FICHE QUESTION
13ème législature
Question N° : 17574  de  Mme   Boulestin Monique ( Socialiste, radical, citoyen et divers gauche - Haute-Vienne ) QE
Ministère interrogé :  Justice
Ministère attributaire :  Justice
Question publiée au JO le :  26/02/2008  page :  1548
Réponse publiée au JO le :  17/06/2008  page :  5222
Date de signalisat° :  10/06/2008
Rubrique :  droit pénal
Tête d'analyse :  politique pénale
Analyse :  rétention de sûreté
Texte de la QUESTION : Mme Monique Boulestin attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur l'inquiétude du Conseil national des barreaux, du barreau de Paris et de la conférence des bâtonniers de voir apparaître dans notre droit pénal, une peine seulement fondée sur la dangerosité supposée d'un citoyen hors de tout contexte de récidive. Elle lui demande quelles mesures elle entend prendre pour éviter les dérives de privation de liberté contraire aux principes énoncés notamment par la Convention européenne des droits de l'Homme.
Texte de la REPONSE : La garde des sceaux, ministre de la justice, a l'honneur d'indiquer à l'honorable parlementaire que la rétention de sûreté, instituée par la loi n° 2008-174 du 25 février 2008, est totalement conforme aux principes énoncés par la Constitution et par la Convention européenne des droits de l'homme. En effet, comme l'a jugé le Conseil constitutionnel dans sa décision n 2008-562 DC du 21 février 2008, cette rétention ne constitue pas une peine destinée à sanctionner l'auteur d'une infraction, mais une mesure de sûreté destinée à prévenir la récidive des crimes les plus graves, et notamment les viols et meurtres commis sur des victimes mineures ou, avec des circonstances aggravantes, sur des victimes majeures. Elle permet ainsi que les auteurs de tels crimes condamnés à au moins quinze ans de réclusion et dont il est établi qu'ils présentent toujours, à la fin de l'exécution de leur peine, une particulière dangerosité caractérisée par une probabilité très élevée de récidive parce qu'ils souffrent d'un trouble grave de la personnalité, soient placés dans un centre socio-médico-judiciaire de sûreté, relevant du ministère de la justice et du ministère de la santé, et dans lequel ils feront l'objet de façon permanente d'une prise en charge médicale, sociale et psychologique destinée à diminuer leur dangerosité et à permettre la fin de la mesure. Cette rétention est valable un an, et ne peut être renouvelée que si la dangerosité de la personne le justifie. Cette nouvelle mesure est enserrée dans des garanties procédurales extrêmement strictes, destinées à assurer qu'elle ne sera prononcée et prolongée que dans les cas où elle est absolument indispensable pour empêcher la récidive. Elle exige en effet une décision expresse de la cour d'assises autorisant une éventuelle rétention à l'issue de la peine, une évaluation pluridisciplinaire de la dangerosité en fin de peine, une proposition motivée de la commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté, et enfin une décision motivée et susceptible de recours prise, après débat contradictoire et en présence obligatoire d'un avocat, par la juridiction régionale de la rétention de sûreté composée de magistrats de la cour d'appel. Dans sa décision précitée du 21 février 2008, le Conseil constitutionnel a ainsi considéré que la rétention de sûreté était conforme à la Constitution. Il a toutefois estimé que cette rétention, au regard de sa nature privative de liberté, renouvelable sans limite, et prononcée après une condamnation par une juridiction, ne saurait être appliquée à des personnes condamnées pour des faits commis avant la publication de la loi. En revanche, si ces personnes font l'objet, après leur libération suite à l'exécution de leur peine de réclusion, d'une surveillance judiciaire ou d'un suivi socio-judiciaire, elles pourront, à l'issue de cette surveillance ou de ce suivi, être placées sous surveillance de sûreté, mesure de sûreté également créée par la loi du 25 février 2008, et qui permet de maintenir ces personnes, pendant des périodes d'un an renouvelables si leur dangerosité le justifie, sous le contrôle et la surveillance des autorités publiques, notamment en faisant l'objet d'une injonction de soins et d'un placement sous surveillance électronique mobile. Si ces personnes ne respectent pas leurs obligations, elles pourront alors être placées en rétention de sûreté. Les nouvelles dispositions permettent ainsi, dans le respect des exigences constitutionnelles et conventionnelles qui garantissent le respect des libertés fondamentales, de concilier ces exigences avec les nécessités de la lutte contre la récidive des infractions les plus graves, selon des modalités du reste très similaires à ce qui existe dans de nombreuses législations étrangères. Les inquiétudes du Conseil national des barreaux, du barreau de Paris et de la conférence des bâtonniers paraissent dès lors sans fondement.
S.R.C. 13 REP_PUB Limousin O