FICHE QUESTION
13ème législature
Question N° : 47654  de  M.   Liebgott Michel ( Socialiste, radical, citoyen et divers gauche - Moselle ) QE
Ministère interrogé :  Justice
Ministère attributaire :  Justice
Question publiée au JO le :  28/04/2009  page :  3994
Réponse publiée au JO le :  16/06/2009  page :  5935
Rubrique :  système pénitentiaire
Tête d'analyse :  détenus
Analyse :  suicides. lutte et prévention
Texte de la QUESTION : M. Michel Liebgott attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur le rapport rendu par le docteur Louis Albrand s'agissant des suicides en prisons, demandé suite à une recrudescence du nombre des suicides en prisons (115 en 2008 contre 96 en 2007). Le docteur Albrand estime qu'il faut « changer l'état d'esprit des prisons, et les humaniser » pour « lutter contre le suicide ». Il émet vingt recommandations. Elles portent d'abord sur l'amélioration de la formation, en rappelant que les deux tiers du personnel pénitentiaire restent à former, et en insistant sur la formation des travailleurs sociaux, du personnel médical, mais aussi des codétenus. Pour améliorer la détection du risque suicidaire, le rapport préconise d'y associer les proches du détenu et les autres acteurs de la prison (aumôniers, enseignants...). Cela suppose un changement de culture dans les relations entre le personnel et les familles : « cet objectif nécessite que soit amélioré, en premier lieu l'accueil, au sens littéral, des familles. En l'absence de cet effort, ces dernières ne se sentiront pas « autorisées » à transmettre une information ». Une meilleure protection des détenus présentant un risque suicidaire exige en effet un meilleur partage des informations : il est suggéré d'installer dans toutes les prisons une commission de prévention, et d'instaurer un « trinôme » référent, composé d'un surveillant gradé, d'un conseiller d'insertion et de probation et d'un personnel soignant. Le rapport veut aussi « atténuer le sentiment d'isolement de la personne détenue par la socialisation », en favorisant les activités, et en autorisant un parloir ou une communication téléphonique dès la première semaine d'incarcération. Le rapport demande une diminution de la durée de placement en quartier disciplinaire, mais sans fixer un nombre de jours précis. M Albrand souhaitait qu'elle passe de quarante-cinq à vingt jours. Il préconise, enfin, d'expérimenter pour les cas aigus des cellules sécurisées, munies de draps déchirables, voire d'une surveillance électronique. La France reste aujourd'hui parmi les plus mauvais élèves du Conseil de l'Europe en matière de taux de suicide dans les prisons. Aussi, il lui demande quelles suites le Gouvernement entend donner à ce rapport.
Texte de la REPONSE : La garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire qu'elle est particulièrement sensible à la question du suicide des personnes incarcérées, qui est l'une de ses priorités d'action. S'agissant des suicides, depuis 1967 (date de la première circulaire), l'administration pénitentiaire mène une politique de prévention des suicides à destination de toutes les personnes incarcérées. Elle a renforcé son action en 1997 en définissant un plan d'action comportant des mesures d'application immédiate et un programme expérimental. Tout en veillant au respect des mesures précitées, la direction de l'administration pénitentiaire a développé, en 2000 et 2001, de nouvelles actions destinées à parfaire le dispositif existant, en cohérence avec « la stratégie nationale d'actions face au suicide pour 2000-2005 » lancée le 19 septembre 2000 par le ministère de la santé. La circulaire interministérielle (ministère de la santé, ministère de la justice) du 26 avril 2002 complétant celle du 29 mai 1998 réaffirme le bien fondé des actions engagées en termes de repérage du risque suicidaire, de soutien aux personnes présentant ce risque et d'accompagnement des familles. Elle introduit surtout un axe complémentaire sous forme de priorité : la formation des personnels à la prévention du suicide en détention. En 2003, le garde des sceaux et le ministre de la santé ont conjointement missionné le professeur Jean-Louis Terra afin de conduire une évaluation des actions mises en oeuvre tant sur le plan quantitatif que qualitatif, dans le but de dégager des propositions destinées à compléter et à affiner le dispositif préexistant. À la suite des recommandations du professeur Terra, un certain nombre d'orientations de travail ont été énoncées : la formation des personnels pénitentiaires au repérage de la crise suicidaire, l'élaboration de procédures de détection de la crise suicidaire et le déploiement de plans de prévention et de réduction des moyens d'accès au suicide dans la conception des nouveaux établissements (par exemple : « les potences » soutenant les postes TV). Fin 2008, la garde des sceaux, ministre de la justice a confié l'animation et la coordination d'un groupe de travail chargé de procéder à une évaluation du dispositif en place et de faire des propositions concrètes à un médecin expert, le docteur Louis Albrand. Suite à la remise du rapport le 2 avril dernier de ce groupe de travail qui propose 20 axes de travail, la garde des sceaux, ministre de la justice, souhaite mettre en oeuvre rapidement certaines recommandations et engager une expérimentation pour d'autres. Une liste de mesures de vigilance a d'ores et déjà été transmise aux établissements pénitentiaires en matière de prévention et d'intervention, en cas de crise suicidaire. Il a été demandé de créer en lien avec les professionnels de santé, des groupes de parole, afin de limiter l'effet d'entraînement qu'un suicide peut créer. Dans le cadre de la prise en charge globale du mineur initiée avec l'ouverture des établissements pénitentiaires pour mineurs (EPM), un groupe de travail réunissant la direction générale de la santé, la direction de la protection judiciaire de la jeunesse et la direction de l'administration pénitentiaire a été constitué en juin 2008 afin de conduire une réflexion sur la prévention du suicide des mineurs. Ces travaux ont permis la mise en oeuvre effective le 1er novembre 2008 d'une nouvelle grille d'évaluation du potentiel suicidaire adaptée aux mineurs. Cette grille est aujourd'hui appliquée de manière systématique à tous les mineurs détenus arrivants et fera prochainement l'objet d'une évaluation.
S.R.C. 13 REP_PUB Lorraine O