FICHE QUESTION
13ème législature
Question N° : 2171  de  M.   Urvoas Jean-Jacques ( Socialiste, radical, citoyen et divers gauche - Finistère ) QG
Ministère interrogé :  Justice et libertés (garde des sceaux)
Ministère attributaire :  Justice et libertés (garde des sceaux)
Question publiée au JO le :  21/05/2010  page : 
Réponse publiée au JO le :  21/05/2010  page :  2700
Rubrique :  traités et conventions
Tête d'analyse :  traité instituant une cour pénale internationale
Analyse :  attitude de la France
DEBAT :

COUR PÉNALE INTERNATIONALE

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Urvoas, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
M. Jean-Jacques Urvoas. Ma question, madame la garde des sceaux, concerne le projet de loi portant adaptation de notre droit à l'institution de la Cour pénale internationale.
Cela fait dix ans que nous avons ratifié le traité de Rome. Dix longues années que, dans cette enceinte, des voix s'élèvent régulièrement sur l'urgence de l'appliquer dans notre droit interne.
Pourtant, le 31 mai prochain, à Kampala, en Ouganda, au moment de la conférence internationale de révision de la CPI, notre pays risque d'être montré du doigt.
En effet, le texte que nous attendons, tel qu'il a été voté par le Sénat, il y a deux ans, n'est pas satisfaisant. Bien sûr, il contient une disposition élargissant la compétence territoriale des tribunaux français qui devrait permettre de poursuivre et de juger les auteurs de génocide, crimes de guerre et crimes contre l'humanité commis à l'étranger. Mais, peut-être effrayé par son audace, le Sénat a vidé le mécanisme de sa substance.
Il l'a en effet assorti de quatre conditions très restrictives, que vous connaissez : l'exigence de la résidence habituelle de l'auteur des faits sur le territoire français, la double incrimination, le monopole des poursuites par le parquet, l'inversion du principe de complémentarité.
Heureusement, sur proposition de notre collègue Nicole Ameline, la commission des affaires étrangères s'est prononcée à l'unanimité, il y a déjà presque un an, pour la levée de ces verrous.
Je vous interroge donc doublement. Tout d'abord sur l'inscription du texte à l'ordre du jour. Elle est naturellement urgente. Si le Gouvernement n'y procédait pas, le groupe SRC étudierait alors l'hypothèse d'inscrire le texte à l'ordre du jour d'une prochaine niche parlementaire.
Ensuite, comment vous positionnez-vous par rapport à la recommandation de la commission des affaires étrangères ? Allez-vous l'approuver ou vous y opposer ? Vous feriez de notre pays, dans ce dernier cas, une terre d'impunité pour les auteurs des crimes les plus graves.
Madame la garde des sceaux, vos réponses sont attendues par les organismes qui composent la Coalition française pour la Cour pénale internationale, mais aussi par tous ceux qui sont attachés aux droits de l'homme. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
M. le président. La parole est à Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés. Monsieur le député, le texte voté par le Sénat sur la Cour pénale internationale est actuellement devant la commission des lois, qui a interrogé le ministère de la justice il y a quelques jours à peine - ou, au maximum, quelques semaines. Les travaux sont donc en cours.
En ce qui concerne le dispositif, la France, étant membre du traité de Rome, doit apporter son entier concours à la Cour, ce qu'elle fait dans le domaine financier comme dans le domaine judiciaire.
Le texte voté à l'unanimité au Sénat prévoit simplement que, lorsque la Cour pénale internationale décline sa propre compétence, les juridictions françaises ont la possibilité de s'y substituer, de façon qu'il soit possible de poursuivre les crimes contre l'humanité, les crimes ayant le caractère de génocide ou les crimes de guerre.
Dès lors qu'il s'agit d'une proposition de substitution, un certain nombre de conditions ont été fixées, qui tiennent notamment à la résidence habituelle en France de la personne incriminée et à la circonstance que la qualification soit reconnue dans notre pays - ce qui paraît évident - et dans le pays où le crime a été commis.
Ces décisions ont été adoptées à l'unanimité par le Sénat mais seront soumises à la discussion de l'Assemblée. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

S.R.C. 13 REP_PUB Bretagne O