FICHE QUESTION
13ème législature
Question N° : 125941  de  Mme   Bello Huguette ( Gauche démocrate et républicaine - Réunion ) QE
Ministère interrogé :  Travail, emploi et santé
Ministère attributaire :  Travail, emploi et santé
Question publiée au JO le :  10/01/2012  page :  218
Réponse publiée au JO le :  01/05/2012  page :  3419
Rubrique :  professions de santé
Tête d'analyse :  orthophonistes
Analyse :  diplôme. revendications
Texte de la QUESTION : Mme Huguette Bello appelle l'attention de M. le ministre du travail, de l'emploi et de la santé sur la menace que fait courir à la santé publique le projet de réforme de la profession d'orthophoniste tel qu'il est formulé dans la réponse des ministères de l'enseignement supérieur et de la santé aux questions posées par la Fédération nationale des orthophonistes. Depuis 1955, en même temps qu'on prenait progressivement conscience des multiples aspects de la recherche en orthophonie et de l'implication de cette discipline dans un nombre croissant de pathologies et de difficultés diverses, la formation des orthophonistes n'a cessé de progresser et de s'élargir. C'est avec beaucoup de satisfaction que la Fédération nationale des orthophonistes a appris, le 31 mars 2011, que le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche prenait position en faveur de la reconnaissance de la formation initiale des orthophonistes au niveau du grade de master. Cette satisfaction laissa place à une douloureuse stupeur quand, le 28 octobre 2011, les deux ministères de l'enseignement supérieur et de la santé, revenant de manière incompréhensible sur la position d'abord énoncée, prirent l'initiative d'un projet que la profession juge inacceptable et irresponsable, et qui revient à inventer une orthophonie à deux vitesses : orthophonistes praticiens, d'un côté, orthophonistes de base, de l'autre. Les conséquences d'une telle évolution seraient catastrophiques pour la profession et pour les patients. La formation des orthophonistes serait amputée de l'équivalent d'un semestre. Le niveau du master 1 auquel on voudrait situer leur niveau de compétences ne correspond à aucun grade universitaire, et ne pourrait donc être reconnu comme l'équivalent des diplômes exigés en Europe et en Amérique du nord. Le travail des orthophonistes français au sein du Comité permanent de liaison des orthophonistes-logopèdes de l'Union européenne (CPLOL), activité de première importance dans tous les secteurs de la recherche, n'aurait plus d'assise cohérente. Et surtout, la perte de la qualité des soins orthophoniques qui résulterait d'un tel dispositif serait évidente puisque l'offre de soins à proximité serait dramatiquement amputée pour les millions de Françaises et de Français qui ont recours à l'orthophonie et, notamment, pour les enfants porteurs d'un handicap sensoriel, génétique ou mental ou qui souffrent d'un retard de langage ou d'autres difficultés, pour les victimes d'un AVC, pour les patients atteints d'un cancer du larynx, d'une maladie de Parkinson, d'une déficience auditive profonde ou totale, de la maladie d'Alzheimer. Alors que la majorité des orthophonistes subirait une diminution de leur compétence, il ne serait possible de remédier à ce manque de praticiens qu'en transférant à des orthophonistes moins formés les prérogatives de collègues mieux formés : solution boiteuse, perverse, ruineuse pour la confiance et décourageante. Située au carrefour de multiples disciplines, impliquée dans mille et une situations de la vie sociale, intimement liée à la modernité, l'orthophonie doit être traitée avec la gravité et le sérieux que méritent les souffrances qu'elle apaise et les espoirs qu'elle suscite. Elle lui demande que soit abandonné le projet présenté conjointement par le ministère de la santé et par le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche, projet en contradiction avec la position prise, le 31 mars 2011, par le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche, et que soit ouverte avec la Fédération nationale des orthophonistes une concertation digne des enjeux engagés.
Texte de la REPONSE :

Aujourd’hui comme demain, il n’y aura qu’un seul diplôme d’exercice de la profession, à savoir le certificat de capacité. C’est un diplôme unique et qui le restera. De même, il n’y a qu’un seul décret d’actes, indivisible, qui pose le cadre du métier d’orthophoniste. Il n’y aura donc pas de profession à deux vitesses. Aujourd’hui comme demain, toute personne victime d’un accident vasculaire cérébral (AVC), d’une maladie neuro-dégénérative ou toute autre pathologie pourra consulter l’orthophoniste de son choix. Les conditions de prise en charge des patients resteront les mêmes dans tous les champs d’exercice du métier d’orthophoniste et en tout point du territoire. C’est une garantie absolue, essentielle pour les patients et leurs proches.

 

Concrètement, cette réforme prévoit que la formation des orthophonistes sera valorisée à Master 1 (soit un potentiel de plus de 6000 heures de formation, travail personnel inclus), là où aujourd’hui elle ne compte réglementairement que 2840 heures (hors travail personnel). Elle sera donc mieux reconnue qu’aujourd’hui car plus riche, et donnera aux orthophonistes des perspectives de progression universitaire d’une ampleur qui n’existait pas jusqu’à présent.

 

C’est une avancée incontestable pour les professionnels, et la polémique autour du niveau de formation des orthophonistes est tout à fait injustifiée. Cette formation, actuellement reconnue dans la fonction publique hospitalière comme équivalente à un BAC+2, bénéficiera grâce à la réforme d’une reconnaissance universitaire de type BAC+4 (240 ECTS, c’est-à-dire niveau Master 1).

 

Certains professionnels estiment malgré tout que la formation doit être rallongée, et durer 5 ans minimum (300 ECTS, soit 9000 heures) comme si tout d’un coup 4 ans ne suffisaient plus pour former de bons orthophonistes ! Notre système de santé doit conserver son rôle d’ascenseur social pour ceux qui ont choisi ces métiers au service des autres. Il convient de préserver la diversité du recrutement sur ces métiers.

 

Rénover les formations initiales en santé, c’est donc suivre des objectifs très clairs : donner des bases solides à l’étudiant, lui permettre d’entrer dans le milieu professionnel, d’exercer son métier, d’apprendre et de progresser tout au long de sa vie. Ce n’est donc pas de rajouter toujours plus de connaissances en formation initiale, mais repenser complètement celle-ci.

 

Sur la question des formations complémentaires, le ministre du travail, de l’emploi et de la santé confirme que le principe d’une formation initiale de Master 1 laisse complètement ouverte la possibilité, à ceux qui ont envie de s’inscrire dans un parcours de formation complémentaire, d’accéder à des formations reconnues par les universités, de niveau Master 2, qui seront donc accessibles tout au long de la vie. C’est une chance pour les orthophonistes.

 

 

 

 

 

Beaucoup d’orthophonistes suivent des formations complémentaires, mais celles-ci ne sont pas reconnues par les universités. Or c’est notre devoir d’accompagner cette aspiration qui est un progrès pour la profession. C’est notre devoir de reconnaître et d’entendre ceux qui veulent faire évoluer la recherche et les pratiques de leur profession, et qui aspirent à un parcours universitaire complémentaire par rapport à la formation destinée à l’exercice. Les M2 sont une étape dans ce parcours et l’occasion pour certains orthophonistes d’aller plus loin dans la recherche, et de bénéficier d’une « marche » intermédiaire jusqu’au doctorat.

 

Enfin, ces formations complémentaires de niveau M2 vont dans le sens du rapport Hénart-Berland-Cadet qui propose de confier encore davantage d’autonomie et de responsabilité à certains professionnels, formés notamment à pratiquer des actes réservés jusqu’alors aux personnels médicaux. Ces compétences qui permettent d’étendre encore le champ de professions comme celle des orthophonistes, justifie des formations supplémentaires.

 

La création de masters 2 fait débat au sein de la profession d’orthophonistes, certains craignent que ces perspectives universitaires ne rabaissent le niveau ou la reconnaissance des orthophonistes titulaires de la formation socle. Ce n’est bien entendu pas le cas, et en tout état de cause de telles perspectives ne pourront être menées qu’en partenariat avec les professionnels.

 

Aujourd’hui il y a une urgence : celle consistant à offrir aux étudiants, dès la rentrée 2012, la nouvelle formation enrichie, afin que la promotion 2012-2016 ait un certificat de capacité pleinement reconnu au niveau européen. Pour cela, la nouvelle maquette doit être finalisée très rapidement, et de précieuses semaines ont été perdues du fait de ces conflits. Le ministère chargé de la Santé, tout comme celui chargé de l’Enseignement supérieur, auront toujours la volonté de dialoguer.

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