FICHE QUESTION
13ème législature
Question N° : 45714  de  M.   Hunault Michel ( Nouveau Centre - Loire-Atlantique ) QE
Ministère interrogé :  Coopération et francophonie
Ministère attributaire :  Coopération et francophonie
Question publiée au JO le :  31/03/2009  page :  2982
Réponse publiée au JO le :  30/06/2009  page :  6453
Rubrique :  relations internationales
Tête d'analyse :  environnement
Analyse :  ressources en eau. perspectives
Texte de la QUESTION : M. Michel Hunault attire l'attention de M. le secrétaire d'État chargé de la coopération et de la francophonie sur la crise mondiale de l'eau après la publication du rapport mondial sur les ressources en eau présenté par l'ONU, le 12 mars 2009. Le document des Nations-unies décrit les signes alarmant de la crise de l'eau. L'eau n'est pas un secteur de l'environnement parmi d'autres. Arme essentielle dans la lutte contre les maladies, la faim, elle est indispensable au développement économique. L'ONU considère qu'en l'absence d'initiatives et de réelle volonté politique d'agir, les conséquences de la crise de l'eau seraient graves pour le développement, mais aussi pour la sécurité. Face aux défis de la croissance démographique et du changement climatique, l'eau se raréfie. C'est pourquoi il lui demande de préciser les initiatives que le Gouvernement entend promouvoir, en partenariat avec les États européens et de façon plus générale, au sein des instances internationales, pour apporter des réponses concrètes aux préoccupations de l'ONU contenues dans ce rapport.
Texte de la REPONSE : La crise de l'eau qu'a bien rappelé le 3e rapport des Nations unies sur l'état des ressources en eau est une crise bien réelle. Elle constitue une menace pour les hommes et les femmes de cette planète car elle peut affecter leur santé, leur alimentation, leur capacité à travailler, leur environnement, leur sécurité dans les cas d'événements extrêmes (sécheresses, inondations) ou de conflit lié au partage des eaux d'un fleuve transfrontalier par exemple. La question de l'eau et de l'assainissement est au cour de la problématique du développement durable. Quand encore un milliard d'habitants n'a pas d'accès à un point d'eau potable, et que plus de 2,6 milliards n'ont pas d'installation décente d'assainissement (et que les plus affectés par ce fléau sont les enfants) ; quand la majorité des grands fleuves traversent plusieurs pays qui doivent en partager les richesses ; quand les ressources en eau mobilisables sont de plus en plus variables du fait du climat, modifiant le régime des cours d'eau, accroissant la désertification de certaines régions et la fréquence des inondations dans d'autres ; quand l'accroissement des villes, les flux touristiques, les régimes alimentaires et les industries nécessaires au développement continuent d'accroître la consommation d'eau ; il fait consensus que la gestion des ressources en eau, de leur protection à leur valorisation, est un enjeu majeur pour la lutte contre la pauvreté, les objectifs de développement en matière de santé publique, d'éducation et du rôle des femmes, la protection de l'environnement (sols, biodiversité, écosystèmes). La gestion des ressources en eau a également un rôle à jouer dans les politiques d'adaptation au changement climatique, et doit être intégrée aux politiques publiques de sécurité alimentaire et d'énergie, deux domaines où l'eau est utilisée en grande quantité pour des usages productifs : l'eau pour l'agriculture et l'hydroélectricité. La bonne gestion des ressources en eau est ainsi vitale pour l'économie domestique et pour l'économie des pays. Ce constat doit inciter les politiques à prendre des engagements forts pour protéger cette ressource vitale, mieux coopérer pour la partager, mieux intégrer l'eau dans les autres politiques qui, de fait, seront impactées si la question de l'eau n'est pas prise en compte à sa juste valeur. À cet effet, la France a pris en 2003, au G8 d'Evian, des engagements importants, qu'elle a transposés en 2005 en une stratégie pour la coopération au développement dans le secteur de l'eau et de l'assainissement. Cette stratégie est encore aujourd'hui le cadre dans lequel s'inscrit la politique d'appui de la France dans ce secteur prioritaire de notre coopération. En termes financiers, la France s'est engagée au doublement de l'aide publique au développement dans le secteur de l'eau et de l'assainissement, principalement vers l'Afrique et avec une augmentation de l'aide transitant par les organisations non gouvernementales. Cet objectif a été atteint en 2007, notamment grâce à la contribution majeure de l'Agence française de développement. Près de 400 millions d'euros ont été engagés en aide bilatérale en 2007 (alimentation en eau et assainissement, eau agricole, hydroélectricité). Les perspectives sont plus contraintes pour 2009 et 2010, mais la France ambitionne d'accueillir, en 2012, le Forum mondial de l'eau, la manifestation la plus importante du secteur. Ce sera l'occasion de renforcer notre politique de l'eau à l'international. La France est classée par l'organisation de coopération et de développement économique au 5e rang des bailleurs bilatéraux dans le secteur et entend continuer à tenir cette place. Les financements de l'AFD ont contribué depuis 2002 à fournir un nouvel accès à l'eau et à l'assainissement à plus de 25 millions de personnes dans le monde. Depuis 2003, un effort particulier a été fait en faveur des programmes d'assainissement et d'hygiène, essentiels en termes de santé publique mais qui ont également des bénéfices économiques sur l'environnement, en permettant de protéger les ressources en eau et les écosystèmes qui en dépendent. Aux côtés du Japon et de l'Allemagne, la France a été à l'initiative de la déclaration par les Nations unies de l'année internationale de l'assainissement en 2008. En 2007, la France a consacré environ 140 millions d'euros, soit plus d'un tiers de son aide publique dans le secteur de l'eau à la filière assainissement et hygiène. Enfin, la France considère que l'accès à l'eau potable et à l'assainissement est essentiel pour atteindre les objectifs du millénaire pour le développement. Aux côtés d'autres pays engagés sur ce sujet (Allemagne, Suisse, Espagne, Pays-Bas pour les Européens) et des instances ad hoc des Nations unies, elle entend faire progresser la reconnaissance de ce droit, fondamental pour la dignité des populations. La France soutient également la coopération transfrontalière pour la gestion des ressources en eau. Ce travail à l'échelle régionale est nécessaire car il faudra s'adapter au changement climatique et développer des ouvrages structurants (barrages) pour la mobilisation et la valorisation de ces ressources tout en partageant les bénéfices pour tous les États et populations riverains. La France soutient et continuera à soutenir plusieurs autorités de bassins transfrontaliers (Niger, Sénégal, Volta, Nil, Congo, Volta, Mékong) qui ont un rôle d'intégration régionale. À cet égard, la France a tout récemment engagé son processus d'adhésion à la « Convention des Nations unies sur les eaux transfrontalières pour les usages autres que la navigation » de 1997, qui sera prochainement présentée devant le Parlement. Cette convention s'inscrit dans le cadre des recommandations adoptées par la déclaration de Rio de 1992. Une fois entrée en vigueur (il manque à ce jour quelques adhésions pour ce faire), elle permettra de doter les pays en voie de développement qui en sont dépourvus d'un cadre juridique de coopération au niveau des bassins, offrant par là même un précieux instrument de paix et de stabilité pour les nations partageant des ressources en eau, dans un contexte où les tensions risquent de s'aggraver du fait des impacts du changement climatique. La France appuie aussi la mise en place de mécanismes de gestion concertée pour les aquifères transfrontaliers, souvent surexploités (agriculture, production d'eau potable) et menacés par la pollution (aquifère du Sahara septentrional). Au-delà de la seule alimentation en eau potable, les enjeux sont une gestion plus efficiente de l'eau pour l'agriculture, directement liée à la question de la sécurité alimentaire et la production d'énergie propre par l'hydroélectricité. La France soutient à cet égard différents programmes d'économies d'eau en agriculture (Moyen-Orient, Maghreb), ainsi que de valorisation de techniques agro-écologiques adaptées aux climats semi-arides visant à une agriculture plus performante et à la préservation des sols. La France est aussi partenaire d'initiatives pour une relance des investissements agricoles en Afrique, ce qui inclut des projets d'eau pour une agriculture durable, par exemple : l'AFD est partie prenante au fonds pour l'agriculture en Afrique récemment créé avec la Banque africaine de développement et le Fonds international de développement agricole, consciente que la bonne gestion des ressources en eau, en qualité et en quantité, est un facteur de développement durable, la France soutient différents programmes liés à la gouvernance des services d'eau et d'assainissement mais aussi de professionnalisation des acteurs concernés, tant pour les services essentiels que pour l'irrigation. Le renforcement des capacités des acteurs locaux est une composante imposée des projets soutenus, qu'il s'agisse de la formation professionnelle aux métiers de l'eau (un Réseau international des centres de formation aux métiers de l'eau appuyé par le ministère des affaires étrangères et européennes a été lancé en 2008) ou de l'appui à la maîtrise d'ouvrage des collectivités locales ou des syndicats d'irrigants. Le renforcement des capacités financières des collectivités locales et porteurs de projet de la société civile (ONG) ou du petit secteur privé passe également par le renforcement de mécanismes financiers adaptés. L'AFD développe une gamme de produits financiers sous-souverains avec des objectifs ambitieux (50 % des engagements dans les pays étrangers aux acteurs non souverains d'ici à 2011). La France entend également continuer à mobiliser des ressources additionnelles via les collectivités locales françaises, autorisées par la loi Oudin-Santini à soutenir les collectivités locales du Sud, et à faire levier sur d'autres bailleurs. La France est par ailleurs impliquée dans le renforcement des mécanismes de suivi-évaluation des efforts dans le secteur de l'eau, dont le Rapport recent du World Water Assessment Programme (UNESCO) qui porte sur l'évaluation des ressources en eau dans le monde et sur lequel se fonde la présente question. Nous soutenons l'autre programme des Nations unies (Organisation mondial de la santé, UNICEF), le programme de surveillance conjoint (Joint Monitoring Programme), appuyons la Banque africaine de développement dans la mise en place d'un mécanisme régional de suivi-évaluation en Afrique, et avons soutenu le développement d'un système d'information régional sur l'eau en méditerranée, système euro-méditerranéen d'information sur les savoir-faire dans le domaine de l'eau, aujourd'hui opérationnel. Si la coopération française dans le secteur de l'eau est essentiellement tournée vers l'Afrique, qui recueille en moyenne sur les dernières années plus de deux tiers de l'APD dans ce secteur, il faut également noter un axe stratégique important dans les grandes villes de Méditerranée dans le cadre de l'Union pour la Méditerranée, en particulier sur des projets de protection des ressources en eau et d'assainissement, ainsi que sur des bassins internationaux où se posent des questions de coopération et sécurité, comme c'est le cas en Asie centrale.
NC 13 REP_PUB Pays-de-Loire O