FICHE QUESTION
13ème législature
Question N° : 127631  de  M.   Grand Jean-Pierre ( Union pour un Mouvement Populaire - Hérault ) QE
Ministère interrogé :  Justice et libertés
Ministère attributaire :  Justice et libertés
Question publiée au JO le :  07/02/2012  page :  1020
Réponse publiée au JO le :  01/05/2012  page :  3295
Rubrique :  droit pénal
Tête d'analyse :  garde à vue
Analyse :  réforme. mise en oeuvre
Texte de la QUESTION : M. Jean-Pierre Grand attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, sur la mise en oeuvre de la réforme de la garde à vue. Par décision n° 2010-14-22 QPC, le Conseil constitutionnel a déclaré contraire à la Constitution les articles 62, 63, 63-1 et 77 du code de procédure pénale et les alinéas 1er à 6 de son article 63-4. Cette inconstitutionnalité ne prenait effet que le 1er juillet 2011 afin de permettre au législateur d'y remédier. Après examen par le Parlement, la loi n° 2011-392 du 14 avril 2011 relative à la garde à vue a été publiée au Journal officiel du 15 avril 2011. Cette réforme comprend notamment deux dispositions phares : la notification du droit au silence et le droit à l'assistance par un avocat dès le début de la garde à vue. Dans plusieurs arrêts, la Cour de cassation a annulé des décisions judiciaires validant des gardes à vue rendant ainsi rétroactive l'application de la loi du 14 avril 2011 à des procédures antérieures. En effet, la Cour de cassation exige l'application immédiate du droit à un procès équitable résultant de l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales. Les États adhérents à cette Convention sont ainsi tenus de respecter et d'appliquer sans les différer les décisions de la Cour européenne des droits de l'Homme. Elle annule donc des gardes à vue alors même que les policiers ne pouvaient pas appliquer une loi qui n'existait pas. Les saisines en annulation de la Cour de cassation risquent donc de se multiplier dans de nombreuses procédures de délits et de crimes. Aussi, il lui demande de bien vouloir lui indiquer si la loi française peut être rétroactive et ainsi faire annuler des pièces majeures pour la recherche de la vérité.
Texte de la REPONSE :

Par quatre arrêts du 15 avril 2011, l’Assemblée plénière de la Cour de cassation a jugé que les exigences du procès équitable résultant de l’article 6 de la Convention de Sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés Fondamentales (CSDHLF), dont toute personne gardée à vue doit pouvoir bénéficier, étaient d’application immédiate à toute procédure en cours, les Etats adhérents à la Convention étant tenus de respecter les décisions de la Cour Européenne des Droits de l’Homme. L’Assemblée plénière a ainsi jugé que les règles posées par l’article 63-4 du code de procédure pénale dans sa rédaction alors en vigueur, relatives à l’entretien de la personne gardée à vue avec un avocat ne satisfaisaient pas aux exigences de l’article 6 de la CSDHLF, en ce qu’elles ne prévoyaient pas la possibilité pour la personne gardée à vue d’être assistée de façon effective par un avocat, et a exclu le report dans le temps des effets de l’inconventionnalité des dispositions du code de procédure pénale précitées pour des motifs tenant à la sécurité juridique des procédures et à la bonne administration de la justice. Ces décisions n’ont ni pour effet ni pour objet de permettre une application rétroactive de la loi n°2011-392 du 14 avril 2011 portant réforme de la garde à vue à des procédures antérieures mais posent le principe selon lequel les droits garantis par l’article 6 de la CSDHLF doivent être effectifs, concrets et d’application immédiate. Depuis sa mise en œuvre, les procureurs généraux ont indiqué que la réforme de la garde à vue n’avait pas eu d’influence notable sur le nombre de nullités soulevées à l’audience ; ils ont précisé que, dans les cas où les juridictions constataient la nullité de la garde à vue en raison de l’absence de notification à la personne gardée à vue de son droit d’être assistée par un avocat et de garder le silence, elles condamnaient toutefois les prévenus en raison des autres éléments probants recueillis par les enquêteurs au cours de l’enquête. En effet, selon une jurisprudence constante de la Cour de cassation, les éléments de la procédure établis après ces auditions et n’ayant pas pour support les actes annulés demeurent réguliers : même si une garde à vue est annulée, une personne peut, en raison des autres preuves recueillies au cours de l’enquête, demeurer mise en examen ou être condamnée pour les faits que l’on lui reproche.

UMP 13 REP_PUB Languedoc-Roussillon O