DEBAT :
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PROTECTION DES MINORITÉS CHRÉTIENNES M. le président. La parole est à M. Jean
Dionis du Séjour, pour le groupe Nouveau Centre. M. Jean Dionis du
Séjour. Ma question s'adresse au ministre des affaires
étrangères. Hier, notre collègue Étienne Pinte a évoqué avec dignité et
émotion l'attentat tragique qui a coûté la vie à plus de cinquante personnes
dimanche dans la cathédrale de Bagdad et interrogé le Gouvernement sur sa
volonté de porter ce drame devant le conseil de sécurité de l'ONU. Si Pierre
Lellouche a tenu des propos empreints de solidarité envers les chrétiens
d'Orient, il n'a pas apporté de réponse précise à cette question. Face à une
telle situation, la France a des responsabilités. Elle en a d'abord parce
qu'elle a, entre autres, des racines chrétiennes, tout en étant un grand pays
laïque. Elle en a aussi parce qu'elle bénéficie au Moyen-Orient d'une grande
crédibilité, due à une politique étrangère équilibrée dans cette région du
monde, politique impulsée par le général de Gaulle. Elle en a, enfin, parce
qu'elle est directement responsable depuis plusieurs siècles de la protection de
certains lieux saints chrétiens, notamment à Jérusalem. Ce drame ne va pas
s'évanouir. Ce matin, même, Al-Qaïda en Irak désignait les chrétiens du
Moyen-Orient comme des cibles légitimes. La proposition du Gouvernement français
de les accueillir en France est louable, mais ce n'est pas une réponse
suffisante. Nous ne pouvons laisser comme seul choix aux chrétiens d'Irak la
mort ou l'exil. Face à un tel drame, la France osera-t-elle conditionner une
partie de l'aide qu'elle apporte aux pays du Moyen-Orient au renforcement de la
protection de toutes les minorités religieuses ? Quelles sont précisément,
monsieur le ministre, les initiatives diplomatiques fortes que la France compte
prendre seule ou dans le cadre international - Union européenne, G20, Conseil de
sécurité ? (Applaudissements sur les bancs du groupe NC et sur de nombreux
bancs du groupe UMP.) M. le président. La parole est à
M. Bernard Kouchner, ministre des affaires étrangères et
européennes. M. Bernard Kouchner, ministre des affaires
étrangères et européennes. Dimanche dernier, monsieur le député, cinquante
chrétiens au moins ont péri dans une église syriaque de Bagdad. L'indignation
ne suffit pas, vous avez raison. Oui, nous avons des responsabilités, pas
seulement vis-à-vis des chrétiens d'Irak mais aussi vis-à-vis d'eux. Que
pouvons-nous faire ? Dès 2008, avec Brice Hortefeux, nous avons offert des
visas d'asile à des gens ayant déjà quitté l'Irak et se trouvant en Jordanie et
à d'autres qui étaient encore dans le nord du pays. Ce n'est pas
suffisant. Ces violences ont été revendiquées, je vous le rappelle, par une
prétendue organisation nommée État islamique d'Irak, au nom d'Al-Qaïda. Une
telle revendication ne nous laisse pas le choix. Il faut conditionner notre
aide, vous avez raison, mais l'aide de la France est destinée à former la police
et les juges. Nous ne pouvons cesser d'entraîner la police. Il faudrait
effectivement agir au niveau européen et peut-être porter la question devant le
Conseil de sécurité, mais, très honnêtement, nous devrions faire de même pour
d'autres attentats. Il y a eu bien d'autres attentats qui ne ciblaient pas les
chrétiens et il faut les condamner dans leur ensemble. Nous menons une action
déterminée en faveur des chrétiens et nous allons continuer à leur donner des
visas, mais, pour l'église chaldéenne elle-même, la solution n'est pas de
quitter le pays. Elle ne veut pas de visas, elle ne demande que quelques aides
d'urgence. Le reste est une question politique et nous agirons.
(Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes UMP et NC.)
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