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13ème législature
Question N° : 1737 de M. Alain Vidalies ( Socialiste, radical, citoyen et divers gauche - Landes ) Question orale sans débat
Ministère interrogé > Travail, emploi et santé Ministère attributaire > Travail, emploi et santé
Rubrique > produits dangereux Tête d'analyse > amiante Analyse > lutte et prévention
Question publiée au JO le : 21/02/2012 page : 1425
Réponse publiée au JO le : 29/02/2012 page : 1521

Texte de la question

M. Alain Vidalies interroge M. le ministre du travail, de l'emploi et de la santé sur les mesures mises en oeuvre suite aux conclusions de l'étude de l'Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles, relatif à l'amiante. Dans son rapport final du 22 septembre 2011, l'INRS constate que la nouvelle méthode de mesure META a mis en évidence des niveaux d'empoussièrement d'une ampleur inattendue pour certains matériaux. Il est ainsi établi que les salariés, mais aussi les agents de contrôle, qui interviennent sur ces chantiers, sont aujourd'hui en situation de risque aggravé et que les équipements de protection actuellement exigés ne sont pas opérationnels contre ces fibres particulières. Résultat de cette étude, le Gouvernement, par circulaire du 7 novembre 2011, a annoncé, pour le premier semestre 2012, une modification de la réglementation à échéance de trois ans « en plusieurs étapes pour garantir son efficacité ». La circulaire du 2 janvier 2012, relative à la protection des agents de l'inspection du travail, est tout aussi singulière en précisant « qu'à défaut de mise en oeuvre par les entreprises de techniques dont elles sont en capacité de démontrer qu'elles conduisent à des niveaux d'empoisonnement moins élevé, l'instruction prévoit que les agents de contrôle recourent aux moyens juridiques coercitifs appropriés ». Compte tenu des révélations de l'étude INRS et de l'absence, à ce jour, d'un système de protection homologué et approprié pour ces particules fines, il ne paraît pas possible, comme envisagé par le Gouvernement, de laisser les salariés et les agents de contrôle confrontés à ce risque pendant trois ans. En conséquence, il lui demande s'il envisage de prendre une décision de moratoire pour arrêter tous les chantiers à risque.

Texte de la réponse

PRÉVENTION DE L'EXPOSITION À L'AMIANTE
SUR CERTAINS CHANTIERS

M. le président. La parole est à M. Alain Vidalies, pour exposer sa question, n° 1737, relative à la prévention de l'exposition à l'amiante sur certains chantiers.
M. Alain Vidalies. La question que je veux poser à M. le ministre du travail et de l'emploi est empreinte d'une certaine gravité qui, j'en suis conscient, la place un peu hors du cadre habituel des questions orales sans débat, puisqu'elle concerne potentiellement la santé de dizaines de milliers de salariés.
L'Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles a été chargé par le Gouvernement d'effectuer de nouvelles études sur les conséquences d'une exposition aux fibres d'amiante. Dans son rapport final du 22 septembre 2011, l'INRS s'est appuyé sur une nouvelle technique de mesure, dite méthode META. Les conclusions de cette étude sont proprement édifiantes : l'utilisation de cette technique plus performante de comptage des fibres par microscopie électronique a révélé l'existence d'un danger dont on n'avait pas connaissance jusqu'à présent. Il a ainsi mis en évidence, de manière très précise, des niveaux d'empoussièrement d'une ampleur inattendue pour certains matériaux, mais aussi le fait que la technique qui servait jusqu'alors à déterminer le seuil d'exposition professionnelle à l'amiante par analyse de l'air ambiant sous-estime le niveau d'exposition des travailleurs.
Parmi les recommandations faites par l'INRS, on trouve des mesures de prévention, consistant notamment à ne pas procéder au retrait de certains matériaux, rendus trop émissifs du fait des techniques de retrait employées ; il est également préconisé de développer des équipements de protection individuelle plus performants, mais aussi d'aménager les zones de travail à l'aide de fenêtres permettant de visualiser le chantier depuis l'extérieur de la zone polluée, afin que l'opérateur puisse surveiller le prélèvement sans être lui-même directement exposé.
Ces recommandations extrêmement précises témoignent de la gravité des risques auxquels sont actuellement exposés les salariés travaillant au contact de l'amiante, y compris sur les chantiers de désamiantage - des risques que l'on ignorait avant le mois de septembre 2011.
Par une circulaire du 7 novembre 2011, le Gouvernement a sorti une circulaire prévoyant, entre autres recommandations, qu'une réponse sera apportée dans un délai de trois ans. Compte tenu de la gravité exceptionnelle des risques auxquels sont exposés les salariés, mise en évidence par l'étude de l'INRS, est-il acceptable de laisser des salariés et des agents de contrôle s'exposer à un danger dont le Gouvernement a désormais totalement connaissance ? La gravité de la situation m'a amené à choisir d'en parler dès cette séance. La seule décision collective qui s'impose au vu des éléments dont nous disposons, consiste, me semble-t-il, à déclarer un moratoire sur l'ensemble des chantiers, puis à suivre les recommandations de l'INRS : en l'état actuel, nous ne disposons pas des moyens, notamment matériels, qui seraient nécessaires pour protéger efficacement les opérateurs et les contrôleurs.
Madame la secrétaire d'État chargée de la santé, le Gouvernement croit-il possible, au vu de l'étude de l'INRS, de laisser les salariés continuer à travailler dans ces conditions ? Est-il prêt à déclarer, comme je le demande, le moratoire qui s'impose sur tous les chantiers à risque ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de la santé.
Mme Nora Berra, secrétaire d'État chargée de la santé. Monsieur le député, je vous prie de bien vouloir excuser l'absence de Xavier Bertrand, qui m'a priée de vous transmettre sa réponse.
Le Gouvernement est extrêmement vigilant et inscrit sa démarche dans une logique d'élévation continue du niveau de protection des travailleurs et de la population en matière d'exposition aux fibres d'amiante. C'est ainsi que, suite à deux avis de l'AFSSET rendus en 2009, la Direction générale du travail a mis en place, avec l'appui de l'INRS, une expertise de la méthodologie de mesurage des fibres d'amiante afin de comptabiliser les fibres fines d'amiante, et ainsi de mieux caractériser l'exposition des travailleurs à tous types de fibres d'amiante.
La meilleure connaissance scientifique de la répartition des différentes catégories de fibres d'amiante résultant des travaux de désamiantage doit permettre d'améliorer l'adéquation des moyens de protection mis en oeuvre.
Sur la base de ces travaux, le Gouvernement a annoncé une modification de la réglementation découlant de l'évolution des connaissances scientifiques en la matière. Un projet de décret, qui entrera en vigueur au 1er juillet 2012, a été soumis au Conseil d'orientation des conditions de travail.
Ce projet, conforme aux préconisations de l'INRS, qui a reçu un avis favorable de l'ensemble des partenaires sociaux verra, dès le 1er juillet 2012, la substitution de la méthode de mesurage par microscopie électronique à transmission analytique, dite META, à la méthode actuellement utilisée. À cette date, il prévoit également la suppression de la dualité de notion entre amiante friable et amiante non friable, qui n'apparaît plus adaptée, la généralisation de la certification des entreprises à l'ensemble des activités de retrait de matériaux contenant de l'amiante et l'organisation de la réglementation et des moyens de protection selon trois niveaux d'empoussièrement gradués. Sans attendre son entrée en vigueur, la Direction générale du travail a, par une instruction aux services d'inspection du travail, invité les maîtres d'ouvrage et les entreprises à actualiser leur évaluation des risques.
Comme vous le savez, c'est un sujet difficile. Xavier Bertrand a eu l'occasion de le constater à plusieurs reprises, lors d'interventions de certains de vos collègues parlementaires remettant en cause la pertinence de l'analyse faite par l'inspection du travail sur le niveau des mesures de prévention à observer pour l'intervention sur des matériaux à base d'amiante. Je pense par exemple à une question écrite de Mme Marie-Renée Oget, députée des Côtes d'Armor concernant une opération de requalification réalisée par l'office public de l'habitat Guingamp Habitat.
Pendant cette période transitoire, les agents de l'inspection du travail disposent déjà des prérogatives nécessaires, dont le pouvoir d'arrêter les chantiers, voire d'intervenir auprès des entreprises et des maîtres d'ouvrage lors d'opérations engagées dans des conditions insuffisamment protectrices pour faire respecter les principes de prévention. C'est pourquoi, s'agissant des chantiers à risque que vous évoquez, je ne pense pas qu'il soit nécessaire de recourir à un moratoire.

 

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