FICHE QUESTION
13ème législature
Question N° : 26856  de  M.   Havard Michel ( Union pour un Mouvement Populaire - Rhône ) QE
Ministère interrogé :  Écologie, énergie, développement durable et aménagement du territoire
Ministère attributaire :  Écologie, énergie, développement durable et aménagement du territoire
Question publiée au JO le :  08/07/2008  page :  5798
Réponse publiée au JO le :  16/12/2008  page :  10933
Rubrique :  déchets, pollution et nuisances
Tête d'analyse :  air
Analyse :  méthane. lutte et prévention. politiques communautaires
Texte de la QUESTION : M. Michel Havard appelle l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire, sur les conséquences de la sous-estimation de l'impact du méthane sur le réchauffement climatique. Dans une publication scientifique récente, trois spécialistes français de l'énergie et du climat ont souligné en effet que la nécessaire lutte pour réduire nos émissions de CO2 nous conduit à négliger l'impact des autres gaz à effet de serre, et notamment du méthane. Ils démontrent, chiffres à l'appui, que la récupération de la majeure partie du méthane (CH4) dégagé par la décomposition des décharges d'ordures ménagères aurait plus d'impact sur la réduction du réchauffement climatique que la construction de trois réacteurs nucléaires de type EPR ou qu'elle aurait le même effet que l'isolation thermique de 400 000 logements anciens par an pendant vingt-cinq ans. Ces chercheurs s'appuient sur la résolution du conseil des ministres de l'environnement de l'Union européenne, en date du 30 octobre 2007. Ce texte préconise, en effet, de stabiliser la concentration des gaz à effet de serre dans l'atmosphère à environ 450 ppm d'équivalent CO2 en procédant par étape avant de revenir d'ici à 2050 à un niveau inférieur d'au moins 50 % à celui de 1990. Mais ces experts soulignent que dans ce document seuls les efforts de réduction du CO2 sont cités et les autres gaz à effet de serre autres que le CO2 (méthane, oxyde nitreux, etc.) ne font l'objet d'aucune mention spécifique. Il en va de même en France où, lors du Grenelle de l'environnement, toutes les mesures prononcées concernaient la réduction des émissions de CO2 sans qu'une seule fois, dans le document final, ne soit jamais mentionné le méthane. Cette omission résulte, selon ces chercheurs, de la conversion en «tonnes équivalent CO2» qui permet de comptabiliser plus facilement la contribution des différents gaz responsables de l'effet de serre. Mais l'usage généralisé de cette conversion tend à sous-estimer gravement le pouvoir spécifique particulièrement puissant du méthane en matière d'effet de serre. À cet égard, il convient de rappeler qu’à l'horizon 2050, date à laquelle l'Europe veut réduire de 50 % ses émissions de gaz à effet de serre par rapport à 1990, le pouvoir de réchauffement global du méthane n'est pas égal à 21 mais à 49. Et sur une durée de cinq ans, une tonne de méthane fait autant de dégâts que 101 tonnes de CO2. Il lui demande donc s'il ne lui semble pas souhaitable d’appliquer au méthane un coefficient d'équivalence pondéré en fonction des échéances fixées par la France et l'Europe en matière de réduction des gaz à effet de serre et s'il ne convient pas d'intégrer de manière spécifique le méthane dans les objectifs français et européen de réduction de gaz à effet de serre.
Texte de la REPONSE : Dans l'article de la revue La Recherche, daté de mars 2008 et intitulé « Effet de serre : n'oublions pas le méthane », il est indiqué que « la lutte contre le réchauffement climatique ne doit pas se limiter à la réduction des émissions de dioxyde de carbone », que « l'impact du méthane [...] est crucial » et qu'« il est important [...] que des politiques de réduction des émissions de méthane et des autres gaz à effet de serre soit définies sur la base de leurs émissions réelles [...] en fonction des objectifs de concentrations que le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) recommande d'atteindre à des horizons donnés ». Les arguments scientifiques développés dans cet article ne souffrent d'aucune contestation. Néanmoins, il convient de rappeler que le méthane est identifié comme l'un des six gaz à effet de serre dont les émissions doivent être réduites par les pays de l'annexe B au protocole de Kyoto et que les décisions du Conseil européen concernent l'ensemble de ces six gaz à effet de serre et non le seul CO2. Les efforts entrepris depuis une quinzaine d'années au niveau européen ont d'ailleurs permis de réduire les émissions de méthane de 29 % entre 1990 et 2005, alors que les émissions de dioxyde de carbone croissaient de 1 % sur la même période (CNUCCC, FCCC/SBI/2007/30). En France, les émissions de CH4 sont estimées à 2,7 Mt en 2006, elles diminuent régulièrement (- 18 % entre 1990 et 2006), suite à l'intensification de la production laitière, à l'arrêt de l'exploitation des mines de charbon et au captage du biogaz des décharges. L'agriculture est le principal secteur émetteur de CH4 (72 % des émissions françaises en 2006), notamment en raison de la fermentation entérique des bovins et de la décomposition des déjections d'élevage. Parmi les actions engagées, peut être citée l'adoption du plan climat 2004-2012, qui encourage un développement de la méthanisation ; son actualisation en 2006 prévoit plus spécifiquement la mise en oeuvre d'un programme de valorisation du biogaz agricole. En outre, le Grenelle de l'environnement, à travers les travaux de plusieurs comités opérationnels, a confirmé l'importance de favoriser la méthanisation par des soutiens et une réglementation adaptés. Le soutien apporté à la filière comprend des aides apportées par l'ADEME pour le financement d'opérations exemplaires, un tarif d'achat de l'électricité produite à partir des installations de biogaz qui a été révisé et augmenté par arrêté du 10 juillet 2006 et la possibilité de recourir au mécanisme des projets domestiques. Une maîtrise accrue des émissions de méthane pourrait dégager une marge de manoeuvre déterminante dans la réduction des émissions de gaz à effet de serre, d'autant plus que les actions de récupération du biogaz de décharge, de méthanisation d'ordures ménagères ou d'effluents d'élevage et industriels, de codigestion pourraient être également conduites dans de nombreux pays en développement. La lutte contre le changement climatique est une action internationale, pour laquelle les règles de réduction des émissions de gaz à effet de serre sont définies et partagées par toutes les parties. En particulier, le choix d'une période de cent ans pour l'évaluation du pouvoir de réchauffement global, pour les six gaz à effet de serre, a été décidé par la communauté internationale pour la première période d'engagement du protocole de Kyoto (2008-2012), en s'appuyant sur les recommandations du GIEC. La France s'emploiera, à l'échelle nationale et internationale, à encourager une meilleure prise en compte des effets du méthane à court terme, à développer une meilleure connaissance des sources d'émissions et à promouvoir le développement des connaissances techniques.
UMP 13 REP_PUB Rhône-Alpes O