Texte de la QUESTION :
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M. Jean-Louis Gagnaire attire l'attention de Mme la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche sur les modifications du calcul des bourses de l'enseignement supérieur qui doivent entrer en vigueur dès l'année universitaire 2008-2009. Certains points de cette réforme sont positifs comme la création d'un échelon supplémentaire pour les 100 000 boursiers les plus défavorisés, l'ouverture du système boursier à 50 000 étudiants supplémentaires, l'augmentation des bourses de mobilité internationale ou encore l'ouverture des bourses au mérite aux étudiants bénéficiant de bourses sur critères sociaux. Paradoxalement, une décision d'apparence technique risque dans le même temps de pénaliser plusieurs milliers d'étudiants. Par souci de "simplification", le Gouvernement décide de supprimer 8 critères d'attribution sur 10 (les "points de charge") qui permettaient jusqu'à présent d'adapter le montant des bourses en fonction de la situation propre à chaque étudiant. Ainsi, le handicap ou le statut d'étudiant à charge d'un parent isolé ne seront dorénavant plus pris en compte. L'impact de l'éloignement sur le calcul de la bourse a par ailleurs été fortement réduit. À titre d'exemple, un jeune, étudiant à 40 kilomètres de son domicile et dont la famille a un revenu global de 20 000 euros, percevra 704 euros de moins pour l'année universitaire. De même, un étudiant en situation de handicap dont les parents ont un revenu global de 13 500 euros perdra deux points liés au handicap et percevra 1 171 euros de moins qu'avec l'ancien barème. Si l'augmentation du nombre de bénéficiaires de notre système de bourses étudiantes est une nécessité absolue dans un contexte de précarisation des jeunes issus des classes moyennes et de paupérisation de plus en plus de familles, la suppression des critères qui fondaient leur attribution et donc de leur progressivité est un contresens inacceptable. Le système de bourses français est fondé sur la notion républicaine d'égalité des chances. Supprimer les critères qui permettent justement de quantifier les inégalités et de participer à leur correction, pour que chacun puisse disposer de chances de réussite équivalentes, va bien évidemment à l'encontre de ce principe. Cette réforme est d'autant plus grave que le contexte social actuel devrait au contraire conduire le Gouvernement à affiner les instruments permettant de corriger des inégalités se creusant. La "simplification" n'est, en la matière, certainement pas une bonne idée et ne saurait fonder l'action d'un Gouvernement. Comme elle le sait, les Français sont confrontés à une baisse inquiétante du pouvoir d'achat, l'augmentation du prix des denrées alimentaires de base et des loyers touche de plein fouet les étudiants, les inégalités se creusent. Le travail salarié devient une obligation pour de plus en plus d'étudiants. L'augmentation des aides sociales à direction des étudiants ne suit depuis 2001 ni l'inflation, ni l'augmentation des dépenses étudiantes obligatoires. Cette situation sociale pèse bien évidemment sur la capacité de très nombreux étudiants à mener des études. La France ne peut se résigner à constater l'abandon contraint des ambitions de sa jeunesse. Sa réforme va pourtant avoir pour effet de supprimer ou de baisser considérablement le montant de la bourse de milliers d'étudiants et de nourrir les inquiétudes de la jeunesse face à l'avenir, dont de très nombreuses études démontrent l'inquiétante profondeur. Afin de pouvoir effectuer correctement son mandat de député, il lui demande de bien vouloir lui indiquer avec précision le nombre d'étudiants boursiers concernés par une diminution de leur bourse en raison de la modification ou de la suppression des points de charge. Il lui demande, par ailleurs, si le Gouvernement étudie la possibilité de maintenir et de développer les points de charge qui sont l'instrument même de l'égalité des chances que le système boursier est censé garantir.
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Texte de la REPONSE :
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La réforme du système des aides directes aux étudiants mise en oeuvre en 2008 répond à la double nécessité de simplifier un système d'aides obsolète et opaque, pour le rendre plus juste, et de donner davantage aux étudiants qui en ont le plus besoin. Par ailleurs, ce nouveau dispositif sera étendu à 50 000 étudiants supplémentaires afin de mieux aider les classes moyennes à revenus modestes souvent exclues du système des aides. Les critères d'attribution des bourses, auparavant de nature très diverse et de l'ordre d'une dizaine, sont désormais ramenés à deux : l'éloignement entre le domicile et le lieu d'études et le nombre d'enfants à charge du foyer fiscal de référence (la pondération des points de charge, majorée dans le cadre de la réforme, varie selon que l'enfant est ou non étudiant dans l'enseignement supérieur). Le critère de l'éloignement entre le domicile familial et le lieu d'études a été conservé dans le calcul du montant de la bourse afin de prendre en compte la réalité des contraintes de l'étudiant. La nouvelle pondération qui lui est appliquée permet de limiter les forts effets de seuil qu'induisait jusqu'alors ce critère (différence significative du montant de la bourse pour un ou deux kilomètres d'écart) et les nombreux contentieux qu'il entraînait. Les autres points de charge, tels ceux liés au handicap ou encore à la situation de parent isolé, n'ont pas été maintenus dans un souci d'équité et de cohérence avec les dispositifs d'aide existant en parallèle. Ainsi, les points de charge liés au handicap de l'étudiant ont-ils été supprimés pour tenir compte de l'extension, à compter d'avril 2008, de la prestation compensatoire au handicap (PCH) aux étudiants handicapés de 18 ans et plus. Cette prestation, créée par la loi n° 2005-102 du 11 février 2005, était jusqu'alors réservée aux jeunes de plus de 21 ans. D'un montant moyen de 1 300 euros, elle est attribuée par les maisons départementales du handicap en fonction du handicap spécifique de l'étudiant et de ses besoins en personnel d'accompagnement ou de matériels. S'agissant de la réglementation des bourses, la suppression des points de charge liés au handicap ne remet pas en cause, pour les étudiants handicapés, la possibilité de bénéficier, à titre dérogatoire, de trois droits annuels supplémentaires de bourse. Par ailleurs, depuis 2007, le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche accompagne financièrement les établissements publics d'enseignement supérieur dans leur mission d'accueil et d'intégration des étudiants 'handicapés formalisée dans la charte « université-handicap ». Les crédits dédiés, qui s'élèvent à 7,5 millions d'euros, permettent le financement d'aides individuelles (transcription en braille, aide à la communication, assistance pédagogique...) ainsi que de dispositifs structurels (mise en accessibilité des locaux des bibliothèques, logiciels spécifiques...). Enfin, depuis 2008, 15 millions d'euros sont inscrits en loi de finances pour accompagner les établissements d'enseignement supérieur dans les travaux de mise en accessibilité de leurs locaux. Si le point de charge « parent isolé » a bien été supprimé, en cas de situation de parent isolé attestée par la lettre « T » figurant sur l'avis fiscal de référence, et indépendamment de la suppression du point de charge correspondant, le seul revenu du parent isolé sera désormais systématiquement pris en compte comme base de calcul du montant de la bourse. Auparavant, le traitement de ces dossiers n'était ni harmonisé ni systématique et pouvait donner lieu à certaines inégalités de traitement. Dans les cas où la simplification des critères d'attribution entraîne une diminution du montant de la bourse par rapport à celui perçu en 2007-2008, l'étudiant sera invité à signaler cette situation au CROUS de son académie. Son dossier sera alors examiné par une commission rectorale, qui décidera, le cas échéant, toute mesure compensatoire adéquate.
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