FICHE QUESTION
13ème législature
Question N° : 1480  de  M.   Launay Jean ( Socialiste, radical, citoyen et divers gauche - Lot ) QOSD
Ministère interrogé :  Premier ministre
Ministère attributaire :  Jeunesse et vie associative
Question publiée au JO le :  10/05/2011  page :  4634
Réponse publiée au JO le :  20/05/2011  page :  3261
Date de changement d'attribution :  24/05/2011
Rubrique :  économie sociale
Tête d'analyse :  financement
Analyse :  services sociaux d'intérêt général. directive. dérogations
Texte de la QUESTION : M. Jean Launay attire l'attention de M. le Premier ministre sur la circulaire du 18 janvier 2010, dite circulaire Fillon, qui a pour finalité de sécuriser les relations contractuelles entre pouvoirs publics et associations, et qui tente de raccrocher le régime des subventions versées aux associations aux exigences européennes. Or, seize mois après sa mise en oeuvre, de nombreuses questions demeurent. Ainsi, suivant la lecture qui en est faite, la gestion d'une crèche parentale par une association, les locaux appartenant à la collectivité locale, doit être définie, pour certains, dans le cadre d'une délégation de service public, et pour d'autres, dans le cadre d'un conventionnement. La mise en oeuvre d'une DSP a pour principale conséquence la mise en concurrence du secteur associatif avec le « secteur lucratif », mettant, dès lors, en péril, l'existence même de l'association et de ses salariés, si celle-ci n'est pas retenue au moment de l'appel d'offres. Le secteur associatif est reconnu pour son dynamisme, sa réactivité, sa proximité et son implication dans la vie locale, et est un véritable acteur de l'aménagement de nos territoires. Dès lors, il demande si la France envisage une réécriture clarifiée et sans ambiguïté de cette circulaire.
Texte de la REPONSE :

CIRCULAIRE RELATIVE AUX RELATIONS
ENTRE LES POUVOIRS PUBLICS ET LES ASSOCIATIONS

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Launay, pour exposer sa question, n° 1480, relative à l'application de la circulaire du 18 janvier 2010 relative aux relations entre les pouvoirs publics et les associations.
M. Jean Launay. La circulaire du 18 janvier 2010, dite circulaire Fillon, avait pour finalité de sécuriser les relations contractuelles entre pouvoirs publics et associations. Seize mois après, de nombreuses questions demeurent. La réglementation communautaire ne tient pas compte de la non-lucrativité des associations, considérées comme des opérateurs économiques parce qu'elles offrent des biens ou des services à titre onéreux, soi-disant sur un marché concurrentiel, quels que soient leur finalité sociale et leur mode de financement. Cela pose donc la question de la définition d'une activité non économique ; qui l'organise et qui la finance ?
Aujourd'hui, sur le terrain, c'est l'existence même des structures d'accueil de la petite enfance, gérées par des associations, qui est remise en cause du fait de divergences dans l'application de cette circulaire. Certes, plusieurs documents en traduisent les principes et servent d'outils tant à l'administration qu'aux associations. Ainsi, l'attestation dite 4-2 prévoit la prise en compte de la règle de minimis, mais sa rédaction pose de réels problèmes parce qu'elle laisse à penser qu'il est interdit de bénéficier de plus de 200 000 euros d'aides publiques dans les trois derniers exercices. Certains organismes et certaines collectivités territoriales interprètent la non-fourniture de cette attestation comme une infraction à la règle de minimis, ce qui pose des problèmes aux associations et suscite leur inquiétude.
Un autre aspect insuffisamment exploré dans cette circulaire est celui des subventions correspondant à des services strictement locaux, donc par définition non susceptibles d'affecter les échanges intra-communautaires et de fausser le libre jeu de la concurrence parce qu'elles ne sont pas qualifiables d'aides d'État. Il s'agit surtout de services d'accueil de la petite enfance, gérés par des associations, émanations de la volonté des parents qui en portent les valeurs et en assurent la gestion. C'est dans le cadre du soutien des collectivités territoriales dont elles bénéficient que nous rencontrons un problème d'application de la circulaire.
Je vais prendre un exemple précis : dans ma circonscription, la communauté de communes de Martel se trouve dans l'obligation de lancer prochainement une procédure de délégation de service public pour la gestion d'une structure d'accueil de la petite enfance dans une commune, structure jusqu'à présent gérée par l'association Le Rionnet. Celle-ci gère par ailleurs une structure identique sur la commune voisine de Cazillac, dans le cadre d'une convention d'objectifs et de moyens. Cette délégation de service public a été décidée à la demande des services de l'État au motif que l'association a perçu plus de 200 000 euros d'aides publiques au cours des trois derniers exercices, en concurrence avec le secteur lucratif. On ne voit pourtant pas bien dans un département rural, le Lot, où est la concurrence, mais dans le cas où cette association ne serait pas retenue, son existence serait remise en cause ainsi que l'emploi d'une trentaine de salariés. C'est une hypothèse, mais une telle éventualité constitue un vrai danger pour la survie de telles associations. De plus, du fait de cette mise en concurrence avec le secteur lucratif, l'association, si elle est retenue, pourra être assujettie aux impôts commerciaux au titre de son activité et devra donc prévoir de répercuter la hausse des coûts dans le prix proposé à la collectivité.
Dans un contexte où le pouvoir d'achat des Français est de plus en plus mis à mal, comment peut-on accepter la marchandisation accrue du service public ? Puisque l'on considère en France que ces associations sont de véritables acteurs de l'aménagement du territoire, le Gouvernement envisage-t-il une réécriture clarifiée et sans ambiguïté de cette circulaire ?
M. Guillaume Garot. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à Mme Jeannette Bougrab, secrétaire d'État chargée de la jeunesse et de la vie associative.
Mme Jeannette Bougrab, secrétaire d'État chargée de la jeunesse et de la vie associative. Monsieur Launay, vous l'avez souligné : les associations sont dans notre pays des acteurs clés de la vie sociale et du maillage territorial, et il est nécessaire d'assurer leur pérennité.
M. Michel Ménard. Tout à fait !
Mme Jeannette Bougrab, secrétaire d'État. La circulaire du Premier ministre du 18 janvier 2010, à laquelle vous faites référence, a pour ambition de clarifier les conditions d'utilisation de la subvention et de la commande publique, et de proposer un outil juridique sécurisé aux associations et aux collectivités locales tant au regard des règles de droit nationales que des règles communautaires relatives aux aides d'État.
L'hésitation possible entre le choix d'une subvention et celui d'une délégation de service public n'est pas suscitée par la circulaire, mais découle des règles de droit nationales, généralement transposées des règles de droit communautaires et précisées par la jurisprudence. La délégation de service public est une procédure de commande publique qui, en tant que telle, s'inscrit dans une logique de concurrence préalable. Au contraire d'un appel d'offres, elle suppose qu'une part significative du risque d'exploitation pèse sur le bénéficiaire de la délégation, qu'il s'agisse de la gestion d'une crèche parentale située dans les locaux d'une collectivité, exemple cité dans votre question, ou de tout autre service.
Il ne paraît donc pas légitime de faire reposer sur cette circulaire la responsabilité du choix des collectivités locales de recourir à la commande publique ou à une subvention dédiée à une association. La circulaire du 18 janvier démontre que le recours juridiquement sécurisé à la subvention est possible et que celle-ci préserve l'initiative associative, source d'innovation dans des champs où la contribution du secteur associatif est ancienne, forte et, dans bien des cas, indispensable à la cohésion sociale.
Si la circulaire a constitué une nouvelle étape dans une démarche de clarification, celle-ci se poursuit actuellement, avec l'appui du secrétariat général des affaires européennes, en concertation avec les associations et les représentants des collectivités territoriales.
Je tiens également à souligner que, pour remédier à certaines difficultés d'application dont j'ai bien conscience, des outils pratiques ont été mis en ligne après la publication de la circulaire. De même, des formations sont proposées par les services de l'État aux associations et aux agents des collectivités locales, formations organisées dans les régions par mes services pour permettre aux dites associations et aux collectivités de continuer, par voie de subvention, à mener des activités d'intérêt général sans diminuer la sécurité juridique du financement apporté.

S.R.C. 13 REP_PUB Midi-Pyrénées O