Texte de la QUESTION :
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M. Patrick Braouezec alerte Mme la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales sur les agissements du navire français Arago P675. Le navire Arago P675, circulant dans le canal de Sicile, au large de Malte, de l'Italie et de la Lybie, est engagé dans le cadre de la mission de surveillance Nautilus III coordonnée par l'agence Frontex. Dans la soirée du 24 septembre, alors qu'un vieux bateau de pêche aurait heurté ce navire, à la suite d'une erreur de manoeuvre, des militaires français ont tiré des coups de feu en l'air, au prétexte de maintenir le calme. Les migrants au nombre de 65 dont 13 femmes ont ensuite été embarqués sur l'Arago P675 et ont été maintenus durant tout le trajet jusqu'au port de Lampedusa sous la menace des mitraillettes pointées sur eux. Au moment même, où le directeur de l'agence de contrôle des frontières européennes a admis la faillite des surveillances exercées dans le canal de Sicile « qui ne rendent pas les résultats désirés », le fait d'arraisonner un bateau et de conduire les migrants sous la menace des baïonnettes n'est pas sans soulever la question des contrôles effectués sans aucun respect des droits humains. En conséquence, il aimerait savoir ce que le Gouvernement compte faire pour que les navires français engagés dans ce processus respectent impérativement les droits humains et pour que soit mise sur pied une collaboration structurée avec le Haut commissariat des Nations-unies pour les réfugiés, de façon à sauvegarder les réfugiés qui traversent les frontières européennes.
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Texte de la REPONSE :
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Dans le cadre de sa participation à l'opération Nautilus 08, conduite sous l'égide de l'Agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures des États membres de l'Union européenne (dite agence Frontex), le patrouilleur Arago a participé à deux opérations de sauvetage les 23 et 24 septembre 2008, au cours desquelles il a recueilli à son bord au total 277 migrants. Répartis dans deux embarcations de fortune, ces hommes et ces femmes se trouvaient dans une situation telle que leur vie était menacée à très court terme. En application des conventions internationales sur la sauvegarde de la vie humaine en mer, l'Arago s'est porté à leur secours, avant de les remettre aux autorités italiennes, conformément aux directives reçues des centres de coordination de secours (MRCC) de Rome et de Malte. La première opération de sauvetage, conduite dans la soirée du 23 septembre 2008 s'est déroulée sans difficulté, ce qui a permis la prise en charge des 65 passagers de l'embarcation dans les meilleures conditions possibles. Les personnes dont l'état le nécessitait ont été examinées et soignées par l'infirmière du bord. Ces 65 personnes ont ensuite été débarquées sur l'île de Lampedusa (Italie). La seconde opération a été menée par l'Arago le 24 septembre 2008 sur alerte des MRCC de Rome et de Malte. À son arrivée sur les lieux, l'Arago a mis à l'eau un bateau léger avec à son bord une équipe de reconnaissance, afin d'évaluer la situation de l'embarcation de fortune, laquelle n'a fait l'objet d'aucune collision. Les premiers éléments constatés ont mis en évidence l'énorme surcharge de cette embarcation, qui avait à son bord 212 personnes, l'absence totale d'équipements de sécurité, la présence de personnes vidant des seaux d'eau de mer, une atmosphère très tendue à bord entre passagers, mais aussi une attitude agressive à l'égard de l'équipe de reconnaissance de l'Arago. Cette embarcation se trouvant à la dérive, le commandant de l'Arago a pris la décision, en accord avec les MRCC, de porter secours aux personnes présentes, tout en sollicitant l'appui des navires italiens susceptibles de patrouiller dans la zone. Soucieux de soustraire les 212 passagers à un risque immédiat de naufrage et de ne pas prolonger une attente potentiellement génératrice de réactions désespérées, le commandant a décidé de procéder à l'embarquement des personnes en péril à bord de l'Arago. Dans ce contexte d'extrême tension et d'urgence, les membres d'équipage de l'Arago encadrant les passagers ont dû adopter une attitude ferme en vue de prévenir tout risque de débordement, notamment en rendant visibles leurs armes afin d'obtenir un effet dissuasif et de permettre que l'opération délicate de l'embarquement s'effectue dans le calme. Néanmoins, à aucun moment ces armes n'ont été pointées vers les naufragés. Des tirs en l'air, effectués au moyen de munitions non létales, ont eu pour seul but d'établir le silence et de capter l'attention des personnes secourues pour organiser au mieux la manoeuvre d'embarquement. Des vivres ont ensuite été distribués aux naufragés au cours du transit vers Lampedusa. Les circonstances de cette opération, compte tenu des moyens disponibles (un équipage de 39 marins), du nombre conséquent de personnes en danger de mort à secourir et de l'attitude désordonnée des naufragés, imposaient les mesures décrites, meilleur compromis possible entre le respect des droits de la personne, le devoir de sauvegarde de la vie humaine et la protection du bâtiment et de son équipage. À cet égard, la comparaison entre ces deux opérations de secours est éloquente si l'on considère que la première s'est déroulée sans difficulté particulière, alors que la seconde a nécessité les mesures décrites, à raison même du contexte particulièrement difficile dans lequel elle s'est déroulée. En tout état de cause, le personnel de la marine nationale, préparé à ce type de mission, est régulièrement sensibilisé par le commandement à l'exigence de respect de la dignité humaine. Enfin, l'agence Frontex a signé le 17 juin 2008 un accord de coopération avec le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (UNHCR) prévoyant des consultations régulières, des échanges d'information, d'expertise et d'expérience, et des participations à des formations sur la législation internationale relative aux droits de l'homme et aux réfugiés. Un officier de liaison de l'UNHCR a été nommé en 2007 pour travailler au siège de l'agence Frontex dans le but de s'assurer que la gestion des frontières européennes se fait en plein accord avec les obligations internationales des États membres et les principes fondamentaux des droits humains. Il en va tout particulièrement du respect des droits des migrants et plus généralement des personnes.
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