Texte de la QUESTION :
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Mme Marie-Jo Zimmermann attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur le fait que les actions en responsabilité contre les commissaires aux comptes se prescrivent par trois ans à compter du fait dommageable ou s'il a été dissimulé de sa révélation (articles L. 822-18 et L. 225-254 du code du commerce). L'exception de « dissimulation » a été instituée afin de permettre à toute société n'ayant pas connaissance des irrégularités des certifications de rechercher et d'engager la responsabilité du commissaire aux comptes dans un délai de trois ans à compter du jour où elle en a effectivement eu connaissance. Toutefois, les textes en vigueur ne donnant aucune définition de la notion de dissimulation, la Cour de cassation a été amenée à définir cette notion comme « devant nécessairement émaner du commissaire aux comptes lui-même et impliquer la volonté de ce dernier de cacher les faits dont il aurait pu avoir connaissance par la certification des comptes », à charge pour la victime de le démontrer. Au risque de rendre l'exception de dissimulation instituée par les articles L. 822-18 et L. 225-254 du code de commerce totalement inopérante, l'interprétation donnée par la Cour de cassation à la notion de dissimulation ajoute, d'une part, une condition au texte et, d'autre part, consacre par voie de conséquence une quasi-immunité des commissaires aux comptes. En effet, ceux-ci ont aujourd'hui intérêt, en cas de faute commise dans l'exercice de leur mandat, à garder le silence car, alors, il appartient à la victime de démontrer que le commissaire aux comptes a entendu cacher intentionnellement les faits dont il aurait pu avoir connaissance. Or une telle preuve est matériellement impossible à rapporter et il est donc aujourd'hui impossible de reporter le point de départ de la prescription au jour où la société a effectivement eu connaissance des irrégularités entachant les certifications du commissaire aux comptes. Elle lui demande donc si le point de départ de la prescription ne devrait pas être simplement entendu comme « commençant à courir, au plus tôt, à compter du jour où l'inexactitude des certifications, des bilans et/ou des comptes d'exploitation a été découverte ». En effet, seule cette découverte permet de constater qu'il y a eu une négligence du commissaire aux comptes qui, par une certification sans réserve, a laissé croire que les comptes étaient réguliers et sincères alors qu'ils ne l'étaient pas.
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Texte de la REPONSE :
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La garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire qu'il résulte de la combinaison des articles L. 822-18 et L. 225-254 du code de commerce que l'action en responsabilité civile contre le commissaire aux comptes se prescrit par trois ans à compter du fait dommageable ou, s'il a été dissimulé, de sa révélation. Si les articles précités ne définissent pas la notion de dissimulation, la Cour de cassation a eu l'occasion de préciser que celle-ci implique un élément intentionnel, caractérisé par la volonté du commissaire aux comptes de cacher les faits dont il a eu connaissance. Cette interprétation apparaît conforme à la volonté du législateur, l'emploi du terme « dissimulation » traduisant le souci de sanctionner le professionnel de mauvaise foi en ne permettant de différer le point de départ de la prescription qu'en cas de volonté avérée de cacher le fait dommageable - la simple négligence étant insuffisante à justifier un régime de prescription dérogatoire. Pareille approche procède de la recherche d'un équilibre entre, d'une part, l'intérêt légitime des actionnaires et des tiers et, d'autre part, le besoin de sécurité juridique des professionnels dans la conduite de leurs missions. C'est pourquoi il n'est pas envisagé en l'état de modifier ce régime de prescription, qui est commun aux commissaires aux comptes et aux dirigeants de sociétés.
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