Texte de la REPONSE :
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SITUATION DE L'EMPLOI EN SEINE-MARITIME M. le président. La parole est à M. Jean-Paul
Lecoq, pour exposer sa question, n° 449. M. Jean-Paul Lecoq.
Monsieur le secrétaire d'État chargé de l'emploi, ma question s'adressait à Mme
Lagarde, mais je ne doute pas que votre connaissance de la situation vous
permettra d'y répondre. Vous n'êtes pas sans savoir que la Seine-Maritime est
l'un des territoires les plus touchés par la crise. Des milliers d'emplois
disparaissent, dans tous les secteurs : aux 450 emplois supprimés à l'hôpital du
Havre s'ajoutent ceux de l'industrie chimique et pétrochimique, des transports,
de la logistique autour du port du Havre, et j'en passe - sans oublier
l'industrie automobile, qui détient un triste record en la matière. J'ai eu
l'occasion de vous alerter à plusieurs reprises sur l'ampleur de ce phénomène de
licenciements massifs, en dépit du recours maladroit aux contrats de transition
: ces contrats étaient censés concerner toute la filière automobile - vous ne me
démentirez pas sur ce point, puisque vous étiez présent lorsque le Président de
la République l'a annoncé à l'aéroport du Havre -, mais les salariés
sous-traitants, les équipementiers, n'en ont manifestement pas bénéficié, ce qui
est anormal. D'autre part, le plan dit de relance lancé par le Président de
la République n'apporte aucune amélioration, du moins à ce jour. Nous continuons
au contraire à déplorer des fermetures d'usines et le recours au chômage partiel
à outrance. Des sociétés aux profits énormes se servent même du prétexte de la
crise financière pour licencier leurs salariés, selon une manoeuvre sournoise
leur permettant de réembaucher ensuite à plus bas salaires et à des conditions
drastiques. Ainsi, la clause de mobilité n'est qu'un subterfuge pour se
débarrasser sans vergogne d'un salarié résidant à proximité de son lieu de
travail en lui proposant une prime de mobilité dérisoire afin qu'il la refuse -
à juste titre - et se trouve au pied du mur, réduit à démissionner. Certaines
entreprises peu scrupuleuses sont malheureusement très friandes de cette astuce
malhonnête, que je déplore comme vous. Enfin, les sociétés d'intérim
elles-mêmes ne proposant plus de travail, leurs salariés sont eux aussi dans la
tourmente. Face à ce spectacle de désolation, j'ai adressé une lettre au
Président de la République et au nouveau ministre chargé de la mise en oeuvre du
" plan de relance ", sans réponse à ce jour. Je leur demandais de faire de toute
urgence de mon département, la Seine-Maritime, une zone expérimentale, un
laboratoire d'observation permanente du tissu du monde du travail, en y
interdisant dès à présent tout licenciement, afin d'oeuvrer efficacement à la
relance économique de notre pays et d'évaluer les propositions et les mesures
auxquelles le Gouvernement entend recourir. L'article 72 de notre Constitution
consacre du reste ce droit à l'expérimentation normative ; il faut l'appliquer.
Étant donné ses enjeux pour la collectivité, à ce dispositif d'observation
devront être associés, outre les industriels, des représentants des salariés et
des élus. Je vous demande donc, monsieur le secrétaire d'État, d'appliquer
avec détermination cette proposition afin de limiter les effets de la crise sur
l'emploi et sur la qualité de vie des gens, de préserver notre savoir-faire
régional et d'assurer l'avenir de nos industries, des salariés et de tous nos
concitoyens. Dans le cas contraire, quelles autres mesures concrètes
envisagez-vous pour refermer au plus vite cette plaie ouverte de l'emploi en
Seine-Maritime ? M. le président. La parole est à M. Laurent
Wauquiez, secrétaire d'État chargé de l'emploi. M. Laurent
Wauquiez, secrétaire d'État chargé de l'emploi. Monsieur le
député, le département de Seine-Maritime, où je me suis rendu à plusieurs
reprises au cours des quatre derniers mois, est en effet très rudement touché
par la crise. Vous avez évoqué les restructurations, qui, au-delà du seul
secteur automobile, particulièrement touché, concernent des secteurs très
divers. Je l'ai constaté en y accompagnant le Président de la République en
déplacement : vous êtes présent sur le terrain, notamment au côté des salariés
concernés, et vous défendez une position exigeante, mais aussi
constructive. L'État est déjà intervenu à de nombreuses reprises dans
l'accompagnement social et le reclassement des salariés d'entreprises
défaillantes, en particulier dans le secteur automobile. Je songe par exemple à
SLIC Gruchet ou à EMT Composants. Les services au niveau local s'efforcent en
outre de suivre la situation des sociétés qui sont encore en redressement
judiciaire, telles que Sonas ou Oxford. D'autre part, les services de l'État se
montrent extrêmement exigeants quant aux plans de sauvegarde de l'emploi en
cours sur les sites de Cooper Standard, Faurecia ou Autoliv. Ces plans peuvent
parfois déboucher sur une issue heureuse ; j'en ai fait l'expérience dans mon
département. S'agissant plus particulièrement du site de Renault à
Sandouville, vous savez que le Président de la République a montré son
implication dans le règlement du dossier en s'y rendant immédiatement le 6
octobre 2008. Il a ainsi pu dégager de réelles perspectives, ouvertes par la
fabrication d'un nouveau véhicule utilitaire à partir de 2012. Par ailleurs,
le Président de la République m'avait demandé de conduire des négociations avec
les partenaires sociaux afin de venir en aide aux salariés victimes de
l'activité partielle et réduits, dans une période difficile, à des salaires de
misère, parfois amputés de 40 à 50 %. Nous avons réussi à négocier avec Renault
et avec les partenaires sociaux un accord qui a permis de compenser en partie
cette perte en couplant activité partielle et formation, afin que tous ne
sortent pas perdants de cette période et que les salariés dont l'activité était
devenue insuffisante bénéficient d'un complément de salaire et acquièrent de
nouvelles compétences. Il s'agissait par exemple, très prosaïquement, de fournir
à un salarié jusqu'alors tributaire des transports en commun mis à disposition
par Renault la possibilité de passer son permis de conduire, ce qui lui
permettrait de retrouver plus facilement un emploi en cas de difficulté.
J'espère que les nouveaux outils de l'assurance chômage nous permettront d'aller
un peu plus loin en ce sens. Plus généralement, que faire pour le secteur
automobile ? En la matière, nous tentons d'agir à trois niveaux. Tout d'abord,
vous l'avez dit, le bassin d'emploi havrais sera l'un des premiers à bénéficier
du contrat de transition professionnelle, véritable aide au reclassement des
salariés qui se retrouvent sur la touche. Ce contrat pose toutefois un
problème que vous avez mentionné et que je ne sous-estime pas : il ne bénéficie
pas aux entreprises de plus de mille salariés, au nom d'une logique
compréhensible, selon laquelle l'investissement de l'État ne doit pas dispenser
les entreprises de taille importante, qui bénéficient généralement de moyens
supplémentaires, d'oeuvrer en faveur du reclassement, conformément à
l'obligation de revitalisation qui leur incombe. Or, nos critères étant toujours
quelque peu arbitraires, certaines PME de plus de mille salariés, notamment des
sous-traitants automobiles, ne disposent pas des moyens financiers leur
permettant de fournir à leurs salariés des outils de reclassement satisfaisants.
Nous travaillons actuellement sur ce problème, qui se pose également dans
l'Ouest, en particulier en Bretagne, afin de proposer un dispositif permettant
de remédier à cette situation sans dispenser d'assumer leurs obligations les
groupes qui en ont les moyens. Deuxièmement, à l'échelle de la région de
Haute-Normandie, le premier comité de pilotage chargé de la déclinaison de la
charte nationale pour l'automobile signée le 3 juillet 2008 se réunira courant
janvier 2009. Sa première mission consistera à étudier la formation afin d'en
faire un levier de reclassement permettant aux salariés de
rebondir. Troisièmement, l'État mobilise les dispositifs d'activité
partielle. Je l'ai dit devant la représentation nationale : tout vaut mieux que
le chômage. Si l'activité partielle peut permettre aux entreprises de traverser
cette crise sans sabrer l'emploi, nous devons donc l'utiliser - à la seule
condition que le salarié s'y retrouve en termes de salaire. Nous avons donc
saisi les partenaires sociaux de cette question. Vous le savez, un arrêté du 30
décembre dernier a permis de porter le contingent d'heures indemnisables dans le
secteur automobile de 600 à 1 000 heures par an et par salarié. Au total, dans
votre département, l'activité partielle et les contingents ont été multipliés
par 2,5. J'espère que les mesures qui résulteront de la négociation avec les
partenaires sociaux permettront par ailleurs un accompagnement relatif aux
niveaux de rémunération.
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