Texte de la QUESTION :
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M. René Rouquet attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères et européennes sur la situation de la minorité arménienne de Géorgie, qui continue de vivre un profond sentiment de mécontentement et de frustration malgré les traités internationaux signés sur les droits de l'Homme par la Géorgie, ses obligations de protection des minorités nationales, les recommandations et les appels des organisations internationales. À l'heure où la Géorgie se remet difficilement des conséquences du conflit armé avec la Russie et doit travailler à la restauration d'un État de droit démocratique et multiethnique, le traitement réservé par les autorités géorgiennes à leurs citoyens d'origine arménienne continue en effet d'inquiéter de nombreux observateurs. C'est notamment le cas de l'église apostolique arménienne de Géorgie, dont les autorités géorgiennes ignorent les demandes de restitution des églises arméniennes. En particulier, l'église de Norachen, qui a été nationalisée sous l'ère soviétique et dont le statut de propriété n'a pas été fixé depuis l'indépendance de la Géorgie en 1991. Les autorités géorgiennes ont aussi tacitement encouragé et parfois même activement soutenu des actions hostiles du clergé orthodoxe géorgien, qui s'est engagé depuis quelques années dans un processus d'auto-appropriation des églises des minorités religieuses. Dans le but d'encourager et d'accélérer ce mouvement, les autorités géorgiennes ont récemment fourni des permis de construire au clergé géorgien. Ces autorisations, leur permettent de bâtir un mur ceinturant l'église de Norachen, compliquant ainsi considérablement son accès. En plus de cette politique à l'égard de la minorité religieuse arménienne de Géorgie, les autorités géorgiennes continuent de mener des actions contraires aux normes démocratiques et aux droits de l'homme avec en particulier, depuis le mois de juillet 2008, une campagne d'arrestations menée contre des militants des droits civiques et leurs familles dans la région de Samtskhe-Djavakheti, peuplée majoritairement d'Arméniens. Enfin, d'autres problèmes relatifs aux droits des minorités n'ont toujours pas été résolus pour les Arméniens de Géorgie, particulièrement ceux de la région du Djavakhk où ils sont pourtant majoritaires, mais qui continuent de subir une politique discriminatoire du pouvoir de Géorgie. Aussi, il lui demande de bien vouloir lui préciser ce que le Gouvernement français entend mettre en oeuvre pour intervenir auprès des autorités concernées afin de favoriser l'apparition de solutions pour les Arméniens de Géorgie en application des traités internationaux sur les droits de l'homme et des minorités et, en particulier, pour garantir la sécurité de la population arménienne de Samtskhe-Djavakheti, assurer la liberté de culte en Géorgie, restituer les édifices religieux confisqués à leurs propriétaires légitimes et, ainsi, éviter l'aggravation d'une situation qui pourrait déboucher sur un nouveau conflit.
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Texte de la REPONSE :
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Pays historiquement pluriethnique, la Géorgie abrite sur son territoire 4,3 millions d'habitants, parmi eux 3,6 millions de Géorgiens ethniques et une population arménienne estimée officiellement à 249 000 personnes, (mais évaluée à 300 000-350 000 habitants par les associations arméniennes, qui arguent que beaucoup d'Arméniens auraient opté pour la citoyenneté géorgienne par commodité). Après des années de graves tensions entre les communautés dans la période troublée ayant suivi l'indépendance, le gouvernement géorgien issu de la « Révolution des roses » s'est efforcé de mettre en place une politique d'intégration des minorités nationales. En octobre 2005, le Parlement géorgien a ratifié la convention-cadre pour la protection des minorités nationales du Conseil de l'Europe. En 2004, des réformes avaient été entreprises pour désenclaver la région de Samtskhe-Djakavhétie, où vivent en majorité (hors Tbilissi) les Arméniens de Géorgie, et améliorer les infrastructures et l'environnement des affaires dans cette région. Dans le domaine des médias, les chaînes de télévision nationales proposent, depuis 2005, des programmes d'information en langue arménienne. Ces initiatives visant à renforcer l'intégration civile des populations non géorgiennes doivent être poursuivies et encouragées. Elles contribuent en effet directement à améliorer les relations des associations arméniennes avec les pouvoirs locaux, qui restent encore émaillées d'incidents sporadiques. Si la Géorgie est un État laïc, le poids de l'Église orthodoxe y est prépondérant. L'Église orthodoxe de Géorgie a pu chercher à user de sa position dominante pour faire pression sur les autorités politiques afin d'obtenir un statut privilégié et limiter le développement des autres religions. Dans ce contexte, les relations entre les Églises demeurent conflictuelles. Elles achoppent, en particulier, sur la question du statut légal des Églises apostoliques arménienne et catholique ainsi que sur la restitution des édifices religieux à leurs propriétaires originels, avant les confiscations de la période soviétique. Enfin, la situation de l'Église arménienne Norachen, dont la transformation en Église géorgienne a été envisagée par le patriarcat de Tbilissi, envenime les relations entre la communauté arménienne et l'Église orthodoxe géorgienne. La France, par l'intermédiaire de son ambassade à Tbilissi, accorde une attention soutenue au respect par la Géorgie de ses engagements démocratiques, notamment en matière de protection du droit des minorités. Au-delà de la question des « Églises disputées » (notamment de l'Église de Norachen qui sème la discorde entre Églises arménienne et géorgienne), le respect de la liberté religieuse fait l'objet d'un suivi très attentif et d'un dialogue constant avec les autorités géorgiennes. Alors que notre pays assurait la présidence du Conseil de l'Union européenne, un dialogue sur les droits de l'homme avec la Géorgie a été initié en juillet 2008, ce qui a permis d'aborder la question de la liberté religieuse. Notre ambassadeur en Géorgie, M. Éric Fournier, accompagné de représentants de la Commission européenne, des Nations unies et du Conseil de l'Europe, s'est, par ailleurs, récemment entretenu de ce dossier avec le ministre de la justice et avec le patriarche Ilia II. À la lumière du conflit de l'été 2008, la France, forte du rôle de médiateur qu'elle a alors assuré, s'attache à relayer auprès de tous ses interlocuteurs géorgiens des messages d'ouverture et de conciliation, notamment sur le dossier de la restitution d'Églises à la minorité arménienne, de manière à désamorcer les vecteurs potentiels de tension entre les communautés en Géorgie.
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