FICHE QUESTION
13ème législature
Question N° : 44650  de  M.   Urvoas Jean-Jacques ( Socialiste, radical, citoyen et divers gauche - Finistère ) QE
Ministère interrogé :  Justice
Ministère attributaire :  Justice
Question publiée au JO le :  17/03/2009  page :  2489
Réponse publiée au JO le :  30/06/2009  page :  6659
Rubrique :  système pénitentiaire
Tête d'analyse :  établissements
Analyse :  conditions de détention
Texte de la QUESTION : M. Jean-Jacques Urvoas attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur les conditions carcérales en France. Alors que s'ouvre le débat parlementaire sur le projet de loi pénitentiaire, il serait opportun que l'administration pénitentiaire diffuse l'ensemble des données en sa possession. Dispose-t-elle, par exemple, de statistiques permettant de mesurer l'impact sur l'augmentation de la mortalité des conditions matérielles et psychologiques dans lesquelles s'effectuent les peines privatives de liberté ? Dispose-t-elle de données épidémiologiques précises sur les pathologies observées en milieu carcéral, qui permettraient de préciser les situations pathologiques pouvant impliquer une suspension de peine ? Pourquoi, d'autre part, les statistiques produites par la direction de l'administration pénitentiaire (DAP) ne sont-elles pas systématiquement publiées ? Il lui demande en particulier de rendre publique celles concernant le nombre de personnes détenues qui, au premier jour de chaque mois, dorment sur un matelas installé à même le sol, et ce, établissement par établissement. Il s'agit en effet là d'un indicateur intéressant pour appréhender la réalité de la surpopulation dans les prisons françaises, et sa diffusion donnerait notamment à la représentation nationale les éléments de connaissance indispensables à la mise en oeuvre d'une politique véritablement adaptée aux enjeux majeurs en la matière.
Texte de la REPONSE : La garde des sceaux, ministre de la justice, informe l'honorable parlementaire que les conditions de détention des personnes détenues est une de ses constantes préoccupations. Il convient en premier lieu de souligner que le projet de loi pénitentiaire a été élaboré dans la plus grande transparence. Ainsi, d'une part, les travaux du comité d'orientation restreint (le COR), institué par la garde des sceaux pour définir les grandes orientations du projet de loi, ont-ils associé des représentants de la société civile aux côtés des représentants des professions judiciaires et de représentants des organisations syndicales. D'autre part, l'étude d'impact du projet de loi réalisée par le ministère de la justice en concertation avec les services du Premier ministre a permis, après avoir posé un diagnostic de la situation actuelle de l'administration pénitentiaire qui a notamment été l'occasion de fournir des données chiffrées dans de nombreux domaines, d'envisager l'ensemble des impacts du projet de loi non seulement aux plans juridique, budgétaire ou social, mais encore en matière de prévention de la récidive et de prévention des suicides. Il y a également lieu de rappeler, s'agissant de la volonté de transparence de l'administration pénitentiaire, que les parlementaires français peuvent se rendre, quand ils le souhaitent, dans les établissements pénitentiaires et que le projet de loi prévoit que cette possibilité soit étendue aux parlementaires européens. A également été adopté le projet de loi instituant le contrôleur général des lieux de privation de liberté. En ce qui concerne la publicité des données statistiques, chaque mois la « statistique mensuelle de la population écrouée et détenue en France » est accessible à tous, sur le site internet du ministère de la justice, à la rubrique « chiffres clefs » de l'item « prison et réinsertion ». Cette publication permet d'appréhender les évolutions de la population en détention telles que la répartition entre les prévenus et les condamnés, la part des femmes, le nombre des mineurs et l'évolution des aménagements de peine sous écrou. Permettant une analyse plus fine des caractéristiques des populations prises en charge par les services pénitentiaires, les dernières études publiées dans les cahiers d'études pénitentiaires et criminologiques (qui remplacent les cahiers de démographie pénitentiaire) sont disponibles également sur le site internet sous la rubrique « administration pénitentiaire/documentation ». Les derniers numéros parus sont les suivants : « les infractions multiples : pour une nouvelle règle de détermination de l'infraction principale » en février 2009, quelques caractéristiques des détenus affectés au quartier maison centrale de Château-Thierry » en décembre 2008, « mineurs sous écrou : évolution récente et nouveaux indicateurs » en novembre 2008, « étrangers incarcérés » en octobre 2008, « la récidive des condamnés à la perpétuité » en août 2008. Concernant l'amélioration des conditions de détention des personnes détenues, ce sujet est une de ses constantes préoccupations. Au 1er mai 2009, le nombre de détenus s'élevait à 63 397 pour une capacité opérationnelle de 52 544 places. Une des réponses apportées à cette surpopulation carcérale est la construction de nouveaux établissements pénitentiaires afin d'une part, de supprimer l'encombrement que connaissent certains établissements et d'autre part, d'offrir des conditions d'hébergement décentes, respectueuses de la dignité humaine. À cet égard, un programme immobilier de très grande ampleur est mené depuis 2002. Ce plan permettra à terme la construction ou la rénovation de 25 structures. D'ores et déjà, les nouveaux centres pénitentiaires de Mont-de-Marsan, de Saint-Denis-de-la-Réunion, le centre de détention de Roanne et la maison d'arrêt de Lyon-Corbas accueillent des détenus. Très prochainement seront mis en service les centres pénitentiaires de Nancy, Poitiers-Vivonne et Béziers. Enfin, en 2010, aura lieu l'ouverture des centres pénitentiaires du Mans, de Bourg-en-Bresse, de Rennes et du Havre. Ces différentes mises en service sont accompagnées de la fermeture ou de la rénovation et transformation des anciens établissements pénitentiaires vétustes. Parallèlement, a été mis en place un dispositif d'accroissement des capacités (DAC) dans des structures déjà existantes. Le nombre de places d'hébergement va ainsi être augmenté de 13 200 places d'ici 2012. Par ailleurs, afin d'offrir le plus rapidement possible à la population pénale des conditions de détention satisfaisantes, il a été procédé à des audits internes qui ont permis de retenir un certain nombre d'établissements pénitentiaires en mesure d'augmenter leur capacité d'accueil en terme de couchage. A cet effet, l'administration pénitentiaire a procédé à l'acquisition de plusieurs centaines de lits supplémentaires. En outre, la lutte contre la surpopulation carcérale doit s'accompagner d'une politique de développement des peines alternatives à l'incarcération vigoureuse. C'est ainsi qu'au 1er mai 2009, 5 158 personnes étaient écrouées, mais non détenues contre 3 693 le 1er mai de l'année antérieure, soit une augmentation de 39,7 %. Parmi ces 5 158 personnes, 4 567 sont des condamnés en placement sous surveillance électronique (42,1 % d'augmentation par rapport au 1er mai 2008) et 591 des condamnés en placement extérieur non hébergés (plus 23,6 % par rapport au 1er mai 2008). En matière d'impact des conditions de détention sur la mortalité des personnes détenues, la ministre précise que les enquêtes et contrôles prévus par le législateur sont mis en place et l'administration pénitentiaire agit pour faciliter les inspections menées par l'inspection générale des affaires sociales (IGAS), celles conduites régulièrement par les services déconcentrés du ministère de la santé et celles du Contrôleur général des lieux privatifs de liberté. Quant aux données épidémiologiques concernant les personnes détenues, celles-ci sont collectées par les services du ministère de la santé. Ainsi, une étude relative à l'amélioration de la prise en charge des patients détenus atteints du VIH ou du VHC, dite « étude PREVACAR » est en cours de réalisation par le ministère de la santé avec le concours de l'administration pénitentiaire.
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