Texte de la QUESTION :
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Mme Michèle Delaunay attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur les mutilations sexuelles féminines, qui recouvrent toutes les interventions, incluant l'ablation partielle ou totale des organes génitaux externes de la femme, pratiquée pour des raisons culturelles ou religieuses, ou pour toute autre raison non thérapeutique. La forme la plus courante de mutilation sexuelle féminine est l'excision du clitoris et des petites lèvres, pratiquée dans presque tous les cas (jusqu'à 80 %) ; la forme la plus extrême est l'infibulation, pratiquée dans 15 % environ des cas. Les complications immédiates comprennent douleurs, choc, hémorragie, rétention d'urine, ulcération de la zone génitale et lésions des tissus adjacents. Hémorragie et infection peuvent entraîner la mort. Les mutilations sexuelles marquent à vie la mémoire de celles qui les ont subies. À plus long terme, les femmes peuvent souffrir d'un sentiment d'inachèvement, d'angoisse ou de dépression. L'excision est une triste réalité dans notre pays. Malgré la présence d'au moins 40 000 femmes et fillettes excisées en France, le sujet reste douloureusement tabou. L'interdiction de cette pratique, les premières condamnations, la possibilité de recourir aux services d'aides à l'enfance, l'existence du numéro vert 119 (violence écoute), ou les premières associations font que les choses évoluent doucement. Trop doucement pour les 10 à 20 000 petites filles originaires d'Afrique qui, selon les associations, courent le risque d'être excisées. La loi en France ne fait pas de différence entre l'excision et les autres mutilations. L'excision est donc passible de la cour d'assises, ce qui devrait déboucher sur de très lourdes peines. C'est de plus en plus le cas, mais il est délicat de juger des personnes ayant des coutumes et des traditions différentes des nôtres, et très souvent ignorant la gravité de leurs actes. C'est pourquoi elle souhaiterait connaître ses intentions afin d'éradiquer ces mutilations sexuelles.
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Texte de la REPONSE :
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La garde des sceaux, ministre de la justice, indique à l'honorable parlementaire que les mutilations sexuelles peuvent actuellement être poursuivies et sanctionnées en matière criminelle comme en matière délictuelle. La répression des faits de mutilation sexuelle est aggravée dès lors qu'ils sont commis à l'encontre d'un mineur. La loi n° 2006-399 du 4 avril 2006 renforçant la prévention et la répression des violences au sein du couple ou commises contre les mineurs a introduit des modifications qui ont vocation à rendre plus effective la répression de ces pratiques, sans que soit instaurée pour autant de qualification juridique spécifique. D'une part, et comme c'est déjà le cas pour les infractions de nature sexuelle, le délai de prescription, en matière d'action publique, a été porté (art. 7 et 8 du code de procédure pénale) à vingt ans à compter de la majorité de la victime pour les crimes de violences ayant entraîné une mutilation ou une infirmité permanente commis sur mineurs (art. 222-10 du code pénal) et les délits de violences ayant entraîné une interruption temporaire de travail supérieur à huit jours commis sur mineurs (art. 222-12 du code pénal). D'autre part, la répression des mutilations sexuelles commises à l'étranger a été renforcée. Le nouvel article 222-16-2 inséré dans le code pénal a pour objectif d'étendre l'application de la loi française sanctionnant ces pratiques aux mineurs de nationalité étrangère résidant habituellement en France et qui sont victimes à l'étranger d'actes de mutilations sexuelles. En outre, les dispositions générales visées à l'article 113-8 du code pénal exigeant préalablement à l'engagement de toute poursuite d'un délit commis à l'étranger une plainte, soit de la victime, soit de ses ayants droit, ou une dénonciation de l'État étranger ne sont pas applicables aux violences ayant entraîné une mutilation prévues à l'article 222-12 de ce même code. S'agissant de la prévention de ces pratiques, les services de la protection maternelle et infantile et de nombreuses associations concourent à l'information des femmes et mères sur la législation française et les conséquences dramatiques des actes de mutilation sexuelle. Grâce à cette prévention, les cas d'excision commis en France ont beaucoup diminué. À ce titre, il convient de rappeler que les médecins sont incités à dénoncer de tels faits aux autorités judiciaires. En effet, la loi n° 2007-297 du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance clarifie les hypothèses dans lesquelles le secret médical est levé en cas de violences commises sur un mineur ou une personne qui n'est pas en mesure de se protéger. Par dérogation à l'article 226-13 du code pénal, et afin de favoriser la dénonciation de ce type de faits, le médecin qui a connaissance de l'existence de « privations ou de sévices, y compris lorsqu'il s'agit d'atteintes ou mutilations sexuelles », peut désormais signaler les faits au procureur de la République, et ce sans l'accord de la victime (art. 226-14, 1 du code pénal). La politique pénale menée par les parquets consiste, d'une part, dans le traitement systématique des signalements pour des faits ou, des risques d'excision en confiant les dossiers à des services de police ou de gendarmerie spécialisés et, d'autre part, dans la poursuite, par la voie de l'information judiciaire, des faits d'excisions avérés. Enfin, le ministère de la justice a participé au colloque organisé par le ministère chargé de la santé en décembre 2006 intitulé « Pour en finir avec les mutilations sexuelles féminines ». Le ministère de la justice a fait partie au comité de lecture d'un ouvrage intitulé « Le praticien face aux mutilations sexuelles féminines », rédigé par l'association Gynécologie sans frontières en partenariat avec la direction générale de la santé.
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