Texte de la QUESTION :
|
Mme Valérie Boyer attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères et européennes sur la restitution d'archives d'Algérie. Si la France a remis l'essentiel des archives antérieures à 1830, et notamment celles concernant la période de domination turque, elle refuse de se dessaisir de celles couvrant la période 1830-1962, considérée comme "période de souveraineté", l'Algérie n'étant devenu État qu'en 1962. L'Algérie, quant à elle, a conservé toutes les archives communales, un grand nombre d'archives d'établissements (hôpitaux, notaires...) : 80 à 85 % de la globalité des archives sont demeurées en Algérie en 1962. Ainsi, les deux cinquièmes de l'état civil de la période française sont restés sur place et sont donc inaccessibles. On imagine les problèmes posés pour les particuliers originaires de ces communes : pas d'acte de naissance, de mariage, de décès, difficulté à faire reconnaître la nationalité française par filiation. En 2003, un accord entre les deux gouvernements avait prévu la réalisation d'une importante opération de numérisation sur place, dans les communes, des registres d'état civil, par du personnel détaché par l'État français. Moyens financiers dégagés, personnel mobilisé et pourtant, l'opération n'a jamais été initiée. Notre ambassadeur de France à Tlemcen en mars 2008, a réaffirmé la réalisation des engagements pris par la France, indiquant que le Gouvernement français se préoccupe de récupérer des documents conservés par des particuliers (Français d'Algérie) qu'il remettra à son homologue algérien, et a indiqué que la France s'abstiendrait de tout rappel des revendications françaises en ce domaine. Cette déclaration de l'ambassadeur soulève deux questions. En premier, une bonne négociation, fût-elle diplomatique, comporte toujours un bénéfice réciproque. En l'occurrence, il est fait état de dons par la France (dont les archives de l'INA offertes à la télévision algérienne en décembre 2007) et d'engagements pour l'avenir. Quelles sont les contreparties attendues par notre pays en matière d'archives (mise en oeuvre de l'accord de 2003, numérisation de l'état civil, accès aux registres notariaux...) ? Pourquoi ne les a-t-on pas rappelées ? En second, les documents détenus par les particuliers relatifs à l'histoire de l'Algérie sont un élément de leur patrimoine privé. Elle souhaite savoir quelle est la nature des documents visés par l'ambassadeur, comment le Gouvernement entend les récupérer, et comment il peut s'engager à les remettre à l'Algérie sans mandat express des détenteurs.
|
Texte de la REPONSE :
|
L'honorable parlementaire a appelé l'attention du ministre des affaires étrangères et européennes sur la question de la restitution des archives d'Algérie. Après l'indépendance de l'Algérie, une grande partie des registres d'état civil établis par l'administration française pendant la période de souveraineté française (registres d'état civil « européen » et registre de l'état civil de « droit local ») est en effet restée en Algérie. La France et l'Algérie ont toutefois veillé à conserver à nos concitoyens concernés l'accès à leur état civil. Les autorités françaises et algériennes sont ainsi parvenues à un accord permettant à la France de procéder à une copie microfilmée des registres de l'état civil « européen ». À l'heure actuelle, 3,5 millions d'actes ont fait l'objet de ce micro-filmage sur un total de 5 millions d'actes. La loi du 25 juillet 1968 permet, en outre, au service central d'état civil du ministère des affaires étrangères et européennes de reconstituer, à la demande des intéressés, les actes manquants. Cette disposition législative constitue une réponse efficace aux requêtes les plus pressantes de nos concitoyens s'agissant des registres qui n'ont pu être dupliqués à ce stade. La copie de ces registres n'en reste pas moins un objectif des autorités françaises. La reprise de la duplication, numérique cette fois, de ces registres a été décidée lors de la visite d'État du président Chirac en Algérie, en mars 2003. Le ministère des affaires étrangères et européennes a aujourd'hui dégagé le financement permettant la numérisation de ces archives. L'identification des registres à dupliquer est en cours. Deux experts de la direction des archives se sont rendus à cet effet à Alger dans le courant du mois de décembre 2008. À l'inverse, la France souhaite également faciliter l'accès des Algériens àleur propre histoire. La France a ainsi remis à l'Algérie les archives publiques de la période ottomane concernant l'Algérie. L'Institut national de l'audiovisuel (INA) et la télévision publique algérienne (EPTV) ont également convenu de la mise à disposition d'une copie des images conservées par l'INA retraçant l'histoire de l'Algérie entre 1940 et 1962. Toutefois, les propos tenus par l'ambassadeur de France en Algérie en mars 2008 à Tlemcen, s'agissant des archives communiquées à l'Algérie, étaient clairs : les archives en possession de particuliers ne peuvent faire l'objet d'une restitution. Il s'agit en effet de documents appartenant en propre aux familles concernées. Enfin, s'agissant des documents constituant les archives de souveraineté, des dispositions permettent aux chercheurs et historiens algériens de bénéficier des mêmes possibilités d'accès à ces documents que les chercheurs français. La loi du 15 juillet 2008 relative aux archives, en réduisant les délais spéciaux de communicabilité, a ainsi ouvert l'accès aux archives du Gouvernement français antérieures à 1958 et pouvant donc concerner la période de la guerre d'Algérie. Les efforts se poursuivent donc pour faciliter, de part et d'autre, l'accès à ces documents qui constituent un pan de l'histoire des peuples français et algérien. Un groupe technique se réunit régulièrement à cet effet. La directrice française des archives pourrait ainsi se rendre rapidement à Alger pour évoquer ces différentes questions.
|