Texte de la QUESTION :
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M. Jacques Remiller appelle l'attention de Mme la ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative sur les mesures envisagées par le ministère en matière de réduction des risques pour les consommateurs de drogues. Par un communiqué en date du 23 juin 2008, sur la "Présentation des mesures innovantes en matière de réduction des risques pour les usagers de drogue", le ministère envisage notamment que des séances d'éducation aux risques liés à l'injection se tiennent dans certains centres d'accueil et d'accompagnement à la réduction des risques pour les usagers de drogue. À cette fin, est envisagé un "apprentissage par vidéo" et même des "simulations d'injections". Par ailleurs, le ministère de la santé souhaite évaluer l'efficacité des kits d'injection disponibles pour les consommateurs de drogue par voie veineuse... L'ensemble de ces mesures seront financées par l'État, c'est-à-dire par le contribuable. S'il est compréhensible de prendre des mesures destinées à limiter les risques de propagation du VIH et de l'hépatite C, il est aussi très important de ne pas banaliser la consommation de drogue, ou même de favoriser indirectement une consommation, ce qui pourrait s'apparenter à une incitation. C'est pourquoi "les séances d'éducation aux risques liés à l'injection" peuvent apparaître très pernicieuses car elles risquent d'être vécues par les toxicomanes comme de véritables encouragements à poursuivre leur dépendance. Braver l'interdit ne posera plus aucune difficulté pour eux, à partir du moment où l'État prend et finance de telles mesures. Il lui demande donc quelles sont les perspectives en la matière.
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Texte de la REPONSE :
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La lutte contre l'usage de drogues est une priorité majeure de santé publique à laquelle le Gouvernement s'attelle tout particulièrement, notamment au travers des mesures du plan gouvernemental de lutte contre les drogues et les toxicomanies. Cette politique a trois objectifs. Il s'agit, tout d'abord, de lutter contre l'expérimentation des drogues et, en cas d'échec, de prévenir son usage régulier, notamment par la prévention en milieu scolaire mais aussi par l'interdit. Pour les consommateurs, déjà entrés dans l'usage, il s'agit de les prendre en charge afin de leur permettre de renoncer à l'usage de drogues. C'est la mission des 270 centres spécialisés de soins pour toxicomanes (CSST), futurs centres de soins d'accompagnement et de prévention en addictologie (CSAPA), et des communautés thérapeutiques. C'est également un des objectifs du plan de prise en charge des addictions 2007-2011, au travers du développement et de la consolidation de l'offre hospitalière. En cas d'échec des mesures précédentes, il importe de réduire les conséquences graves liées à l'usage de la drogue tout en essayant d'amener les usagers vers le soin. En effet, face aux risques sanitaires et sociaux encourus par les usagers de drogue, les pouvoirs publics ne peuvent se contenter de promouvoir uniquement un discours de prise en charge et d'interdiction. La politique de réduction des risques (RdR) a démontré son efficacité et est d'ailleurs préconisée par l'Union européenne (plan d'action « drogue » 2005-2008, puis 2009-2012, inscrits dans la stratégie antidrogue de l'Union européenne pour la période 2005-2012). Dans notre pays, la RdR a notamment permis un effondrement des nouveaux cas d'infection à VIH/SIDA, une diminution des overdoses mortelles et du nombre d'interpellations pour usage d'héroïne. Ces succès ont conduit à conférer une base légale dans le cadre de la loi du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique. Les objectifs poursuivis et les modalités d'intervention sont désormais fixés dans le décret n° 2005-347 du 14 avril 2005 visant à renforcer la qualité des pratiques des intervenants en RdR. Ce décret exclut les actions pouvant être incitatives et mentionne « les gestes et procédures destinés à prévenir les complications de l'injection ». Il s'agit bien de l'objectif de l'éducation aux risques liés à l'injection. Par ailleurs, le plan gouvernemental, élaboré sous l'égide de la mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (MILDT) soutien les mesures de RdR contenues dans le « plan national de lutte contre les hépatites B et C (2009-2012) » qui comprend, en particulier, « l'éducation à la santé des usagers de drogues injecteurs ». En effet, cette politique doit aujourd'hui faire face au nouvel enjeu que représente la séroprévalence élevée au virus de l'hépatite C (VHC) parmi les usagers de drogues, soixante fois supérieure à celle de l'ensemble de la population. La transmission du VHC se fait essentiellement par le partage ou la réutilisation des seringues mais aussi du matériel de préparation à l'injection. Or, actuellement, cette population, plus hétérogène, est moins informée des dangers de l'injection que ses aînées. Au-delà du risque de contamination par le VHC, l'injection est une pratique particulièrement dangereuse avec d'autres conséquences potentiellement gravissimes (amputation, thromboses veineuses, septicémie, endocardites, décès...). C'est en réponse à ces préoccupations que la ministre de la santé et des sports a annoncé la mise en place d'une recherche spécifique destinée à améliorer les stratégies d'éducation aux risques liés à l'injection. Elle sera conduite sous la responsabilité de l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé (INPES), en lien avec l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM), à qui la ministre chargée de la santé a confié une expertise collective sur les stratégies de RdR pour usagers de drogue. Au-delà de son impact sanitaire, le développement de ces stratégies plus performantes devrait notamment permettre de réduire les coûts, pour la collectivité, liés à la morbidité induite par la pratique de l'injection.
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