Texte de la QUESTION :
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Mme Martine Faure attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur la recrudescence du nombre de suicides dans les prisons françaises, passé de 96 en 2007 à 115 en 2008, avec une vulnérabilité particulière pour les personnes en détention provisoire et un moment nettement critique lors de la mise sous l'écrou. Selon l'Observatoire international des prisons (OIP), 36 suicides ont été dénombrés depuis le 1er janvier 2009 dans les prisons françaises, ce qui signifierait une hausse de 31 % par rapport à 2008. Pour sa part, le directeur de l'Administration pénitentiaire a reconnu que la progression récente du nombre de suicides en prison constituait une situation préoccupante. En octobre 2008, une mission était confiée au psychiatre Louis Albrand qui vient de rendre ses conclusions. Pour humaniser les prisons et améliorer la détection du risque suicidaire, il préconise une meilleure prise en charge à l'arrivée en milieu carcéral, un accès facilité aux parloirs, à la famille, au téléphone, un accroissement des activités pour briser l'isolement, une diminution de la durée des séjours disciplinaires et une formation mieux adaptée des personnels pénitentiaires. Elle lui demande donc de préciser si le Gouvernement entend donner une suite aux vingt propositions de ce rapport et mettre en oeuvre une politique de prévention du suicide efficace afin d'enrayer au plus vite une épidémie qui se prolonge de façon insupportable.
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Texte de la REPONSE :
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La garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire qu'elle est particulièrement sensible à la question du suicide des personnes incarcérées, qui est l'une de ses priorités d'action. S'agissant des suicides, depuis 1967 (date de la première circulaire), l'administration pénitentiaire mène une politique de prévention des suicides à destination de toutes les personnes incarcérées. Elle a renforcé son action en 1997 en définissant un plan d'action comportant des mesures d'application immédiate et un programme expérimental. Tout en veillant au respect des mesures précitées, la direction de l'administration pénitentiaire a développé, en 2000 et 2001, de nouvelles actions destinées à parfaire le dispositif existant, en cohérence avec « la stratégie nationale d'actions face au suicide pour 2000-2005 » lancée le 19 septembre 2000 par le ministère de la santé. La circulaire interministérielle (ministère de la santé/ministère de la justice) du 26 avril 2002 complétant celle du 29 mai 1998 réaffirme le bien-fondé des actions engagées en termes de repérage du risque suicidaire, de soutien aux personnes présentant ce risque et d'accompagnement des familles. Elle introduit surtout un axe complémentaire sous forme de priorité : la formation des personnels à la prévention du suicide en détention. En 2003, la garde des sceaux et le ministre de la santé ont conjointement missionné le professeur Jean-Louis Terra afin de conduire une évaluation des actions mises en oeuvre tant sur le plan quantitatif que qualitatif, dans le but de dégager des propositions destinées à compléter et à affiner le dispositif préexistant. À la suite des recommandations du professeur Terra, un certain nombre d'orientations de travail ont été énoncées : la formation des personnels pénitentiaires au repérage de la crise suicidaire, l'élaboration de procédures de détection de la crise suicidaire et le déploiement de plans de prévention et de réduction des moyens d'accès au suicide dans la conception des nouveaux établissements (par exemple : « les potences » soutenant les postes TV). Fin 2008, la garde des sceaux, ministre de la justice a confié l'animation et la coordination d'un groupe de travail chargé de procéder à une évaluation du dispositif en place et de faire des propositions concrètes à un médecin expert, le docteur Louis Albrand. Suite à la remise du rapport le 2 avril dernier de ce groupe de travail qui propose 20 recommandations, la garde des sceaux, ministre de la justice, souhaite mettre en oeuvre rapidement certaines de ces recommandations et engager une expérimentation pour d'autres. Une liste de mesures de vigilance a d'ores et déjà été transmise aux établissements pénitentiaires en matière de prévention et d'intervention, en cas de crise suicidaire. Il a notamment été demandé de créer en lien avec les professionnels de santé, des groupes de parole, afin de limiter l'effet d'entraînement qu'un suicide peut créer. Dans le cadre de la prise en charge globale du mineur initiée avec l'ouverture des établissements pénitentiaires pour mineurs (EPM), un groupe de travail réunissant la direction générale de la santé, la direction de protection judiciaire de la jeunesse et la direction de l'administration pénitentiaire a été constitué en juin dernier afin de conduire une réflexion sur la prévention du suicide des mineurs. Ces travaux ont permis la mise en oeuvre effective le 1er novembre 2008 d'une nouvelle grille d'évaluation du potentiel suicidaire adaptée aux mineurs. Cette grille est aujourd'hui appliquée de manière systématique à tous les mineurs détenus arrivants et fera prochainement l'objet d'une évaluation.
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