FICHE QUESTION
13ème législature
Question N° : 21694  de  M.   Lamy François ( Socialiste, radical, citoyen et divers gauche - Essonne ) QE
Ministère interrogé :  Justice
Ministère attributaire :  Justice
Question publiée au JO le :  22/04/2008  page :  3393
Réponse publiée au JO le :  02/12/2008  page :  10498
Date de signalisat° :  25/11/2008
Rubrique :  traités et conventions
Tête d'analyse :  traité instituant une cour pénale internationale
Analyse :  attitude de la France
Texte de la QUESTION : M. François Lamy attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur la mise en conformité du droit pénal français avec le statut de la Cour Pénale Internationale (CPI). Plus de sept ans après la ratification du statut de Rome par la France le 9 juin 2000, aucun projet de loi n'est encore venu en séance pour venir rattraper ce retard en matière de répression des crimes internationaux. Il est urgent que la loi française définisse les crimes de génocide, crimes contre l'humanité et crimes de guerre conformément au statut de la Cour et qu'elle reconnaisse l'imprescriptibilité de ces crimes et l'applicabilité de toute immunité tenant à la qualité officielle des auteurs de ces crimes. Pour pouvoir juger les crimes énumérés dans le statut de la Cour, les juges français ont besoin de s'appuyer sur une loi interne. Il lui rappelle également que le projet de loi n° 3271 portant adaptation du droit pénal à l'institution de la Cour Pénale Internationale ne contient aucune disposition relative aux crimes de guerre et que ce projet de loi ne reconnaît pas aux tribunaux français de compétence territoriale élargie pour les crimes visés par le statut de la CPI. Il lui rappelle enfin que les États se sont engagés à rendre leur justice complémentaire de celle de la CPI dont l'oeuvre serait vouée à l'échec si elle devait juger seule tous les dossiers. Ainsi, il lui demande si elle entend déposer au plus vite un projet de loi conforme aux principes généraux du droit pénal international afin que la France ne devienne pas un îlot d'impunité pour les plus grands criminels.
Texte de la REPONSE : La garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire qu'elle partage son souhait de mettre notre droit en conformité avec les engagements résultant du traité de Rome portant statut de la Cour pénale internationale et de contribuer ainsi au renforcement du cadre juridique permettant de lutter contre les crimes de génocide, crimes contre l'humanité et crimes de guerre. Elle rappelle, à cet égard, le rôle déterminant joué par la France dans la négociation de ce traité et sa contribution au fonctionnement de la Cour pénale internationale. Aussi, le Gouvernement a-t-il eu à coeur, au travers du projet de loi n° 3271 portant adaptation du droit pénal à l'institution de la Cour pénale internationale, de traduire son engagement en faveur d'une justice pénale internationale permanente et universelle. La garde des sceaux, ministre de la justice, rappelle, à cet égard, que le statut de Rome n'impose pas aux États parties d'adapter leur droit pénal aux infractions qui relèvent de la compétence de la Cour pénale internationale, mais que la France a néanmoins choisi de compléter et modifier ses textes de répression afin de pouvoir pleinement exercer sa compétence et de permettre à la Cour de n'intervenir qu'à titre complémentaire comme le statut le prévoit. Elle souligne, à cet égard, que de nombreuses dispositions du projet de loi vont au-delà des dispositions du statut, notamment en ce qui concerne l'incrimination du génocide et la définition des crimes de guerre. Sur ce point en particulier, le projet de loi consacre une définition du crime de guerre englobant toutes les atteintes à l'intégrité physique et non seulement les plus graves, même commises hors de conflits internationaux ou par un militaire agissant isolément. S'agissant de l'établissement d'une compétence élargie au profit des juridictions françaises, la garde des sceaux, ministre de la justice, rappelle que la France n'instaure en principe aucune compétence élargie si elle ne s'y est pas engagée expressément par voie de convention. Or, à cet égard, elle relève qu'aucune disposition du traité de Rome n'impose aux États parties de se reconnaître compétents pour juger les génocides, crimes contre l'humanité et crimes de guerre prévus par le statut sans qu'un lien personnel ou territorial ne rattache les faits ou les auteurs de ces crimes à leur propre territoire ou à leurs ressortissants. Néanmoins, sensible à la préoccupation d'éviter que notre pays puisse servir de refuge à des auteurs de crimes contre l'humanité ou crimes de guerre, le Gouvernement a, lors des discussions au Sénat, soutenu un amendement établissant la compétence des juridictions françaises pour juger les auteurs présumés d'infractions résidant habituellement sur le territoire national. S'agissant de la prescription des crimes établis par le traité de Rome, la garde des sceaux, ministre de la justice, rappelle qu'en droit français la prescription des infractions répond à une exigence constitutionnelle et que, partant, seuls les crimes contre l'humanité sont imprescriptibles. En outre, en opportunité, l'imprescriptibilité des crimes de guerre aurait pour effet de banaliser la catégorie des crimes contre l'humanité en les faisant relever du même régime juridique que ces derniers. Ce projet de loi, qui renforce notre droit positif et répond à l'ambition de la France de disposer d'une Cour pénale internationale reconnue et en mesure d'assumer pleinement sa mission, a été adopté par le Sénat, en première lecture, le 10 juin 2008. Tout comme l'honorable parlementaire, la garde des sceaux, ministre de la justice, souhaite qu'il puisse être inscrit à la première date utile à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale.
S.R.C. 13 REP_PUB Ile-de-France O