Texte de la REPONSE :
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Lansana Conté est décédé, le 22 décembre 2008, après 24 années à la tête de la Guinée. Dès le lendemain, le capitaineMoussa Dadis Camara a annoncé la suspension des institutions et de la constitution et la création du conseil national pour la démocratie et le développement (CNDD). Le capitaine Dadis Camara s'est autoproclamé Président de la République. La communauté internationale, dont l'UE, l'UA, la CEDEAO et l'OIF ont condamné le coup d'État. Le secrétaire d'État chargé de la Coopération et de la Francophonie s'est rendu à Conakry, les 3 et 4 janvier 2009 rappeler nos exigences à la junte et au Premier ministre, mais aussi pour rencontrer les principaux partis politiques, la société civile et la commission électorale indépendante (CENT). Le chef de la junte, le capitaine Moussa Dadis Camara, a pris l'engagement d'organiser des élections dans les plus brefs délais et a assuré qu'il ne s'y présenterait pas. Il a aussi pris l'engagement de confier la transition à un gouvernement civil, dirigé par un Premier ministre, M. Kabiné Komara. À l'occasion de cette visite, étant donné les engagements pris par le CNDD, M. Joyandet, secrétaire d'État à la coopération et à la francophonie, a fait savoir que la France ne suspendait pas sa coopération civile et militaire et qu'elle apporterait son soutien à l'organisation des élections pour que la Guinée se dote dans les meilleurs délais d'institutions démocratiques. Il a été précisé que la France resterait vigilante sur la mise en oeuvre de la transition et la préparation des élections. Le 14 janvier dernier, un gouvernement a été nommé. Les militaires en occupent les portefeuilles clés (finances, justice). La France a noté avec inquiétude et préoccupation la composition de ce gouvernement, nommé par la junte, qui n'est pas conforme aux engagements pris par le CNDD. En effet, non seulement les militaires sont nombreux au gouvernement mais ils détiennent les postes clés, dont certains sont rattachés directement au capitaine Moussa Dadis Camara. Plus récemment, le CNDD a pris des dispositions pour que certains ministères et services publics soient directement rattachés à la Présidence de la République. Enfin, Moussa Dadis Camara a suspendu le capitaine Mamadou Sandé de ses fonctions de ministre de l'économie et des finances. Dans ces conditions, on peut légitimement s'interroger sur ce qui reste du gouvernement encore placé sous l'autorité effective du Premier ministre Kabiné Komara. Depuis le début du mois de janvier 2009, on observe des arrestations arbitraires et des convocations par le CND au camp Alpha Yaya au motif de l'intensification de la lutte contre la corruption, les détournements de fonds publics et l'évasion fiscale. Le nouveau pouvoir guinéen arrête indistinctement des corrompus notoires, des individus non corrompus et des membres de la communauté expatriée des affaires. Tous sont sommés, en dehors de toute procédure judiciaire, de s'expliquer sur leur gestion des deniers publics. La France a bien sûr exprimé sa préoccupation face à la multiplication des arrestations arbitraires et appelé les autorités guinéennes à respecter le cadre légal et les droits individuels, y compris dans leur lutte contre la corruption et l'évasion fiscale, qui constituent naturellement un objectif légitime et un élément nécessaire au redressement de ce pays. Suite à l'échec de la marche de soutien au CNDD, qui a eu lieu le 30 janvier 2009 la capacité de mobilisation du CNDD semble s'être affaiblie, d'autant que celui-ci ne bénéficie plus autant du soutien de la société civile, des syndicats et des partis politiques qui lui avaient fait un accueil prudent mais positif lorsqu'il avait pris le pouvoir. En effet, les principaux acteurs de la société civile guinéenne, membres du conseil national des organisations de la société civile de Guinée (CNOSCG) et de l'intercentrale des syndicats, ont adopté le 3 février 2009 une « déclaration des forces sociales guinéennes » dont les sept points convergents avec les attentes de la communauté internationale. Le 8 février 2009 les partis politiques ont rejoint la société civile. Tous demandent que la transition ne dépasse pas un an, que soit levée immédiatement l'interdiction des activités des syndicats et des partis politiques, que soit mis en place un conseil national de la transition « dans les meilleurs délais, avec toutes les composantes de la nation », et que le calendrier électoral soit publié. Une rencontre avec le chef de la junte a eu lieu le 9 février 2009. À cette occasion, Moussa Dadis Camara a refusé, en présence du Premier ministre, des membres du gouvernement et des chefs religieux, de lever l'interdiction de toute activité politique et syndicale aux motifs que le pays est « sous un régime d'exception » et que l'interdiction de ces activités a pour objet d'éviter « l'anarchie et le désordre ». L'annonce par le CNDD de son refus de lever l'interdiction des activités politiques et syndicales constitue un signal négatif à l'égard de la société guinéenne et de la Communauté internationale. La France a donc déploré ce manquement grave aux principes démocratiques. Elle a aussi appelé au rétablissement des libertés politiques et syndicales qui est un préalable indispensable à l'organisation d'élections, libres, transparentes et crédibles que les autorités au pouvoir en Guinée se sont engagées à organiser au quatrième trimestre 2009. Au cours du dernier sommet de l'Union africaine à Addis Abeba, a été créé le groupe international de contact sur la Guinée dont l'objectif est de suivre la situation, de coordonner et d'harmoniser les efforts de ses membres pour rétablir l'ordre constitutionnel. Ce groupe de contact se réunira une fois tous les deux mois et tiendra sa première réunion à Conakry les 16 et 17 février 2009. La France y sera présente en tant que membre permanent du conseil de sécurité des Nations unies. La CENT s'est réunie à plusieurs reprises au cours du mois de janvier 2009 et estime que les préparatifs électoraux seront achevés août 2009. Elle a formulé trois hypothèses de scrutin pour des élections législatives et présidentielles au dernier trimestre 2009, qui ont été soumises au président du CNDD, le 4 février 2009. Le 7 février, le CNDD a demandé au ministre de l'administration du territoire et des affaires politiques et au Président de la CENI de respecter les engagements pris devant le peuple de Guinée et la communauté internationale d'organiser des élections libres, transparentes et crédibles pendant le dernier trimestre 2009, et non à la fin décembre 2010 comme le CNDD l'avait initialement annoncé au lendemain du coup d'État. La junte demande également à l'administration « de poursuivre le recensement des électeurs en vue de l'établissement d'un fichier électoral fiable dans les plus brefs délais ». La France considère que l'annonce par le CNDD de sa volonté d'organiser des élections, libres, transparentes et crédibles au quatrième trimestre 2009 constitue un signe encourageant. Toutefois, afin d'être en mesure de pouvoir tenir ce délai, la junte doit immédiatement faire en sorte que soient repris le recensement, précisé le chronogramme des élections, adopté le budget des élections et rétablies les libertés syndicales et politiques. L'objectif de la préparation des élections doit être la priorité des autorités au pouvoir.
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