FICHE QUESTION
13ème législature
Question N° : 22014  de  Mme   Marc Jeanny ( Socialiste, radical, citoyen et divers gauche - Guadeloupe ) QE
Ministère interrogé :  Intérieur, outre-mer et collectivités territoriales
Ministère attributaire :  Travail, relations sociales, famille et solidarité
Question publiée au JO le :  29/04/2008  page :  3609
Réponse publiée au JO le :  09/12/2008  page :  10753
Date de signalisat° :  02/12/2008 Date de changement d'attribution :  27/05/2008
Rubrique :  outre-mer
Tête d'analyse :  prestations familiales
Analyse :  disparités
Texte de la QUESTION : Mme Jeanny Marc rappelle à Mme la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales que 62 ans après la départementalisation des 4 vieilles colonies, l'égalité sociale entre les populations de l'Hexagone et celles des départements d'outre-mer, qui a tant fait débat, reste encore à parachever. Si sa véritable application a été lancée dans les années 1970, et malgré la mise en oeuvre des propositions du rapport Rippert de 1989, des inégalités de traitement en matière de prestations familiales perdurent encore. Quelques exemples significatifs peuvent illustrer cet état de fait. S'agissant des employeurs et travailleurs indépendants (ETI), ces derniers pâtissent d'un traitement discriminant en fonction du lieu où ils exercent leur activité. Dans les départements de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Martinique et de la Réunion, le bénéfice des prestations familiales a été étendu aux ETI, par la loi de programme n° 86-1383 relative au développement des départements d'outre-mer, qui a mis en place un concept très largement obsolète, qui est la parité sociale globale définie par l'article 12 de ce texte. Le législateur de l'époque a instauré pour les ETI des DOM une condition d'attribution particulière qui introduit un facteur d'inégalité, au regard des conditions d'attribution de ces prestations dans l'Hexagone. Ainsi, l'article L. 755-2-1 du code de la sécurité sociale subordonne au paiement préalable de leurs cotisations le versement des prestations familiales aux employeurs et travailleurs indépendants des DOM, contrairement à ceux de la France hexagonale. Le maintien d'une telle condition équivaut à considérer que, dans ces départements, c'est l'acquittement des cotisations qui ouvre le droit au versement des prestations familiales. Or, depuis 1989, la condition d'activité a disparu pour l'attribution des prestations familiales aux personnes demeurant dans ces départements. Par ailleurs, le montant du complément familial est, dans les DOM, nettement inférieur à celui de la France hexagonale, s'établissant respectivement à 23,79 % de la BMAF contre 41,65 %. Il conviendrait donc de poursuivre le processus d'alignement avec le montant de cette prestation. Une autre particularité concerne les droits connexes liés au versement du complément de libre choix d'activité de la PAJE et du complément familial. Ces deux prestations ont en effet été étendues aux DOM sans que soit ouvert le droit à l'affiliation gratuite à l'assurance vieillesse des parents au foyer. Dans ces conditions, il convient dès lors de mieux prendre en compte la réalité sociologique de l'outre-mer par le biais de l'extension des droits connexes à ces prestations. L'allocation logement, quant à elle, se caractérise par trois particularités. En premier lieu, le maintien du calcul de l'allocation de logement sur un nombre d'occupants limité à six crée une véritable inégalité de traitement qui ne prend pas en compte la composition effective du foyer dans les DOM. De ce fait, l'allocation de logement n'assure pas de manière identique, pour les familles de l'outre-mer, sa dimension d'aide au paiement du loyer. Ainsi, le maintien de ce plafond de six occupants pour le calcul de l'allocation logement en outre-mer ne se justifie plus. Il conviendrait en revanche de prendre en compte dans ce calcul le nombre de personnes effectivement présentes au foyer. Ensuite, le forfait charges est également, en outre-mer, nettement inférieur à celui de la France hexagonale : il serait souhaitable de le revaloriser pour prendre en compte les aménagements liés aux conditions climatiques et les équipements divers favorisant le développement durable. Enfin, en troisième lieu, eu égard au renchérissement des coûts de la construction et du foncier dans les DOM, ces derniers se rapprochent davantage de la zone 1 que de la zone 2, qui est actuellement la zone de référence pour la définition des loyers plafonds de l'outre-mer. Il conviendrait donc, sur le fondement de l'actualisation de l'évolution de ces coûts, d'appliquer à l'outre-mer les barèmes de la zone 1 pour le calcul de l'allocation de logement. En conséquence, elle appelle son attention sur la nécessité d'établir une véritable égalité sociale au bénéfice des personnes demeurant dans les 4 départements français d'outre-mer, au regard des prestations mises en place dans l'Hexagone, et elle lui demande de bien vouloir lui préciser les mesures qu'elle entend mettre en oeuvre afin de poursuivre l'alignement des prestations familiales servies en outre-mer et des conditions afférentes sur celles de la France hexagonale.
Texte de la REPONSE : L'attention du Gouvernement a été appelée sur l'obligation d'aligner les prestations sociales servies au bénéfice des personnes demeurant dans les départements d'outre-mer (DOM) à celles dispensées sur le territoire métropolitain. Le Gouvernement qui attache beaucoup d'importance à ce principe d'égalité doit tenir compte de toutes les spécificités de ces départements, notamment en ce qui concerne l'octroi des prestations familiales. L'obligation de produire un justificatif de paiement des cotisations sociales échues pour bénéficier des prestations familiales date de la loi de programme relative à l'outre-mer du 31 décembre 1986. Il s'agissait, parallèlement à l'extension des prestations familiales aux travailleurs indépendants, d'assurer la participation de ceux-ci au financement de la protection sociale. Fin 2006, malgré plusieurs dispositifs d'allégement des dettes sociales spécifiques aux travailleurs indépendants des départements d'outre-mer, le taux de dettes restant à recouvrer était encore de 13,2 % dans les DOM, contre 3,56 % en métropole. Cette disposition vise en pratique les seuls couples de travailleurs indépendants. En outre, dans le cadre de toutes les mesures d'apurement de dettes sociales, dès lors que les travailleurs indépendants débiteurs respectent leur plan d'apurement et les échéances courantes, la condition d'être à jour de ses cotisations est considérée comme acquise. Enfin, le nouveau calendrier de recouvrement des cotisations et contributions sociales des travailleurs indépendants, mis en oeuvre depuis le 1er janvier 2008, a pour effet de réduire le délai de versement des prestations familiales. Les nouvelles dates d'exigibilité (5 février, 5 juin, 5 août et 5 novembre) permettent aux allocataires des prestations familiales de justifier du règlement effectif de leurs cotisations sociales du troisième trimestre dès le mois d'août, et ainsi de percevoir à temps l'allocation de rentrée scolaire. S'agissant des prestations familiales, un premier effort d'harmonisation a été opéré dans les années 1970, par notamment l'extension aux DOM des nouvelles prestations créées avec, pour certaines d'entre elles, des adaptations (allocation de rentrée scolaire, allocation parent isolé, allocation de logement sociale...). Cet effort s'est accentué à compter de 1990. En effet, les allocations familiales dont le montant était inférieur à celui de la métropole ont été alignées sur celles de cette dernière à compter de 1991. L'alignement a été totalement réalisé en 1993, par application de la base mensuelle de calcul des allocations familiales en vigueur en métropole. Cette démarche s'est achevée en 2006, avec l'alignement progressif du régime applicable en matière d'allocation de parent isolé dans les DOM sur la métropole. Si les montants des prestations familiales servies dans les DOM sont désormais identiques à ceux applicables en métropole, certaines prestations font toutefois l'objet de conditions d'attribution ou de versement spécifiques. Ainsi les familles des DOM peuvent bénéficier du complément familial dés qu'elles ont un enfant âgé de trois à cinq ans. En métropole, cette prestation est réservée aux familles d'au moins trois enfants. Par ailleurs, les familles de ces départements perçoivent les allocations familiales et les majorations pour âge dès le premier enfant, c'est-à-dire plus tôt et plus longtemps que les familles métropolitaines pour lesquelles ces prestations n'interviennent qu'à compter du deuxième enfant. De même, l'allocation de logement est versée jusqu'aux 22 ans des enfants contre 21 ans en métropole. Enfin, en matière de prestations en faveur du logement, si l'aide personnalisée au logement n'existe pas dans les DOM, de fortes aides à la pierre sont en revanche servies permettant d'accroître la production de logements neufs et la réhabilitation de logements existants. Cependant, un rapprochement progressif a été opéré au cours de ces dernières années avec l'harmonisation progressive des loyers-plafonds des DOM sur la métropole, et en particulier l'alignement des loyers-plafonds des familles sur ceux de la zone 2 de métropole à compter du 1er juillet 2002. Cette modification a permis d'augmenter le montant des allocations de logement pour les personnes acquittant un loyer supérieur à l'ancien plafond. Par ailleurs, le Gouvernement envisage de prendre une mesure permettant un rattrapage partiel du forfait charges par rapport à celui de la métropole. Le régime spécifique des prestations familiales applicable dans les DOM s'explique donc par le contexte particulier économique et social de ces départements. Aussi, la recherche de la parité avec la métropole qui ne manquerait pas de remettre en cause certaines dispositions, aujourd'hui plus favorables aux allocataires des départements d'outre-mer, doit être analysée de manière globale et le Gouvernement ne prévoit pas d'engager prochainement des réflexions en ce sens. Par conséquent, et compte tenu de l'ensemble des efforts déjà entrepris pour permettre un retour à la normale pour cette catégorie de cotisants, le Gouvernement entend maintenir le lien entre paiement des cotisations et contributions sociales et octroi des prestations sociales.
S.R.C. 13 REP_PUB Guadeloupe O