Texte de la QUESTION :
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Mme Geneviève Gaillard attire l'attention de M. le ministre de la défense et des anciens combattants sur les modalités de remplacement des plaques d'identification effectué dans le cadre de la réfection du carré militaire du cimetière des Sablières de Niort. Le service de l'administration interdépartementale des anciens combattants et victimes de guerre de Limoges a effectué sans concertation, d'une manière brutale, le remplacement des plaques d'identification sur les stèles de carré militaire. Les plaques anciennes, en bon état de conservation, en porcelaine finement décorées ont été cassées et remplacées par de nouvelles portant des inscriptions totalement dénuées de toute valeur symbolique, esthétique, sentimentale et historique. Le statut des sépultures est régi par le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre dont l'application est de la responsabilité du ministère de la défense. Son article L. 513 prévoit le droit à la sépulture perpétuelle aux frais de l'État et les articles R. 564, R. 569-4 et D. 424 précisent respectivement les modalités relatives à la localisation de la sépulture, à son entretien et à son aménagement. L'article D. 424 précité prévoit que chaque sépulture individuelle comporte un monument " d'un modèle uniforme, dont les inscriptions rappellent les nom, prénom, grade et affectation militaire du défunt, le lieu et la date de son décès, ainsi que la mention « Mort pour la France »". L'absence de mentions particulières sur les circonstances du décès assure l'égalité des morts pour la France. Par ailleurs, il apparaît que les mentions telles que « Massacré par les Allemands » sont désormais bannies au nom de la réconciliation ente les deux pays car jetant l'opprobre sur l'Allemagne. Cependant, les familles des disparus pour la France vivent cet état de fait comme une véritable offense à l'histoire personnelle de leurs aïeux et les associations dont l'association des professeurs d'histoire et géographie dénoncent un outrage à la mémoire, une atteinte à l'histoire. Aussi, elle lui demande de bien vouloir lui indiquer s'il envisage de revenir sur la politique mémorielle actuellement en cours sur notre territoire qui relève plus de l'oubli que de la mémoire et de faire en sorte que la rénovation des sépultures s'effectue dans le respect de la mémoire de ceux qui sont morts pour la France.
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Texte de la REPONSE :
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CONDITIONS DE RESTAURATION DES SÉPULTURES PERPÉTUELLES M. le président. La parole est à Mme
Geneviève Gaillard, pour exposer sa question, n° 1378, relative aux conditions
de restauration des sépultures perpétuelles. Mme Geneviève
Gaillard. Monsieur le ministre de la défense et des anciens
combattants, dans le cadre de la réfection du carré militaire du cimetière des
Sablières de Niort, le service de l'administration interdépartementale des
anciens combattants et victimes de guerre de Limoges a procédé de manière très
brutale et sans concertation au remplacement des plaques d'identification
apposées sur les stèles, laissant aux descendants le sentiment d'un mépris
profond de l'État pour leurs défunts. Ces plaques, en porcelaine pour certaines,
parfois peintes ou gravées, portant la mémoire de la personne décédée, ont été
brisées et abandonnées sur le sol, sans même que les familles aient été avisées.
Vous comprendrez aisément à quel point elles ont pu être offensées par cet
outrage. Je connais les règles qui régissent la gestion de ces sépultures
mais j'estime qu'il aurait été préférable de parler auparavant avec les familles
pour que puisse être conservée sur ces plaques la mémoire des disparus pour la
France. Avez-vous l'intention d'ordonner un changement de méthode lorsque de
tels remplacements doivent être effectués, afin que les familles puissent être
informées et aient la possibilité de dialoguer ? Ou bien comptez-vous laisser
perdurer cette façon de faire qui ne convient à personne et suscite de la colère
contre l'État ? M. le président. La parole est à M. Gérard
Longuet, ministre de la défense et des anciens combattants. M. Gérard
Longuet, ministre de la défense et des anciens combattants. Je
vous remercie, madame la députée, de me poser cette question à laquelle je suis
sensible à un double titre, celui de ministre de la défense et aussi des anciens
combattants, fonction que j'assume pleinement, et celui d'élu d'un département
qui compte, hélas, plus de tombes militaires que de vivants. Je découvre à cet
instant, grâce à votre démarche, une méthode qui, profondément, ne me satisfait
pas et ne saurait être acceptée dans la forme même si, sur le fond, elle a sa
légitimité. Dans la forme, c'est la municipalité qui a la charge de gérer son
cimetière. Les administrations, les services extérieurs de l'État, l'Office
national des anciens combattants et des victimes de guerre en l'occurrence, ont
donc le devoir de dialoguer avec les élus qui, à l'occasion d'événements comme
les journées patriotiques ou le Jour des morts, organisent des célébrations dans
les carrés militaires. Ce devoir de dialogue est d'ailleurs d'une telle évidence
que je suis un peu gêné de le rappeler. Sur le fond, l'affaire est plus
compliquée. Vous avez fait référence au code des pensions militaires
d'invalidité, qui pose le principe de l'égalité devant la reconnaissance de
notre pays pour tous ceux qui sont morts pour la France et fixe à cette fin des
normes uniformes et assez strictes. Pour avoir visité, hélas, avec beaucoup de
respect et d'attention, de très nombreux cimetières militaires en Lorraine, je
puis vous dire que cette uniformité est aujourd'hui respectée. Pour autant
doit-on faire disparaître l'histoire même de notre pays et les conditions dans
lesquelles les combattants ont lutté et ont disparu ? Non, bien évidemment.
Aussi le ministère de la défense et des anciens combattants soutient-il, en
partenariat avec les collectivités locales, la mise en place d'éléments
d'information permanents, visibles, complets, permettant de faire savoir aux
familles, aux pèlerins, aux visiteurs, ce qui s'est exactement passé et pourquoi
un carré militaire se trouve à cet endroit. C'est évidemment plus facile sur
le plan historique lorsque sont rassemblés des combattants d'une même bataille.
Ce n'est sans doute pas le cas au carré militaire du cimetière des Sablières de
Niort, mais manifestement on peut tout de même entrer dans le détail et, dans
cet Ouest de la France qui a connu la bataille des poches de l'Atlantique, les
combats de la Résistance méritent d'être compris et connus comme doivent l'être
ceux de mai-juin 1940 ou ceux de l'hiver 1944-1945 dans les Vosges et en
Alsace. Je m'engage, madame la députée-maire, à veiller à ce que ce devoir de
mémoire se traduise par la présence effective d'explications dans les carrés
militaires. M. le président. La parole est à Mme Geneviève
Gaillard. Mme Geneviève Gaillard. Merci, monsieur le
ministre. Bien entendu, la municipalité ignorait que les plaques allaient être
détruites. Je me permets surtout d'attirer votre attention sur le cas de Mme
Zilda Louise Barraud, résistante fusillée dans la prison de Poitiers ; il ne
reste plus rien de son histoire puisque sa plaque a été totalement
détruite. Vous imaginez ce que cela représente pour cette famille, pour les
élus, et sans doute pour bien d'autres personnes qui ont subi ailleurs le même
choc ? Ne serait-il pas bon que vous présentiez les excuses de l'État aux
personnes qui subissent cette véritable torture ? L'Association des professeurs
d'histoire et géographie s'est saisie des faits et a déploré que la mémoire soit
bafouée. Elle n'a pas complètement tort, il faut le reconnaître. Tout le monde,
dans les Deux-Sèvres, a été horrifié par ces agissements. Il serait donc bien
que vous puissiez, personnellement ou au nom de l'État, expliquer les raisons
pour lesquelles cela a été fait, dire à votre administration de ne pas procéder
de la sorte et, enfin, présenter des excuses.
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