FICHE QUESTION
13ème législature
Question N° : 41861  de  M.   Roy Patrick ( Socialiste, radical, citoyen et divers gauche - Nord ) QE
Ministère interrogé :  Justice
Ministère attributaire :  Justice
Question publiée au JO le :  10/02/2009  page :  1247
Réponse publiée au JO le :  26/05/2009  page :  5150
Rubrique :  traités et conventions
Tête d'analyse :  traité instituant une cour pénale internationale
Analyse :  attitude de la France
Texte de la QUESTION : M. Patrick Roy attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur la mise en conformité du droit pénal français avec le statut de la Cour pénale internationale (CPI). Plus de sept ans après la ratification du statut de Rome par la France le 9 juin 2000, aucun projet de loi n'est encore venu en séance pour venir rattraper ce retard en matière de répression des crimes internationaux. Il est urgent que la loi française définisse les crimes de génocide, crimes contre l'humanité et crimes de guerre conformément au statut de la Cour et qu'elle reconnaisse l'imprescriptibilité de ces crimes et l'applicabilité de toute immunité tenant à la qualité officielle des auteurs de ces crimes. Pour pouvoir juger les crimes énumérés dans le statut de la Cour, les juges français ont besoin de s'appuyer sur une loi interne. Il lui rappelle également que le projet de loi n° 3271 portant adaptation du droit pénal à l'institution de la Cour pénale internationale ne contient aucune disposition relative aux crimes de guerre et que ce projet de loi ne reconnaît pas aux tribunaux français de compétence territoriale élargie pour les crimes visés par le statut de la CPI. Il lui rappelle enfin que les États se sont engagés à rendre leur justice complémentaire de celle de la CPI, dont l'oeuvre serait vouée à l'échec si elle devait juger seule tous les dossiers. Ainsi, il lui demande si elle entend déposer au plus vite un projet de loi conforme aux principes généraux du droit pénal international, afin que la France ne devienne pas un îlot d'impunité pour les plus grands criminels.
Texte de la REPONSE : La garde des sceaux, ministre de la justice, a l'honneur d'indiquer à l'honorable parlementaire que le projet de loi portant adaptation de la législation pénale française au statut de la Cour pénale internationale a été adopté en première lecture par le Sénat. Après l'adoption de la loi n° 2002-268 du 26 février 2002 relative à la coopération avec la Cour pénale internationale, ce projet de loi a pour objet l'adaptation de notre législation interne à la convention portant statut de la Cour pénale internationale, signée à Rome le 18 juillet 1998, en créant des incriminations spécifiques en droit français pour les crimes et délits de guerre. Les juridictions françaises peuvent, dès à présent, poursuivre les responsables de tels crimes, sur le fondement des incriminations de droit commun. Les crimes contre l'humanité ainsi que les crimes et délits de guerre ne bénéficient donc d'aucune impunité en droit français et les victimes de ces crimes et délits peuvent porter plainte et obtenir des réparations. Cependant, quoique la convention de Rome portant statut de ladite Cour n'oblige pas les États qui y sont parties à prévoir dans leur droit interne de telles infractions, le projet de loi comporte les incriminations nécessaires permettant au droit pénal français de couvrir, de la manière la plus complète possible, les comportements prohibés par ce traité. Les immunités tenant à la qualité officielle des auteurs des crimes contre l'humanité ou des crimes de guerre, résultent, lorsqu'elles existent, de conventions qu'une loi ne peut déclarer inapplicables, en application de l'article 55 de la Constitution. L'établissement en droit français de la règle de l'imprescriptibilité des crimes de guerre n'a pas été retenu. Une telle règle doit rester la marque des faits les plus intolérables à l'égard desquels notre société refuse que le temps écoulé fasse obstacle aux poursuites. Le projet de loi instaure un délai étendu de prescription propre aux crimes de guerre en portant celle-ci de dix à trente ans pour tenir compte de leur gravité sans toutefois banaliser l'imprescriptibilité. C'est pourquoi dans notre droit, seuls les crimes contre l'humanité sont imprescriptibles. En ce qui concerne la mise en oeuvre d'un mécanisme de compétence universelle, le fondement juridique d'une telle compétence n'apparaît pas établi lorsqu'elle n'est pas expressément prévue par ladite convention internationale. Or, tel n'est pas le cas de la convention de Rome portant statut de la Cour pénale internationale, qui confère à cette dernière seule une vocation universelle et les moyens juridiques pour l'exercer. Par ailleurs, lorsqu'une convention internationale prévoit explicitement une telle compétence, l'applicabilité à des ressortissants d'États non parties à cette convention est une question controversée, ce qui limite la portée de telles clauses de compétence universelle. Dès lors, outre les problèmes pratiques liés à l'exercice d'une telle compétence, des difficultés juridiques font obstacle à son établissement. Enfin, la France ne risque pas de devenir « une terre d'impunité » puisqu'elle a adopté la loi n° 2002-268 du 26 février 2002 relative à la coopération avec la Cour pénale internationale, créant notamment les articles 627-4 à 627-15 du code de procédure pénale qui permettent l'arrestation et la remise à la Cour pénale internationale des auteurs de crimes ou délits de guerre qu'elle ne peut juger en raison de la territorialité des faits et de la nationalité de l'auteur et de la victime.
S.R.C. 13 REP_PUB Nord-Pas-de-Calais O