FICHE QUESTION
13ème législature
Question N° : 13129  de  M.   Liebgott Michel ( Socialiste, radical, citoyen et divers gauche - Moselle ) QE
Ministère interrogé :  Justice
Ministère attributaire :  Justice
Question publiée au JO le :  18/12/2007  page :  7955
Réponse publiée au JO le :  04/03/2008  page :  1898
Rubrique :  système pénitentiaire
Tête d'analyse :  établissements
Analyse :  conditions de détention
Texte de la QUESTION : M. Michel Liebgott interroge Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur le récent rapport du comité de prévention de la torture (CPT) du Conseil de l'Europe portant sur les prisons françaises. Le CPT dénonce une nouvelle fois les conditions de détention dans certaines prisons de notre pays, faisant le constat de traitements dégradants et indignes au sein de la patrie des droits de l'homme. Après des visites effectuées fin 2006, tout esprit éclairé ne peut que s'indigner des conclusions livrées par la CPT et fondées sur des cas précis. Ainsi est-il question de l'inquiétante dégradation des conditions de santé, notamment en matière de prise en charge psychiatrique, de placement en isolement pratiqué souvent de façon arbitraire et du problème récurrent de la surpopulation carcérale. Le CPT va jusqu'à citer l'exemple des détenus particulièrement surveillés (DPS), « fixés à leur lit sans interruption, pieds et mains menottés ». Une présence policière, elle aussi permanente, exonère les soins à prodiguer de la plus nécessaire et élémentaire intimité du patient. Des détenus en souffrance psychologique sont placés en cellule d'isolement, abominable palliatif à de véritables soins, sont tenus de demeurer nus, soumis à un contrôle visuel régulier du personnel pénitentiaire. Dans cette ambiance kafkaïenne, les placements abusifs en isolement administratif, théoriquement limité à trois mois, peuvent s'étendre largement au-delà, sans qu'aucun frein ne soit mis à ces pratiques d'un autre âge. Le CPT va ainsi jusqu'à citer le cas d'un détenu placé en isolement durant dix-neuf ans. Nul n'est besoin d'être grand clerc ou médecin pour comprendre que de tels agissements avilissent l'être humain qui, tout en devant purger sa peine pour payer sa dette à la société, perd ici tout moyen de réinsertion sérieuse par une déshumanisation scandaleuse. Le CPT s'est particulièrement penché sur la prison de Moulins qui serait coutumière de telles pratiques. Il lui demande donc de mettre un terme immédiat à ces pratiques, de créer les moyens d'un contrôle humanitaire efficient dans les prisons, et de faire en sorte que la France puisse faire oeuvre d'exemple en matière et de détention et de réinsertion des détenus.
Texte de la REPONSE : La garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que les conditions de détention dans les établissements pénitentiaires font l'objet de toute son attention, qu'il s'agisse de détenus placés à l'isolement ou en détention ordinaire. Concernant la procédure d'isolement administratif, le code de procédure pénale prévoit désormais, depuis la réforme du 21 mars 2006, une information très complète du détenu sur la procédure d'isolement. Avant toute décision de prolongation, le chef d'établissement rédige un rapport complet sur sa situation et la pertinence actuelle de la mesure. L'avis du médecin intervenant dans l'établissement est sollicité. La motivation des décisions fait l'objet d'un contrôle constat par l'autorité hiérarchique. La réglementation encadre aussi strictement la durée de la mesure. Le chef d'établissement peut décider de la mesure d'isolement pour une durée de trois mois, renouvelable une fois. Après six mois d'isolement, le directeur interrégional devient compétent, pour une période de trois mois qui peut être renouvelé une fois. Au-delà d'un an, seul le ministre de la justice peut décider de la prolongation, par période de quatre mois. Enfin, si la durée d'isolement dépasse deux ans, il ne peut pas être prolongé, sauf si, à titre exceptionnel, il constitue l'unique moyen d'assurer la sécurité des personnes ou de l'établissement. Dans les faits, le recours à la procédure d'isolement administratif reste mesuré. Le nombre de détenus isolés est passé de 602 au 1er janvier 2005 à 399 au 1er janvier 2008. Parmi ces 399 détenus, 257 sont placés à l'isolement à leur demande et disposent du droit de demander à tout moment la levée de la mesure. Sur l'ensemble de la population pénale écrouée au le 1er janvier 2008, 0,65 % faisait l'objet d'un isolement administratif. Au niveau du régime de détention, les détenus à l'isolement conservent les droits à l'information, aux visites, à la correspondance et à l'exercice du culte. Les conditions de prise en charge psychiatrique des détenus connaissent en outre des avancées notables depuis la généralisation des secteurs de psychiatrie en milieu pénitentiaire en 1986. La construction des unités d'hospitalisation spécialement aménagées (UHSA), destinées à recevoir en hospitalisation complète les détenus souffrant de troubles psychiques, permettra une amélioration de la prise en charge. L'ouverture de la première UHSA est prévue fin 2009. La loi du 30 octobre 2007 qui, a créé le contrôleur général des lieux de privation de liberté, permettra aussi de mieux s'assurer des conditions de prise en charge des personnes privées de liberté et du respect de leurs droits fondamentaux.
S.R.C. 13 REP_PUB Lorraine O