Texte de la QUESTION :
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M. Claude Gatignol attire l'attention de Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi sur les inquiétudes exprimées par les entreprises du secteur laitier concernant les suites qui pourraient être données au rapport de Mme Hagelsteen sur la négociabilité sans contrepartie des tarifs et des conditions générales de vente dans la perspective d'un approfondissement de la réforme du cadre législatif des relations entre fournisseurs et distributeurs. La loi Chatel du 3 janvier 2008 donne aux distributeurs toute possibilité de baisser les prix au profit du consommateur, en offrant un vaste champ à la négociation entre fournisseurs et distributeurs sur la base de contreparties mesurables. Malgré cette réalité qui donne les moyens aux distributeurs de réaliser une vraie baisse des prix en France, certains d'entre eux revendiquent la possibilité de négocier unilatéralement les conditions générales de vente, et en particulier les tarifs de base que les fournisseurs leur proposent, sans avoir à justifier de contreparties. Si cette proposition était retenue, elle réduirait toute négociation commerciale à la "loi du plus fort". De plus, comme l'énonce clairement le rapport Hagelsteen, la faible intensité concurrentielle au niveau des zones de chalandise réduira les effets de cette réforme à un simple transfert de marge au profit des distributeurs. Les entreprises du secteur laitier, confrontées à la hausse durable des matières premières et aux conséquences d'un éventuel accord à l'OMC, craignent donc d'être davantage encore affaiblies dans leur rapport avec la grande distribution. C'est pourquoi il souhaiterait connaître sa position sur ce dossier.
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Texte de la REPONSE :
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Dans le cadre de la réforme du cadre législatif des relations entre fournisseurs et distributeurs qui a, d'ores et déjà, fait l'objet du vote de la loi n° 2008-3 du 3 janvier 2008 pour le développement de la concurrence au service des consommateurs, la mise en place d'une plus grande négociabilité des tarifs et des conditions de vente est apparue comme une mesure susceptible de favoriser le renforcement de la concurrence par les prix. En confiant à Mme Hagelsteen, ancienne présidente du Conseil de la concurrence, le soin d'examiner les conditions d'une plus grande négociabilité des conditions de vente entre fournisseurs et distributeurs, le Gouvernement a souhaité qu'une telle question soit soigneusement étudiée par cette mission à la fois sous l'angle des conditions à établir pour atteindre cette plus grande négociabilité des conditions de vente entre fournisseurs et distributeurs, mais également sous celui des mesures d'accompagnements nécessaires comme de l'évaluation de son impact sur les filières économiques. La proposition exprimée par ce rapport de supprimer les entraves à la différenciation tarifaire entre distributeurs tout en maintenant les conditions générales de vente comme socle de la négociation commerciale et la possibilité de sanctionner les abus dans la relation commerciale ouvre la voie à une réforme équilibrée. C'est pourquoi le Gouvernement a fait le choix de retenir les principales propositions de ce rapport dans le cadre du projet de loi de modernisation de l'économie qui vient d'être adopté par le Parlement. Ce texte crée les conditions d'une négociation plus transparente des conditions commerciales entre fournisseurs et distributeurs, en mettant fin au système des marges arrière. Cette mesure permise par la suppression des entraves à la différenciation tarifaire entre distributeurs, associée à des possibilités plus grandes d'ouverture de grandes surfaces, est de nature à permettre un fonctionnement plus concurrentiel des secteurs économiques concernés, dont peuvent tirer profit les entreprises et les consommateurs. En effet, l'instauration d'une plus grande liberté de négociation entre fournisseurs et distributeurs devrait permettre de négocier sur des bases plus saines et plus favorables aux consommateurs. Bien entendu, l'objectif du Gouvernement n'est pas que l'instauration de la liberté tarifaire conduise à ce que se développent des demandes abusives consistant à imposer aux industriels ou aux producteurs des avantages financiers ne comportant aucun bénéfice économique pour le fournisseur ou aboutissant à les fragiliser économiquement. C'est pourquoi il a été recherché lors de la discussion parlementaire les moyens de concilier la demande légitime exprimée par ces professionnels avec le souhait du Gouvernement de ne pas affaiblir l'efficacité du dispositif proposé. Ainsi, la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 prévoit à son article 92 que la convention écrite conclue entre le fournisseur et le distributeur ou le prestataire de services indique les obligations auxquelles se sont engagées les parties en vue de fixer le prix à l'issue de la négociation commerciale. Le secteur agricole bénéficie en outre d'un régime spécifique. Le texte adopté par le Parlement prévoit ainsi de compléter l'article L. 441-2-1 du code de commerce par une phrase mentionnant que le contrat passé entre le fournisseur de produits agricoles et le distributeur indique les avantages tarifaires consentis par le fournisseur au distributeur au regard des engagements de ce dernier. Une telle mesure est de nature à permettre un rééquilibrage et une meilleure transparence dans les relations commerciales. Le distributeur qui négocie des avantages tarifaires avec un producteur agricole devra offrir des contreparties et les faire apparaître dans le contrat prévu par le code de commerce. Par ailleurs, le statut des conditions de vente n'est pas modifié et sont maintenues les règles strictes de formalisme des contrats qui assurent la transparence sur les services échangés entre cocontractants, règles dont les manquements sont pénalement sanctionnés. Enfin, l'interdiction de la revente à perte reste en vigueur. La loi de modernisation de l'économie prévoit également un renforcement des sanctions civiles des pratiques abusives et facilite les possibilités de sanction des abus contractuels. Ces mesures constituent un ensemble équilibré de nature à permettre un fonctionnement plus concurrentiel des secteurs économiques, dont peuvent tirer profit les entreprises, et dont le Gouvernement attend qu'il concoure à l'établissement d'une concurrence sur les prix plus favorable au consommateur.
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