FICHE QUESTION
13ème législature
Question N° : 254  de  M.   Juanico Régis ( Socialiste, radical, citoyen et divers gauche - Loire ) QOSD
Ministère interrogé :  Logement et ville
Ministère attributaire :  Logement et ville
Question publiée au JO le :  13/05/2008  page :  3889
Réponse publiée au JO le :  14/05/2008  page :  2013
Rubrique :  aménagement du territoire
Tête d'analyse :  politique de la ville
Analyse :  zones franches urbaines. perspectives. Saint-Étienne
Texte de la QUESTION : M. Régis Juanico alerte Mme la ministre du logement et de la ville sur l'avenir de la zone franche urbaine de Montreynaud. La loi du 14 novembre 1996 relative à la mise en oeuvre d'un pacte de relance pour la ville a permis de créer 44 zones franches urbaines réparties sur le territoire national. Parmi ces expérimentations déjà anciennes figure celle du quartier de Montreynaud à Saint-Étienne. En 2003, le dispositif a été reconduit avant que la loi pour l'égalité des chances du 31 mars 2006 ne prolonge l'expérience jusqu'en 2012. De fait, à la fin de l'année 2006, 346 entreprises, employant 1 285 salariés, étaient ainsi installées dans le périmètre de la zone franche. Pour cette même année 2006, 153 d'entre elles avaient sollicité et obtenu des exonérations de cotisations patronales, en embauchant notamment 141 nouveaux salariés. L'opération de dynamisation de Montreynaud se poursuit donc et l'on peut estimer que le quartier, et ses habitants en bénéficient ; en partie au moins, puisque seulement 26 de ces 141 nouveaux employés en 2006 résidaient directement dans le périmètre de la zone franche urbaine. L'enjeu de développement du secteur reste néanmoins posé et il souhaiterait savoir quels sont les projets envisagés pour amplifier et accompagner la création d'entreprises et les recrutements dans les établissements existants. En effet, derrière un constat globalement encourageant, le bilan de cette zone franche reste à nuancer. D'abord, en dépit des aides significatives accordées aux entreprises, le taux de chômage du quartier, et de la ville de Saint-Étienne plus généralement, reste à un niveau (8,8 %) supérieur à celui du reste du département de la Loire (7,9 %) et de la région Rhône-Alpes (8 % à la fin du 2ème trimestre 2007). Ensuite, on peut craindre qu'une partie des entreprises qui ont fait le choix de s'installer dans le périmètre concerné s'y soient déplacées dans le seul but de bénéficier d'exonérations, désertant ainsi d'autres communes et d'autres quartiers, sans gain net d'emploi. Enfin, des chiffres montrent que 7 % seulement de l'ensemble des salariés de la zone franche urbaine ont directement été recrutés dans le quartier de Montreynaud. Ce pourcentage tomberait même plus bas si on ne tenait pas compte des forts pourcentages affichés par les quelques sociétés les plus volontaires et les plus impliquées dans cette démarche citoyenne de recrutement local et d'insertion. C'est pourquoi il lui demande de bien vouloir lui indiquer quels sont les outils d'évaluation de la zone franche urbaine de Montreynaud qui ont été mis en place, et surtout de bien vouloir indiquer aux habitants de ce quartier quels sont les projets des services de l'État pour renforcer encore la dynamique de l'emploi dans le quartier.
Texte de la REPONSE :

ZONE FRANCHE URBAINE DE MONTREYNAUD
À SAINT-ÉTIENNE

M. le président. La parole est à M. Régis Juanico, pour exposer sa question, n° 254, relative à l' avenir de la zone franche urbaine de Montreynaud à Saint-Étienne.
M. Régis Juanico. Madame la ministre du logement et de la ville, la loi du 14 novembre 1996 relative à la mise en oeuvre d'un pacte de relance pour la ville a permis de créer 44 zones franches urbaines réparties sur le territoire national. En 2003, le dispositif a été reconduit avant que la loi pour l'égalité des chances du 31 mars 2006 ne prolonge l'expérience jusqu'en 2012.
Dans le département de la Loire, où vous vous êtes rendue il y a quelques mois, le seul quartier à bénéficier depuis 1997 d'un classement en zone franche urbaine est celui de Montreynaud à Saint-Étienne, sur une superficie de plus de 100 hectares.
Ce quartier de 8 000 habitants, dont une très grande majorité sont d'origine modeste, connaît des difficultés importantes sur le plan social et en termes d'emploi avec un taux de chômage supérieur à 20 %, en particulier chez les jeunes.
Le bilan de la zone franche urbaine est certes encourageant, puisque, à la fin de l'année 2006, 346 entreprises employant 1 285 salariés étaient installées dans le périmètre de la zone franche. Pour cette même année 2006, 153 d'entre elles avaient sollicité et obtenu des exonérations de charges sociales et patronales, en embauchant 141 nouveaux salariés. Mais ce bilan n'est pas complètement satisfaisant dans la mesure où, en 2006, seulement 26 de ces 141 nouveaux employés résidaient directement dans le périmètre de la zone franche urbaine, soit 18 % seulement des emplois créés.
Les jeunes du quartier de Montreynaud, que je rencontre régulièrement et qui sont les premiers concernés par la zone franche urbaine, me font part de leur scepticisme. Ils soupçonnent certaines entreprises de profiter de l'effet d'aubaine des exonérations fiscales et sociales pour simplement transférer leur boîte à lettres dans le secteur. Ils se plaignent de se voir proposer des contrats précaires ou d'entendre les entreprises leur opposer fréquemment leur insuffisante qualification par rapport au profil des postes proposés lors des entretiens d'embauche.
Quels outils d'évaluation de la zone franche urbaine de Montreynaud ont été mis en place pour bien mesurer l'impact du dispositif de la clause d'embauche locale, pour favoriser la qualité des contrats de travail proposés et pour améliorer les parcours de formation des jeunes concernés ? Quels projets les services de l'État envisagent-ils pour favoriser la création d'entreprises et le recrutement des habitants de la zone franche ? Je pense notamment à l'installation prochaine d'un centre d'activité sur le développement durable au coeur de ce quartier.
M. le président. La parole est à Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville.
Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville. Monsieur le député, je vous remercie de votre question, qui me donne l'occasion de faire le point sur les zones franches et de rassurer les jeunes. Même si ce dispositif ne répond pas toujours à leurs préoccupations personnelles, il nous offre des raisons d'espérer, dans un pays où le scepticisme grandit.
La zone franche urbaine de Montreynaud fait partie, vous l'avez rappelé, des 44 premières zones franches mises en oeuvre à compter du 1er janvier 1997. Comme toutes les autres zones franches, elle a connu son vrai développement à compter de la relance du dispositif en 2003 puis en 2006, qui a conduit à l'extension des zones existantes. On compte désormais cent zones franches urbaines.
Il faut d'abord rappeler que la zone franche est un dispositif dérogatoire, accepté par Bruxelles pour faire face à une situation de chômage exceptionnelle et à une absence très marquée de qualification dans la population active. Ces zones n'ont donc pu être créées que dans des endroits où le chômage était particulièrement élevé.
C'était le cas de Montreynaud. Je rappelle que le taux de chômage dans cette zone urbaine sensible était, en 1999, de 34,1 %, soit le double de celui de la commune de Saint-Étienne, lequel était, à l'époque, de 17 %. De même, les non-diplômés représentaient 40,8 % des actifs dans la ZUS, contre 22,3 % à Saint-Étienne.
Les chiffres que vous m'indiquez dans votre question sur la ZUS et la ville de Saint-Étienne, avec un chômage de 8,8 %, suffisent à montrer l'efficacité de cette politique. Celle-ci ne se dément pas, puisqu'en 2007, le nombre des demandeurs d'emplois de catégorie 1 a diminué de 15 % dans le quartier de Montreynaud, contre une baisse de 11 % sur l'ensemble du département. On voit bien là les fruits de la politique mise en place par ce gouvernement pour faire baisser le chômage et l'effet démultiplicateur de la ZFU pour le quartier de Montreynaud.
Vous vous inquiétez du risque de transfert des établissements. L'Observatoire national des zones urbaines sensibles nous apprend que ce risque n'existe pas puisque, dans deux cas sur trois, il s'agit de créations d'établissement, chiffre légèrement supérieur à ce que l'on observe dans les agglomérations où sont situées ces ZUS. Depuis la relance du dispositif en 2003, le taux d'installation de nouveaux établissements est de dix points plus élevé en ZFU que dans les unités urbaines correspondantes. La ZFU est donc un outil parfaitement adapté pour lutter contre le chômage dans les quartiers sensibles.
Les données les plus récentes de l'observatoire économique local mis en place par la ville de Saint-Étienne avec plusieurs partenaires - URSSAF, ANPE, chambres consulaires, direction régionale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle, services fiscaux, INSEE, bailleurs sociaux et bien d'autres - démontrent le dynamisme de la zone franche. Le nombre d'établissements a progressé de 9,5 % entre 2004 et 2006, passant de 316 à 346, alors que la situation stagnait à l'échelle de la ville : plus 0,8 %, ou de la communauté d'agglomération de Saint-Étienne Métropole : plus 1,9 %.
De même, les estimations des effectifs salariés étaient fortement à la hausse, à hauteur de plus 58,45 % sur la même période, passant de 811 à 1 285 salariés, alors qu'ils étaient à la baisse à l'échelle de Saint-Étienne : moins 3 %, ou de la communauté d'agglomération : moins 5,4 %.
Concernant la clause d'embauche locale, en 2005 comme en 2004, les résidents des zones franches urbaines représentent, en moyenne, 27 % des salariés recrutés. La ZFU est donc un excellent moyen de mixité sociale. Dans les entreprises qui y sont installées se côtoient des habitants des ZUS et des habitants du reste de la ville. Il faut souligner ici le remarquable travail accompli sous la précédente mandature par Michel Thiollière, alors maire de Saint-Étienne, dans le cadre du contrat urbain de cohésion sociale signé avec l'État pour favoriser l'accueil des entreprises dans la ZFU et pour rapprocher l'offre d'emplois de la demande.
La ZFU de Montreynaud est donc un grand succès, qui ira en s'accroissant encore grâce à la nouvelle politique en faveur des banlieues, annoncée par le Président de la République. Cette dynamique favorisera l'emploi des jeunes des quartiers sensibles grâce au contrat d'autonomie, que je vous recommande, ainsi que la création d'entreprises, soutenue par l'accompagnement de 20 000 créateurs issus des quartiers populaires.
Je ne doute pas, monsieur le député, que la nouvelle municipalité continuera d'accompagner ce dispositif si favorable à l'emploi dans les quartiers sensibles.
M. le président. La parole est à M. Régis Juanico.
M. Régis Juanico. Je vous remercie, madame la ministre, pour ces éléments de réponse.
Je confirme que vous pouvez compter sur la nouvelle équipe municipale et sur le nouveau maire, M. Maurice Vincent, pour être vigilants à l'égard des dispositifs qui seront créés dans la zone franche urbaine pour développer les activités et surtout l'emploi des habitants de ce quartier, mais également pour accompagner les efforts des services de l'État. Je trouve en effet qu'ils ont accompli, depuis quelques années, un bon travail de redressement de la ZFU.
Mme la ministre du logement et de la ville. Merci.
M. Régis Juanico. Ma seconde remarque est plus générale : elle concerne le mécanisme de compensation des exonérations de cotisations sociales et fiscales dans les zones franches urbaines. Les 340 millions d'euros qu'il coûte au budget de l'État représentent une somme importante. C'est pourquoi - nous avons déjà eu ce débat lors de la discussion budgétaire - la représentation nationale souhaiterait pouvoir disposer d'outils d'évaluation très fins pour apprécier au mieux si les emplois créés le sont bien dans les quartiers concernés. Je vous sais très attentive à cette exigence.
S.R.C. 13 REP_PUB Rhône-Alpes O