Texte de la QUESTION :
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M. Didier Robert attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la pêche sur les conclusions du rapport parlementaire relatif à la filière apicole. La filière apicole de la Réunion, forte d'un millier d'apiculteurs et d'environ 20 000 ruches, vient d'être récompensée par une médaille d'or au dernier salon de l'Agriculture. Les professionnels s'inquiètent des conséquences de l'introduction par le CIRAD, en 2007, d'un insecte, la « tenthrède de cibdela janthina » pour lutter contre la vigne marronne. En effet, la présence constatée de cet insecte, notamment sur les feuilles de baies roses, de palmistes, de cocotiers, de longanies, essentielles à la production du miel « Péi», menace aujourd'hui l'ensemble de la filière. Il souhaiterait connaître les dispositions concrètes, au regard notamment des préconisations du rapport parlementaire, qui sont aujourd'hui envisagées en la matière.
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Texte de la REPONSE :
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Les enjeux liés aux conséquences de l'introduction de la tenthrède Cibdela janthina pour lutter biologiquement contre la vigne marronne sur l'île de la Réunion sont effectivement importants, au regard notamment des impacts de cette introduction sur les écosystèmes. La vigne maronne, Rubus alceifolius, introduit et sur l'île de La Réunion vers 1840, est devenue l'une des espèces exotiques les plus envahissantes, menaçant la biodiversité des forêts réunionnaises et présente partout en zone agricole. Sans ennemis naturels pour maîtriser son développement et avec des conditions idéales pour pousser, cette plante s'est développée de manière anarchique, au détriment de la végétation indigène. Le caractère obligatoire de la lutte a ainsi été rendu officiel par arrêté ministériel du 31 juillet 2000. En complément des pratiques de lutte mécanique et chimique, dont l'efficacité technique est limitée, une solution plus durable méritait d'être recherchée. Un programme de recherche de méthodes de lutte biologique, financé par le conseil régional, a donc démarré en 1997. Sur 40 espèces étudiées, la tenthrède Cibdela janthina a été retenue pour son efficacité et sa spécificité sur Rubus alceifolius. Des tests de spécificité ont montré que les larves de Cibdela janthina ne s'attaquent pas aux principales espèces botaniques d'intérêt agricole, horticole ou patrimonial (41 espèces végétales testées). Aucune interaction négative avec d'autres espèces n'a été décrite au niveau mondial. Considérant alors que Cibdela janthina ne constituait pas une menace pour l'agriculture et l'environnement, la tenthrède a donc été introduite à la Réunion pour les dernières études en laboratoires, puis lâchée en milieu naturel sur la commune de Sainte-Rose en janvier 2008 sur autorisation préfectorale après avis favorable du Conseil scientifique régional du patrimoine naturel (CSRPN). Aujourd'hui, la tenthrède est présente sur une zone de 20 000 hectares dans le sud et l'est de l'île. Sur le site de lâcher à Bois Blanc, sur près de 4 800 hectares, les deux tiers des pieds de vigne maronne sont détruits et peu d'adultes de tenthrèdes sont encore observables. Ceci permet d'envisager une régression progressive de la vigne marronne limitant ainsi les populations de tenthrèdes à un niveau juste suffisant pour maintenir la régulation des pieds de vigne maronne résiduels. Actuellement, nombre d'adultes de tenthrèdes sont encore présents en bordure de la zone de dispersion, où les massifs de vigne maronne restent importants. Concernant la pollinisation, une récente étude de terrain montre que le niveau de fructification des baies roses (Schinus terebinthifolius) est identique dans l'Est et le Sud. La pollinisation s'est donc bien réalisée en présence de tenthrèdes dans l'Est. Les individus signalés comme ayant fleuri sans fructifier ont tous été identifiés comme mâles (spécimens dioïques). Concernant la compétition entre les abeilles et les tenthrèdes adultes pour la récolte de nectar, le CIRAD a proposé aux apiculteurs, à la demande du préfet, de mener avec leur appui une série d'expérimentations au champ et sous serre, qui démarreront dès que possible. Celles-ci visent à : comparer et quantifier la fréquentation des fleurs de litchis et de baies roses par la tenthrède et les abeilles ; observer les interactions tenthrède-abeilles dans les activités de butinage sur fleurs et sur d'autres sources alimentaires ; analyser et comparer le rôle de pollinisateur des fleurs de litchis de la tenthrède et des abeilles ; mesurer l'impact ou non sur la production mellifère des vergers. Bien que la production de miel de « vigne marronne » n'ait jamais été clairement évaluée économiquement, on estime aujourd'hui que le miel de vigne maronne entrerait dans la composition du miel de forêt, qui représente 5 % de la production réunionnaise. En forêt, la vigne maronne devrait naturellement être remplacée par des espèces indigènes dont plusieurs ont un intérêt mellifère reconnu. La production d'un miel de forêt, composé d'espèces indigènes, donnerait ainsi une assurance de typicité pour un produit pays labellisé.
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