FICHE QUESTION
13ème législature
Question N° : 1163  de  Mme   Hoffman-Rispal Danièle ( Socialiste, radical, citoyen et divers gauche - Paris ) QOSD
Ministère interrogé :  Intérieur, outre-mer et collectivités territoriales
Ministère attributaire :  Intérieur, outre-mer et collectivités territoriales
Question publiée au JO le :  15/06/2010  page :  6438
Réponse publiée au JO le :  25/06/2010  page :  4742
Rubrique :  élections et référendums
Tête d'analyse :  droit de vote
Analyse :  gens du voyage. réglementation
Texte de la QUESTION : Mme Danièle Hoffman-Rispal rappelle à M. le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales que les gens du voyage subissent des discriminations majeures dans l'accès au droit de vote. Après deux délibérations de la haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité (délibération n° 2007-372 du 17 décembre 2007 et délibération n° 2009-143 du 6 avril 2009) et un rapport spécial (publié en annexe de la délibération n° 2009-316 du 14 septembre 2009), le Gouvernement a reconnu, par courrier du 2 février 2009, que la loi de 1969 était défavorable pour les gens du voyage, et a ajouté "qu'une réflexion [pouvait] être engagée sur l'harmonisation des différents dispositifs" existants en matière de droit de vote. Seize mois après cette première réponse, elle souhaiterait connaître la position actuelle du Gouvernement sur ce sujet.
Texte de la REPONSE :

DROIT DE VOTE
DES GENS DU VOYAGE

M. le président. La parole est à Mme Danièle Hoffman-Rispal, pour exposer sa question, n° 1163, relative à la réglementation du droit de vote concernant les gens du voyage.
Mme Danièle Hoffman-Rispal. Madame la secrétaire d'État chargée du commerce extérieur, ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur.
La dernière édition du rapport de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité comporte une rubrique consacrée aux " points de blocage ". Y sont abordées les recommandations restées sans suite à cause du " refus ou [de] l'immobilisme des administrations et des entreprises ".
Le premier point de blocage évoqué réside dans l'absence de progrès enregistré dans la situation et le statut des gens du voyage. La HALDE avait en effet formulé des recommandations très précises dans ses délibérations n° 2007-372 du 17 décembre 2007 et n° 2009-143 du 6 avril 2009. Constatant que ces recommandations n'avaient pas été suivies d'effets, la HALDE a adopté et fait publier un rapport spécial, disponible en annexe de la délibération n° 2009-316 du 14 septembre 2009. Malgré ce geste fort, il semblerait que nul progrès ne soit intervenu en la matière.
En France, les 400 000 gens du voyage possèdent en général la citoyenneté française. Pourtant, ils sont victimes de restrictions importantes dans leur accès au droit de vote. Ainsi le Gouvernement n'a pas suivi les recommandations de la HALDE, qui préconise de réformer l'article 10 de la loi de 1969. Cet article prévoit en effet que les gens du voyage ne peuvent s'inscrire sur les listes électorales qu'après trois ans de rattachement ininterrompu à la même commune, quand les sans domicile fixe peuvent être inscrits sur les listes électorales après six mois de rattachement ininterrompu à une même commune.
Cette discrimination est injuste et contraire à la Convention européenne des droits de l'Homme. Je souhaiterais connaître les raisons qui pourraient expliquer l'inaction du Gouvernement en la matière.
Vous aurez sans doute relevé que mon interrogation porte uniquement sur le droit de vote. Ce choix volontaire correspond à mon désir d'obtenir des éléments précis sur ce sujet, car des collègues députés ont eu l'occasion d'interroger M. le ministre de l'intérieur sur l'ensemble des discriminations qui touchent les gens du voyage, il y a plus de six mois. J'ai donc jugé préférable de ne solliciter sa position que sur une seule discrimination, afin de lui faciliter la tâche.
M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Idrac, secrétaire d'État chargée du commerce extérieur.
Mme Anne-Marie Idrac, secrétaire d'État chargée du commerce extérieur. Madame la députée, le ministre de l'intérieur m'a chargé de vous apporter les éléments de réponse suivants.
Il convient tout d'abord de rappeler la législation en vigueur. Sur le fondement de l'article 10 de la loi de 1969, que vous avez cité, les gens du voyage peuvent s'inscrire sur la liste électorale de leur commune de rattachement. Cette décision est prise par le préfet après trois ans de rattachement ininterrompu dans la même commune ; la condition de rattachement ininterrompu par le titulaire d'un titre de circulation qui atteint l'âge de dix-huit ans est réputée remplie si celui-ci est rattaché depuis trois ans, soit à titre personnel, soit en tant qu'enfant mineur de ses parents rattachés à la même commune.
Par ailleurs, la loi du 5 mars 2007 instituant le droit au logement donne aux gens du voyage la possibilité d'élire domicile soit auprès d'un centre communal ou intercommunal d'action sociale, soit auprès d'un organisme agréé à cet effet, leur permettant ainsi de s'inscrire sur les listes électorales de la commune où se trouve situé l'organisme. Celui-ci leur délivre alors une attestation d'élection de domicile établissant leur lien avec lui depuis au moins six mois. En l'espèce, sont applicables aux gens du voyage les dispositions de l'article L. 15-1 du code électoral concernant l'inscription des sans domicile fixe.
Enfin, une mission d'information parlementaire sur le bilan et l'adaptation de la législation relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage, créée par la commission des lois de l'Assemblée nationale le 23 septembre 2009, est actuellement en cours. Il paraît opportun d'attendre ses conclusions sur les voies d'harmonisation de ces différents dispositifs.
M. le président. La parole est à Mme Danièle Hoffman-Rispal.
Mme Danièle Hoffman-Rispal. Madame la secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse. Nous attendrons les conclusions de la mission d'information, mais le temps presse, car les gens du voyage se sentent discriminés. J'ajoute que le département d'État américain a épinglé notre pays à ce sujet dans la dernière édition de son rapport consacré à la situation des droits de l'homme en France.
En tout état de cause, si un rattachement à une même commune pendant une période de six mois, au lieu de trois ans, suffit, c'est une bonne chose. Il serait peut-être utile que cette disposition soit mieux connue.

S.R.C. 13 REP_PUB Ile-de-France O