données relatives aux montants des prestations et des ressources poserait de très grandes difficultés techniques et semble prématurée à ce stade. La présence de ces données pourrait notamment donner lieu à des interprétations erronées dans la mesure où les montants perçus constituent des données très volatiles que les logiciels métiers, très complexes, de chacun des organismes contributeurs réévaluent régulièrement au vu de nombreux paramètres. La mise en oeuvre progressive du RNCPS constitue un chantier considérable, puisque 101 institutions nationales et plus de 1 400 organismes gestionnaires sont concernés. Pour autant la montée en charge des données dans le RNCPS avance à un bon rythme puisqu'il contient désormais la quasi-totalité des données d'identification et de rattachement des assurés et comprendra d'ici la fin 2011 les données relatives aux prestations. Ainsi le RNCPS commence déjà à être opérationnel en matière de gestion des droits et les premières fonctionnalités de lutte contre la fraude seront mises en place d'ici la fin de l'année 2011. Les organismes de sécurité sociale disposent par ailleurs d'autres outils pour connaître le montant des ressources et des prestations. Ainsi, les données relatives aux revenus déclarés sont transmises chaque année aux caisses d'allocations familiales (CAF) par la direction générale des finances publiques (DGFIP) et intégrées de manière automatisée pour tous les allocataires. Ces informations, ainsi que les prestations servies par les CAF sont également accessibles aux partenaires via le portail CAF-Pro, qui compte plus de 77 000 utilisateurs, en particulier les agents des caisses d'assurance-maladie en charge de la gestion des droits à la couverture maladie universelle (CMU) et à la CMU complémentaire (CMU-C), les agents chargés des dossiers relatifs au revenu de solidarité active (RSA) dans les conseils généraux, les travailleurs sociaux des services hospitaliers et des collectivités territoriales, ou les agents chargés d'instruire les dossiers des commissions de surendettement. Dans un autre domaine, l'extension par la loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites, du champ d'application des échanges électroniques interrégimes de retraite (EIRR), doit permettre à la fois une simplification des démarches pour les assurés et un moyen de prévention accru des risques de fraudes. En effet, outre la présence de l'ensemble des montants de pensions de retraite de base et complémentaire dans le répertoire, l'utilisation de l'EIRR sera également possible à l'instruction et au contrôle de la pension de réversion et du minimum vieillesse. Enfin, les organismes servant des prestations ont déjà mis en place des outils performants de détection de la fraude calculatoire ou de dépassement des ressources, et ils pourront s'échanger ces données sur les montants des prestations et les ressources au moyen de la plate-forme sécurisée d'échanges RNCPS, dont les travaux d'étude sont en cours. S'agissant des travaux d'évaluation de la fraude aux indemnités journalières et la fraude à la CMU-C, ils figurent parmi les objectifs arrêtés dans la convention d'objectifs et de gestion de l'État et de la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) 2010-2013. Les travaux relatifs à l'évaluation du taux de fraude administrative aux indemnités journalières ont été engagés par la CNAMTS à la fin de l'année 2010, un premier bilan devant être établi très prochainement. Sur l'estimation du taux de fraude à la CMU-C, les travaux doivent démarrer d'ici la fin de l'année 2011. Le développement de la mise en oeuvre des sanctions administratives et civiles, en particulier les pénalités prononcées par les directeurs d'organismes versant des prestations, constitue une forte priorité pour le Gouvernement. Il est en effet indispensable que chaque fraude soit sanctionnée, et que la sanction soit justement proportionnée à la gravité du manquement, à son caractère réitéré ou non, ainsi qu'au montant du préjudice subi. Dans les faits, on assiste à une forte croissance du nombre de pénalités financières notifiées par les directeurs de caisses prestataires, puisque leur nombre global a plus que doublé en deux ans, en passant de 1 566 en 2008 à 3 946 en 2010 (contre 2 452 en 2009). Pour ce qui concerne la lutte contre le travail dissimulé et les fraudes aux cotisations, les sanctions civiles prévues par les textes sont également de plus en plus systématiquement mises en oeuvre : ainsi le montant des annulations d'exonérations des cotisations sociales a atteint plus de 9 Meuros en 2010 contre 7,1 millions en 2009.
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