Texte de la QUESTION :
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Mme Élisabeth Guigou attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, sur le respect du droit à l'image des détenus dans les maisons d'arrêt. Des producteurs de documentaires sur le milieu carcéral se sont heurtés aux refus de l'administration pénitentiaire, et ce malgré une décharge signée par le détenu lequel notifie son consentement de céder les droits de diffusion comme l'article 41 de la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 l'exige. Si la diffusion des images de personnes incarcérées à visage découvert doit évidemment faire l'objet de discussions préalables avec l'administration pénitentiaire et les réalisateurs-producteurs, les personnes détenues conservent des droits inaliénables que sont le droit à la dignité et le droit d'expression. En conséquence, elle lui demande de bien vouloir lui préciser, dans le respect de la loi pénitentiaire et du code de procédure pénale, quelles sont mesures qu'il entend prendre afin d'éviter que les décisions pour la diffusion d'images de personnes détenues à visage découvert soient interdites par l'administration pénitentiaire.
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Texte de la REPONSE :
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Si l'article 41 de la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 dispose effectivement en son alinéa premier que « les personnes détenues doivent consentir par écrit à la diffusion ou à l'utilisation de leur image ou de leur voix lorsque cette diffusion ou cette utilisation est de nature à permettre leur identification », il précise ensuite en son deuxième alinéa que « l'administration pénitentiaire peut s'opposer à la diffusion ou à l'utilisation de l'image ou de la voix d'une personne condamnée, dès lors que cette diffusion ou cette utilisation est de nature à permettre son identification et que cette restriction s'avère nécessaire à la sauvegarde de l'ordre public, à la prévention des infractions, à la protection des droits des victimes ou de ceux des tiers ainsi qu'à la réinsertion de la personne concernée », étant ajouté que « pour les prévenus, la diffusion et l'utilisation de leur image ou de leur voix sont autorisées par l'autorité judiciaire ». L'article R. 57-6-17 du code de procédure pénale, issu du décret en Conseil d'État n° 2010-1634 du 23 décembre 2010 portant application de la loi pénitentiaire, précise, que dans ce dernier cas, la diffusion ou l'utilisation de telles images est subordonnée à l'autorisation du magistrat saisi du dossier de la procédure. De plus, l'article D. 445 du code de procédure pénale, issu du décret n° 98-1099 du 8 décembre 1998, dispose que « sans préjudice des dispositions prévues à l'article R. 57-6-17 relatives au droit à l'image des personnes détenues, la diffusion, hors des locaux d'un établissement pénitentiaire, d'un audio-vidéogramme réalisé dans le cadre des actions d'insertion est soumise à l'autorisation du ministre de la justice ou du directeur régional selon qu'elle revêt une dimension nationale ou locale ». Conformément aux termes mêmes de l'article 41 de la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 et de son décret d'application, l'administration pénitentiaire et l'autorité judiciaire peuvent donc régulièrement, pour des motifs précisément définis par la loi pénitentiaire, opposer un refus à la diffusion ou à l'utilisation de l'image ou de la voix d'une personne détenue, et ce malgré le consentement écrit de cette dernière. Auparavant, la circulaire du 17 janvier 1997 sur les modalités pratiques de délivrance des autorisations de reportage et celle du 23 juillet 2007 relative à l'autorisation de reportage dans les établissements pénitentiaires précisaient toutes deux que les autorisations devaient être accordées dans des conditions préservant l'anonymat (tant physique que patronymique) des personnes détenues et la sécurité de l'établissement. Le principe de l'anonymat des détenus était absolu s'agissant des reportages. La loi pénitentiaire pose désormais deux conditions cumulatives pour s'opposer, malgré le consentement de la personne détenue, à la diffusion ou à l'utilisation de l'image ou de la voix de cette dernière : « dès lors que cette diffusion ou cette utilisation est de nature à permettre son identification », d'une part, ce qui reprend la condition tendant au respect de l'anonymat, et, d'autre part, que « cette restriction s'avère nécessaire à la sauvegarde de l'ordre public, à la prévention des infractions, à la protection des droits des victimes ou de ceux des tiers ainsi qu'à la réinsertion de la personne concernée ».
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