FICHE QUESTION
13ème législature
Question N° : 45392  de  Mme   Quéré Catherine ( Socialiste, radical, citoyen et divers gauche - Charente-Maritime ) QE
Ministère interrogé :  Justice
Ministère attributaire :  Justice
Question publiée au JO le :  31/03/2009  page :  3019
Réponse publiée au JO le :  02/06/2009  page :  5401
Rubrique :  droit pénal
Tête d'analyse :  instruction
Analyse :  réforme. perspectives
Texte de la QUESTION : Mme Catherine Quéré attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur l'éventuelle suppression du juge d'instruction. En effet, cette annonce récemment évoquée perturbe et inquiète fortement les victimes de l'amiante et leur famille. Contrairement à ce projet, elles pensent qu'il serait plus rationnel, en particulier sur les dossiers sensibles, de renforcer les moyens mis à la disposition des juges. Cette mesure ne peut que retarder ou même compromettre, le procès pénal "amiante" que ces personnes attendent depuis de nombreuses années. Les personnes (ou leur(s) ayant(s) droit), frappées par le plus grand scandale sanitaire que notre pays ait connu, rencontrent les pires difficultés pour obtenir réparation. Nul n'ignore que le pic maximum du nombre de victimes est loin d'être atteint à ce jour. Pour l'ensemble de ces raisons, les membres des associations de défense des victimes de l'amiante pensent, d'une part, que les vrais responsables de ce phénomène reconnu de santé publique doivent être jugés et, d'autre part, que l'objectif relatif à la suppression du juge d'instruction soit abandonné. Par conséquent, elle souhaite connaître ses intentions sur ce sujet.
Texte de la REPONSE : Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, a l'honneur d'indiquer à l'honorable parlementaire qu'elle a installé le 14 octobre 2008 un comité de réflexion sur la justice pénale présidé par M. Philippe Léger, ancien avocat général à la Cour de justice des communautés européennes. Ce comité, missionné par le Président de la République et le Premier ministre, doit réfléchir à une rénovation et une remise en cohérence du code pénal et du code de procédure pénale. Le 6 mars 2009, il a remis un rapport d'étape consacré exclusivement à la phase préparatoire au procès pénal. Il est proposé de réformer en profondeur cette phase en transformant le juge de l'instruction en un juge de l'enquête et des libertés, en créant un cadre d'enquête unique dirigée par le procureur de la République et en renforçant les droits des mis en cause et des victimes. Ainsi que l'a indiqué le comité dans la conclusion de son rapport, ces propositions ne tendent pas à mettre en place un système accusatoire de type anglo-saxon mais à développer le contradictoire tout au long de la phase d'enquête. Par ailleurs, le comité a considéré que le véritable contrepoids à l'extension des pouvoirs du procureur de la République résultait d'un nouvel équilibre de la procédure pénale reposant sur l'instauration d'un juge doté de larges prérogatives afin de contrôler l'action du parquet, le renforcement significatif des droits de la défense, l'accroissement des droits de la victime et la suppression du secret de l'enquête. Il a ainsi estimé qu'il n'était en conséquence pas justifié de modifier le statut actuel du ministère public. En ce qui concerne les victimes, les propositions du comité tendent à préserver l'intégralité de leurs droits, avec la possibilité de déclencher des investigations en saisissant le juge de l'enquête et des libertés ou de devenir partie à une enquête et de bénéficier de droits au moins équivalents aux droits actuels de la partie civile. Les victimes pourront ainsi demander au procureur d'effectuer tous les actes qui leur paraissent nécessaires à la manifestation de la vérité, et, en cas de refus ou d'inaction de ce magistrat, elles pourront saisir le juge de l'enquête pour qu'il ordonne l'exécution de ces actes. Par ailleurs, en matière délictuelle, si à l'issue de l'enquête le procureur estime ne pas devoir renvoyer la ou les personnes mises en cause devant le tribunal correctionnel, il est proposé que ce renvoi puisse être décidé par les victimes elles-mêmes, par le biais d'une citation, alors qu'actuellement une ordonnance de non-lieu du juge d'instruction interdit à la victime de délivrer une citation directe. Toutes ces propositions paraissent répondre aux interrogations de l'honorable parlementaire quant à la possibilité pour la justice de traiter de façon efficace des affaires de santé publique d'une particulière ampleur, comme celle de l'amiante. D'une manière générale, le comité considère que les réformes qu'il propose devraient permettre une réduction de la durée des enquêtes et la tenue des audiences de jugement dans des délais plus brefs, ce qui est également dans l'intérêt des victimes. Les travaux de ce comité se poursuivent, le rapport final devant être remis début juin 2009. Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, peut cependant d'ores et déjà indiquer à l'honorable parlementaire que les propositions de ce comité feront ensuite l'objet d'une large concertation en vue de l'élaboration d'un projet de texte. La représentation nationale et les associations de victimes seront bien entendu associées à cette réflexion d'importance majeure. Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, veillera à ce que cette réforme n'entraîne aucun amoindrissement des droits des victimes et souhaite en revanche que ce débat permette d'aboutir à une procédure pénale plus respectueuses des droits des mis en cause et des victimes, mais aussi plus simple et plus efficace.
S.R.C. 13 REP_PUB Poitou-Charentes O