FICHE QUESTION
13ème législature
Question N° : 51401  de  M.   Chassaigne André ( Gauche démocrate et républicaine - Puy-de-Dôme ) QE
Ministère interrogé :  Agriculture et pêche
Ministère attributaire :  Alimentation, agriculture et pêche
Question publiée au JO le :  09/06/2009  page :  5476
Réponse publiée au JO le :  28/07/2009  page :  7426
Date de changement d'attribution :  23/06/2009
Rubrique :  élevage
Tête d'analyse :  PAC
Analyse :  lait. perspectives
Texte de la QUESTION : M. André Chassaigne attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la pêche sur la situation des éleveurs laitiers. À la suite du bilan de santé de la politique agricole commune, les ministres européens de l'agriculture ont choisi de libéraliser le secteur laitier en abandonnant les derniers instruments de régulation, notamment la sortie sur cinq ans des quotas laitiers avec une augmentation progressive des quotas sur la période. De son côté, le Gouvernement français avait acté la remise en cause des modalités de fixation des prix du lait avec l'adoption de la loi du 3 janvier 2008 pour le développement de la concurrence au service des consommateurs et de la loi du 4 août 2008 de modernisation de l'économie, laissant les mains libres aux transformateurs, industriels et opérateurs de la grande distribution dans la fixation des prix avec les producteurs. Les éleveurs laitiers paient aujourd'hui directement les conséquences de ces choix politiques. Après les baisses consenties sur les prix au dernier trimestre 2008 et au premier trimestre 2009, l'effondrement des prix d'achat à 210 euros les 1 000 litres en moyenne pour les mois à venir constitue une véritable provocation pour toute la filière laitière. Les producteurs avaient déjà été contraints, ces derniers mois, d'engager des luttes importantes avec les transformateurs et industriels laitiers pour obtenir des concessions marginales à leur contractualisation. Ils sont à nouveau dans l'action aujourd'hui. Face à cette situation qui prive de revenus l'ensemble des éleveurs laitiers, le conseil des ministres européens de l'agriculture du 25 mai 2009 a choisi de ne pas remettre en cause la libéralisation du secteur laitier. Seule une mesure d'avance sur le paiement des aides directes 2010 est prévue. D'autre part, suite à la mise en place le 19 mai 2009 d'une mission de médiation « pour faciliter les discussions privées sur le prix du lait », seule la possibilité offerte au Centre national interprofessionnel de l'économie laitière (CNIEL) de proposer des indices de prix a été réaffirmée. Cette décision non contraignante ne remet donc pas en cause la pleine liberté accordée aux industriels dans la contractualisation avec les producteurs. La crise que vivent actuellement les éleveurs laitiers appelle d'autres réponses politiques. Alors que les prix de vente du lait au consommateur ont augmenté de 13,4 % en deux ans, ils n'attendent qu'une seule chose : pouvoir bénéficier d'un prix d'achat du lait rémunérateur pour vivre dignement de leur production. En conséquence, il lui demande s'il compte revenir sur les dispositions induites par la loi de modernisation de l'économie et la loi pour le développement de la concurrence. Il lui demande quelles mesures contraignantes il compte prendre à l'encontre des industriels et de la grande distribution pour assurer aux éleveurs laitiers un prix du lait rémunérateur, seul gage d'avenir pour la filière. Enfin, il souhaiterait connaître ses intentions sur la mise à l'ordre du jour de l'agenda européen concernant la création d'un prix indicatif européen pour le lait, l'abaissement des quotas laitiers dès 2009, et le maintien des quotas après 2015.
Texte de la REPONSE : Après la période particulièrement favorable connue en 2007, les marchés laitiers se sont retournés à partir du second semestre 2008. Depuis le début de l'année, la situation reste très dégradée, même si une certaine stabilisation est notée au cours des dernières semaines grâce à la mise en oeuvre des dispositifs communautaires de régulation des marchés des produits laitiers. La réponse à ces difficultés est avant tout européenne. L'accord du « bilan de santé » de la politique agricole commune (PAC), conclu sous présidence française, a réintroduit un pilotage économique et politique de la production et des marchés laitiers. Deux rendez-vous politiques ont été programmés, en 2010 et en 2012, pour décider des options à retenir, y compris de l'avenir des quotas, au regard de l'évolution des marchés. Cet accord a également permis de préserver l'ensemble des outils de régulation des marchés, contrairement aux propositions initiales de la Commission. Ces outils sont d'ailleurs pleinement utilisés depuis le début de l'année pour limiter les effets de la crise. Les cours, tant du beurre que de la poudre de lait écrémé se situent quasiment aux prix d'intervention. Mais pour autant des incertitudes persistent au-delà de cette période. Aussi, la Commission présentera le 22 juillet prochain l'analyse approfondie du marché, indiquant les formules possibles pour stabiliser le marché des produits laitiers, comme cela a été demandé par le Conseil européen du 19 juin 2009. Dans cette perspective, une lettre conjointe des ministres de l'agriculture français et allemand a été adressée à la commissaire Fischer Boel pour lui rappeler qu'au-delà des mesures d'urgence à apporter, prolongement des mesures de stockage et utilisation plus massive des restitutions à l'exportation, de nouvelles formes de régulation à l'échelle européenne seront nécessaires pour que le secteur laitier ne dépende pas uniquement des seules règles du marché. L'accord sur le « bilan de santé » de la PAC permet également à chaque État membre d'orienter une partie des aides directes en fonction de choix nationaux à travers la mise en oeuvre du règlement (CE) n° 73/2009 du Conseil du 19 janvier 2009. Les mesures décidées lors du CSO (Conseil supérieur d'orientation et de coordination de l'économie agricole et alimentaire) le 23 février 2009 conduisent à réorienter en 2010 près de 1,4 milliard d'euros, soit 18 % des aides directes reçues par les agriculteurs, notamment en faveur de l'élevage à l'herbe. Une enveloppe de 45 millions d'euros sera également consacrée à la production laitière en montagne à travers une aide couplée au litre de lait de l'ordre de 20 euros/1 000 litres. Au niveau national, pour la campagne laitière qui a débuté le 1er avril 2009, la première hausse du quota de 1 %, prévue dans le cadre de l'accord sur le bilan de santé a été gelée, en concertation avec les familles professionnelles. En parallèle, le Gouvernement a proposé un nouveau cadre de régulation pour le secteur laitier. Ce cadre repose sur le rôle central de l'interprofession laitière, le CNIEL, tel qu'il a été défini en décembre dernier dans la loi de finances pour 2009. Il donne à l'interprofession les moyens de construire de nouvelles relations contractuelles durables, portant notamment sur la définition des prix, les engagements sur les volumes et les calendriers de livraison, les modalités de règlement, les modalités de renégociation ou de résiliation des contrats. Grâce à une mission de médiation engagée conjointement avec le secrétariat d'État chargé de l'industrie et de la consommation, les familles de l'interprofession laitière ont pu définir, le 3 juin dernier, le cadre de travail pour les mois qui viennent. Les trois familles se sont engagées à fixer d'ici à la fin de l'année un encadrement interprofessionnel pour définir les relations contractuelles entre producteurs et transformateurs. Cet accord a pour vocation d'assurer la visibilité et la stabilité dont l'ensemble de la filière a besoin. Le Gouvernement y veillera. Ainsi, dans le prolongement de cet accord interprofessionnel, deux missions spécifiques sont engagées par le Gouvernement, portant sur l'accompagnement de la mise en place au sein de l'interprofession laitière de nouvelles relations contractuelles durables, et sur l'évaluation des mutations nécessaires de l'outil industriel français face à l'évolution des différents marchés nationaux, européens et pays tiers. Par ailleurs, le Gouvernement a pris la pleine mesure des difficultés rencontrées par les éleveurs laitiers du fait de l'effondrement des prix. Un plan d'accompagnement pour les exploitations laitières fragilisées est mis en oeuvre avec un allègement des charges financières et sociales, ainsi que le renforcement du dispositif de modernisation des bâtiments d'élevage. Au total, 30 millions sont mobilisés pour les producteurs laitiers. Une priorité sera apportée aux jeunes agriculteurs et aux récents investisseurs. De plus, le Premier ministre a annoncé le versement de 70 % des aides directes communautaires pour la campagne 2009, par anticipation, dès le 16 octobre, à l'ensemble des producteurs français. Enfin, le Gouvernement a décidé, pour faire la pleine transparence sur les prix et les marges, de lancer une enquête auprès des entreprises et des centrales de grande distribution. Ces données seront communiquées dans le cadre de l'observatoire des prix et des marges.
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