DEBAT :
|
FONCTIONNEMENT DES INSTITUTIONS M.
le président. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec, pour le
groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. M. Jean-Yves Le
Bouillonnec. Monsieur le Premier ministre, ce n'est pas à vous de juger
de la compassion éprouvée par chaque Français à l'occasion de l'assassinat de la
petite Laëtitia. Vos paroles à notre égard sont injustes et insultantes !
(Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) Les propos récents du
Président de la République n'ont pas seulement porté atteinte à l'organisation
des institutions que garantit la Constitution ; ils ne tentaient pas seulement
de dissimuler maladroitement ses échecs. (Protestations sur les bancs du
groupe UMP.) Les propos du Président de la République constituent, aux yeux
de ceux qu'il vise mais aussi aux yeux de tous les Français attachés à notre
démocratie, une véritable déstabilisation de l'État. (Applaudissements sur
les bancs du groupe SRC ainsi que sur plusieurs bancs du groupe GDR. —
Protestations sur les bancs du groupe UMP.) Le président de la République
est pourtant le gardien de nos institutions républicaines et démocratiques
! Dans un État de droit, peut-on concevoir que le chef de l'État manque à ce
point d'estime envers ceux qui se voient confier le maintien de l'ordre public,
l'application de la loi et l'exécution des décisions de justice ? (Mêmes
mouvements.) Nous courons le risque d'une perte de confiance de nos
concitoyens envers les institutions, envers l'État, alors même qu'en cette
période de crise, nous avons tous besoin de cette confiance. Peut-on imaginer
que le Président de la République ne mesure pas cet enjeu, qui constitue
pourtant la première des responsabilités que le suffrage universel lui a
confiées ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) Notre pays
ne peut se construire par l'affrontement permanent, par les divisions, par
l'exaspération des contradictions d'intérêts inévitables dans tout corps social.
(Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Il en va de l'unité de la
nation, de la paix sociale et du pacte républicain ! (Applaudissements sur
les bancs du groupe SRC ainsi que plusieurs bancs du groupe
GDR.) Monsieur le Premier ministre, ne pensez-vous pas que ce dont notre
pays a besoin - pour lui-même, comme pour tous les autres qui le regardent
aujourd'hui avec plus de désespoir que d'envie (Protestations sur les bancs
du groupe UMP.) - c'est que le Président de la République soit par ses
actes, par ses paroles, par sa capacité à tendre la main, l'incarnation d'un
État de droit ? (Mmes et MM. les députés du groupe SRC se lèvent et
applaudissent longuement. — Vives protestations et huées sur les bancs du groupe
UMP.) M. le président. La parole est à M. Michel
Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés. M.
Michel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des
libertés. Je veux d'abord vous demander d'excuser M. le Premier ministre,
qui a dû quitter cet hémicycle pour se rendre à Annecy. (Exclamations sur les
bancs du groupe SRC.) M. Alain Néri. C'est nul
! M. Michel Mercier, garde des sceaux. Monsieur Le
Bouillonnec, comme vous l'avez dit, comme nous le pensons tous, le Président de
la République est le garant du fonctionnement régulier des pouvoirs
publics. Le Président de la République est dans son rôle lorsqu'il intervient
pour rappeler des principes, et notamment le principe de responsabilité qui doit
guider l'ensemble des fonctionnaires, y compris les magistrats. (Exclamations
sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Le Président de la République est
aussi dans son rôle lorsqu'il porte l'émotion du pays face à un meurtre affreux.
(Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Nous devons tous,
élus, responsables, fonctionnaires, magistrats, regarder loyalement ce qui s'est
passé et en tirer tous les enseignements. M. Frédéric
Cuvillier. Vous êtes en train de vous prendre les pieds dans le tapis
! M. Michel Mercier, garde des sceaux. Nous devrons
examiner les résultats des enquêtes que le ministre de l'intérieur et moi-même
avons diligentées : nous avons tous à y gagner, la République a tout à y
gagner. C'est ainsi que nous pourrons, ensemble, retrouver le chemin de la
sérénité (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) qui fait aujourd'hui
défaut. Je veux faire appel au devoir de responsabilité de chacun dans ses
fonctions. (Vives exclamations sur les bancs du groupe
SRC.) M. Bruno Le Roux. Adressez-vous au Président de la
République ! M. Michel Mercier, garde des sceaux. Le
travail des magistrats est difficile, pénible, je le sais bien. Je veux dire
simplement... (Exclamations sur les bancs du groupe SRC, applaudissements sur
les bancs du groupe UMP.) M. le président. Merci.
|