Texte de la QUESTION :
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M. Philippe Tourtelier interroge M. le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration sur les conditions d'accueil des demandeurs d'asile à Rennes. Du seul fait des modalités d'accueil administratif des demandeurs d'asile avec - depuis janvier 2008 - une seule plateforme de centralisation dans la préfecture d'Ille-et-Vilaine, les demandeurs d'asile doivent obligatoirement se présenter à Rennes. Cet afflux provoque une saturation des dispositifs d'hébergement d'urgence, y compris celui destiné aux sans-abri ou aux personnes mal logées, des populations précarisées malheureusement en hausse. Ainsi, faute de places suffisantes dans les structures d'accueil, depuis de trop nombreux mois, dans le froid et l'insécurité, des dizaines de familles demandeuses d'asile (hommes, femmes, parfois seules avec enfants en bas âge) dorment dans les rues à Rennes ou trouvent refuge dans des squats insalubres. C'est inacceptable au regard de la dignité humaine et préoccupant du point de vue de la sécurité des personnes et de la santé publique. Accueillir humainement les demandeurs d'asile et garantir leurs droits est pourtant un devoir impérieux de l'État régulièrement rappelé par le Conseil d'État lui-même. Aujourd'hui, l'État est dans l'incapacité d'assumer totalement cette compétence pour les demandeurs d'asile comme d'ailleurs pour toute personne sans abri ou en situation de détresse. Il a d'ailleurs interrogé à ce sujet M. Benoist Apparu, secrétaire d'État au logement. En ce moment même, la situation de grande détresse de ces hommes, femmes, enfants sur le territoire rennais déshonore la République, malgré les efforts considérables des collectivités locales et des associations qui tentent de pallier au mieux les carences de l'État. Il souhaite donc qu'il lui indique quand, comme l'y appellent les élus locaux, il va ouvrir une deuxième borne Eurodac sur le territoire breton, permettant une meilleure répartition des personnes accueillies qui se heurtent à la saturation récurrente des dispositifs à Rennes, s'il va consentir à l'augmentation indispensable de l'enveloppe "immigration et asile" du budget opérationnel de programme (BOP n° 303) déléguée au préfet d'Ille-et-Vilaine, pour augmenter les capacités de mise à l'abri. Le maire de Rennes et le président du conseil général ayant déjà proposé au préfet la création d'une coordination d'urgence sociale à laquelle collectivités et associations sont prêtes à contribuer tant matériellement que financièrement, il souhaite savoir si l'État saura répondre à cette mobilisation.
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Texte de la REPONSE :
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CONDITIONS D'ACCUEIL DES DEMANDEURS D'ASILE À RENNES M. le président. La parole est à M. Philippe
Tourtelier, pour exposer sa question, n° 1321. M. Philippe
Tourtelier. Je souhaite interroger M. le ministre de l'intérieur, de
l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration sur les
conditions d'accueil des demandeurs d'asile à Rennes. Du seul fait des
modalités d'accueil administratif des demandeurs d'asile avec - depuis janvier
2008 - une seule plateforme de centralisation pour la Bretagne dans la
préfecture d'Ille-et-Vilaine, les demandeurs d'asile doivent obligatoirement se
présenter à Rennes. Cet afflux provoque une saturation de tous les dispositifs
concernant les demandeurs d'asile, mais aussi des hébergements d'urgence, compte
tenu de l'augmentation des populations précarisées Ainsi, faute de places
suffisantes dans les structures d'accueil, depuis de trop nombreux mois, dans le
froid et l'insécurité, des dizaines de familles - hommes, femmes, parfois seules
avec des enfants en bas âge - dorment dans les rues à Rennes ou trouvent refuge
dans des squats insalubres. C'est inacceptable au regard de la dignité
humaine et préoccupant du point de vue de la sécurité des personnes et de la
santé publique. Accueillir humainement les demandeurs d'asile et garantir leurs
droits est pourtant un devoir impérieux de l'État régulièrement rappelé par le
Conseil d'État. Aujourd'hui, l'État est dans l'incapacité d'assumer totalement
cette compétence pour les demandeurs d'asile comme pour toute personne sans abri
ou en situation de détresse. Il y a un mois et demi, j'ai d'ailleurs interrogé
Benoist Apparu, secrétaire d'État au logement, sur la situation de l'hébergement
d'urgence dans l'agglomération rennaise. Depuis son accusé de réception du 17
janvier, j'attends toujours sa réponse. En attendant, la situation de grande
détresse de ces hommes, femmes, enfants sur le territoire rennais déshonore la
République, malgré les efforts considérables des collectivités locales et des
associations, qui tentent de pallier au mieux les carences de l'État. Comme
vous y appellent les élus locaux, les associations, quand allez-vous ouvrir une
deuxième borne Eurodac sur le territoire breton permettant une meilleure
répartition des personnes accueillies qui se heurtent à la saturation récurrente
des dispositifs à Rennes ? D'autre part, allez-vous consentir à
l'augmentation indispensable de l'enveloppe " immigration et asile " du budget
opérationnel de programme - BOP 303 -, déléguée au préfet d'Ille-et-Vilaine,
pour augmenter les capacités de mise à l'abri ? Le maire de Rennes et le
président du conseil général ont déjà proposé au préfet la création d'une
coordination d'urgence sociale, à laquelle collectivités et associations sont
prêtes à contribuer matériellement et financièrement. L'État saura-t-il répondre
à cette mobilisation ? M. le président. La parole est à M.
Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie
associative. M. Luc Chatel, ministre de l'éducation
nationale, de la jeunesse et de la vie associative. Monsieur le député, je
vous prie tout d'abord d'excuser l'absence du ministre de l'intérieur, qui m'a
chargé de vous répondre en son nom. Le ministre de l'intérieur partage
naturellement vos préoccupations. Vous le savez, le dispositif national
d'accueil des demandeurs d'asile est tributaire de l'évolution des demandes
d'asile, dont je rappelle qu'elles ont fortement augmenté ces dernières années -
de 20 % en 2008, de 12 % en 2009 et de 10 % en 2010. La Bretagne n'échappe
pas à cette tendance. Voilà pourquoi l'État a pris ses responsabilités, en
Bretagne comme ailleurs. Ainsi, en 2010, 65 places supplémentaires en centre
d'accueil pour demandeurs d'asile y ont été créées, et 10,3 millions d'euros y
ont été dédiés à la prise en charge des demandeurs d'asile, dont 8,4 millions
pour le CADA et 1,9 millions pour l'hébergement d'urgence. Par ailleurs, le
préfet de région, le préfet d'Ille-et-Vilaine et ceux des trois autres
départements de Bretagne ont entrepris de réfléchir ensemble aux modalités
d'organisation de l'hébergement des demandeurs d'asile, qu'il s'agisse du
dispositif national d'accueil ou des structures d'hébergement d'urgence. Vous
demandez au ministre de l'intérieur s'il faut aller plus loin ; je le pense en
effet. Il faut probablement envisager la création d'une seconde borne Eurodac
dans la région. Je rappelle que cet outil permet de déterminer le statut
juridique du primo-demandeur et de s'assurer qu'il n'a pas formulé une demande
dans un autre État membre ou dans un autre département. Les services du
ministère de l'intérieur et de l'immigration étudient la possibilité d'installer
cette nouvelle borne à Quimper. En outre, je vous annonce que des travaux
sont en cours afin d'accroître à nouveau le nombre de places en CADA à
l'intention des personnes ayant demandé l'asile en Bretagne. Cela pourrait
passer par le système de mutualisation nationale des capacités
régionales. Quant à l'hébergement d'urgence, une enveloppe complémentaire de
391 000 euros sera prochainement débloquée afin de faire face aux
besoins. Vous le voyez, monsieur le député, le Gouvernement est pleinement
conscient des priorités que vous invoquez : en Bretagne comme ailleurs, il agit
pour satisfaire les besoins des demandeurs d'asile. M. le
président. La parole est à M. Philippe Tourtelier. M.
Philippe Tourtelier. Monsieur le ministre, je vous remercie pour ces
réponses, qui ménagent plusieurs ouvertures en 2011. Le plus tôt sera le mieux :
actuellement, cinquante à soixante personnes dorment dans la rue tous les
soirs.
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