FICHE QUESTION
13ème législature
Question N° : 51683  de  M.   Morel-A-L'Huissier Pierre ( Union pour un Mouvement Populaire - Lozère ) QE
Ministère interrogé :  Économie, industrie et emploi
Ministère attributaire :  Solidarités et cohésion sociale
Question publiée au JO le :  09/06/2009  page :  5505
Réponse publiée au JO le :  01/05/2012  page :  3348
Date de changement d'attribution :  21/12/2010
Rubrique :  politique sociale
Tête d'analyse :  RSA
Analyse :  mise en oeuvre
Texte de la QUESTION : M. Pierre Morel-A-L'Huissier attire l'attention de Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi sur les conséquences du revenu de solidarité active sur les autres prestations Il lui demande de bien vouloir lui indiquer les mesures qui seront prises afin de préserver la cohérence de l'ensemble des dispositifs de soutien aux personnes vulnérables après l'entrée en vigueur du RSA.
Texte de la REPONSE :

Les aides de toute nature accordées sous seule condition de statut d'allocataire de minima sociaux constituent des droits dits « connexes ». Ils étaient ouverts aux bénéficiaires du revenu minimum d’insertion (RMI) ou de l’allocation pour parent isolé (API). La nature de ces aides est très diverse : il s'agit d'aides monétaires, d’aides quasi-monétaires (bons d'achat par exemple), d’aides en nature (colis alimentaires par exemple), d’aides tarifaires ou de droits connexes indirects (exonérations, dégrèvements). Il existe deux grandes catégories de droits « connexes » : les droits « connexes » nationaux alloués par l'État ou les grandes entreprises de réseau (dégrèvement de la taxe d'habitation, exonération de la redevance audiovisuelle, tarifs spéciaux sur certains services publics,...) ; les droits « connexes » locaux constitués d'aides financières des collectivités et organismes sociaux. Ces nombreuses aides sociales locales accordées par les départements, les communes, les régions, les caisses d'allocations familiales remplissent des objectifs variés : restauration scolaire, centre de loisirs, aide aux vacances, prise en charge d'impayés, aide au transport et à la mobilité, tarifs sociaux des équipements collectifs (piscine, musée...). Partant du constat que ces droits, très dégressifs avec les ressources des ménages, et rapidement perdus lors d'un retour à l'emploi, pénalisaient leurs bénéficiaires, la généralisation du revenu de solidarité active (RSA) a impliqué une large réflexion afin de circonscrire au maximum ces pratiques. La refonte globale des dispositifs attachés aux droits auxquels se substitue le RSA, c'est-à-dire les aides attachées au ex-RMI et à l'ex-API, vise donc la suppression ou l'atténuation des effets de seuil, régulièrement dénoncés comme pénalisant pour les salariés modestes lorsqu'ils reprennent un emploi. Ainsi, s'agissant des droits « connexes nationaux », ils ont été réformés, dans le cadre de la mise en place du RSA, afin de ne plus être alloués par référence à la situation statutaire des allocataires du RSA mais par référence à un niveau de ressources. Dorénavant, toutes les personnes ayant un niveau de ressources inférieur à un seuil fixé, dès lors qu'elles remplissent les autres conditions d'éligibilité à un dispositif, y ont droit, indépendamment de leur statut. Les droits des bénéficiaires sont donc ajustés à la situation de leurs revenus. Ces réformes s'accompagnent néanmoins d'un principe protecteur : le RSA n'est jamais pris en compte dans les ressources des bénéficiaires, ni en matière fiscale, ni en matière sociale. On s'assure de la sorte de maintenir les droits de ceux des bénéficiaires les plus vulnérables, cependant que les bénéficiaires en reprise d'emploi seront placés dans la même situation que les travailleurs modestes. Au plan national, plusieurs droits « connexes » ont fait l'objet d'une réforme, notamment dans le cadre de la loi du 1er décembre 2008 et de son premier décret d'application du 15 avril 2009 (décret n°2009-404 du 15 avril 2009 relatif au revenu de solidarité active). D'autres dispositions décrétales, relatives notamment aux aides au logement (décret n°2009-976 du 20 août 2009 relatif aux ressources prises en compte pour le calcul du droit aux prestations familiales et aux allocations de logement) et au tarif social téléphonique (décret n°2009-716 du 18 juin 2009 relatif aux traitements automatisés de données à caractère personnel accompagnant la mise en œuvre du RSA et portant diverses dispositions de coordination) ont permis de poursuivre cette réforme. Concernant la taxe d'habitation (TH), les allocataires du RMI bénéficiaient d'un dégrèvement total de taxe d'habitation, quel que soit leur niveau de revenus. Ce droit était prolongé un an après leur sortie du RMI. Désormais, les bénéficiaires du RSA bénéficient, au même titre que les autres contribuables, d'un plafonnement de leur cotisation en fonction de leur revenu fiscal de référence, en application du régime de droit commun (régime défini à l'article 1414 A du code général des impôts [CGI]). Cette mesure qui subordonne l'octroi de l'allègement de TH au montant du revenu fiscal de référence a été renforcée. Auparavant, les contribuables - même sans revenu - devaient payer une taxe dès lors que les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) avaient augmenté leur taux d'imposition. Ainsi, ce dispositif peut conduire jusqu'au dégrèvement total de la taxe d’habitation mise à la charge des contribuables dont le niveau de revenus est proche de celui d'un RMIste. En pratique, les personnes dépourvues de ressources se voient comme aujourd'hui octroyer une exonération totale. Les autres paient en proportion de leurs ressources. À ce titre, il convient de souligner que le gain lié à la perception du RSA reste toujours supérieur au montant de la taxe d'habitation mise à la charge du bénéficiaire du RSA. Afin de prendre en compte la situation des ménages anciennement bénéficiaires du RMI dont le revenu fiscal n'est pas nul, et donc susceptibles de se voir réclamer le paiement de la taxe d'habitation, des consignes permanentes sont données aux services des impôts pour que les demandes gracieuses émanant de ces redevables en situation difficile soient examinées avec bienveillance. Concernant la redevance audiovisuelle, le dégrèvement total de la TH s'accompagnait d'un dégrèvement de la redevance audiovisuelle pour les bénéficiaires du RMI. À l'instar de la solution retenue pour la taxe d'habitation, les bénéficiaires du RSA dont le revenu fiscal de référence est nul sont désormais exonérés de la redevance audiovisuelle. Concernant la couverture maladie universelle complémentaire (CMU-c), les allocataires du RMI bénéficiaient d'une présomption de droit à la CMU-c. Avec le RSA, ce mécanisme est maintenu mais il est désormais applicable à l'ensemble des bénéficiaires du RSA dont les ressources n'excédent pas le montant forfaitaire, c'est-à-dire ceux qui, sous l'empire des règles en vigueur jusqu'au 1er juin 2009, auraient relevé du RMI ou de l'API. Quant aux autres bénéficiaires du RSA, leur accès à la CMU-c dépend principalement de l'évolution du niveau de leurs revenus d'activité. En effet, le RSA n'entre pas parmi les ressources prises en considération pour déterminer le droit à la CMU-c. Pour mémoire, le plafond de ressources pour bénéficier de la CMU-c est de 7 611 € par an pour une personne seule depuis le 1er juillet 2010, soit 634 € par mois. S'il apparaît après étude des droits que des personnes ne sont pas éligibles à la CMU-c, les organismes de sécurité sociale doivent étudier les droits de ces mêmes personnes à l'aide à l'acquisition d'une couverture complémentaire de santé (prise en charge de 50 % des frais engagés pour le paiement d'une complémentaire santé) dont le plafond de ressources annuel est de 9 590 € pour une personne seule pour l'année 2011. Concernant l'accès aux établissements et services d'accueil de la petite enfance, ils devaient pouvoir garantir l'accueil d'un nombre déterminé d'enfants à la charge des bénéficiaires du RMI et de l'API, vivant seuls ou avec une personne en activité. Désormais, ces établissements et services devront appliquer cette garantie d'accès aux personnes engagées dans un parcours d'insertion sociale et professionnelle et dont les ressources n'excèdent pas le montant forfaitaire applicable (RSA « socle »). En outre, les enfants accueillis au titre de cette garantie continueront à en bénéficier même lorsque leurs parents ne répondront plus aux conditions prévues en raison de l'accès à un emploi. Concernant les aides au logement, et à l'instar des dispositions précédentes du code de la sécurité sociale sur le RMI, le RSA a été exclu des ressources prises en compte pour le calcul des prestations familiales et des aides au logement. De plus, une neutralisation des ressources perçues en année n-2 (les revenus d'activité professionnelle ou indemnités de chômage perçus dans le passé ne sont pas pris en compte pour évaluer les droits) pour le calcul des droits aux prestations familiales et aux aides au logement est appliquée aux bénéficiaires du RMI, leur permettant de bénéficier d'aides « à taux plein » et ce, tant que le foyer dispose d'un faible montant de ressources. Cette mesure a été étendue aux bénéficiaires du RSA dont les ressources sont inférieures au montant forfaitaire applicable au foyer. Cette disposition permet donc aux allocataires du RSA de bénéficier également d'une aide au logement maximale et de prestations familiales maximales pendant toute la durée de perception d'une partie du montant forfaitaire. Cette mesure perdure après la reprise d'activité, pendant la période de cumul intégral entre le salaire et le revenu de solidarité active de base (de trois à quatre mois). L'article 103 de la loi de finance rectificative pour 2009 du 30 décembre 2009 a, de plus, étendu cette mesure de neutralisation des ressources pour le calcul des aides au logement en faveur des personnes bénéficiaires du RMI et titulaires d'un Cirma/Cav signé avant le 1er juin 2009, et toujours en cours. Concernant la réduction sociale téléphonique, la réduction tarifaire du service public universel téléphonique a été maintenue pour les anciens bénéficiaires du RMI et étendue aux bénéficiaires du RSA dont les ressources sont inférieures au montant forfaitaire applicable au foyer, par le décret n°2010-760 du 6 juillet 2010. Ces exonérations et divers abattements ne rentrent pas dans le calcul des ressources dont disposent les intéressés et sont exclues du calcul visant à mesurer le taux de pauvreté. Enfin, s'agissant des droits « connexes » locaux, l'article 13 de la loi du 1er décembre 2008 (dispositions nouvelles de l'article L.1111-5 du code général des collectivités territoriales) invite les collectivités territoriales et les organismes chargés de la gestion d'un service public à veiller à ce que les conditions d'attribution d'aides ou d’avantages n'entraînent pas de discrimination à l'égard de personnes placées dans la même situation, notamment au regard du niveau de leurs ressources. Or, la connaissance de ces aides est actuellement très fragmentaire. Si aucune évaluation précise de l'impact pour les finances publiques ne peut être à ce jour réalisée, la simple substitution du critère du RSA à la référence au RMI ne pouvait se faire automatiquement. C'est pourquoi, dans le strict respect de l'articulation des principes de libre administration des collectivités locales et d'égalité entre les citoyens, il apparaissait nécessaire, notamment pour des raisons financières, de réexaminer les conditions d'attribution de ces aides facultatives. C'est cette analyse qui est au cœur du rapport de la « mission parlementaire sur les droits « connexes » locaux dans le cadre de la généralisation du RSA », rendu en mai 2009 par la sénatrice Sylvie Desmarescaux. C'est pour prendre la mesure de ces constats et donner suite aux conclusions de ce rapport qu'un « guide des droits connexes locaux », outil d'aide à la décision pour aider les institutions à ajuster les politiques sociales locales après la mise en place du RSA, réalisé par le haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, a été diffusé à l'ensemble des décideurs locaux en juillet 2009. Il préconise ainsi une réforme des aides sociales de façon à optimiser leurs effets pour les usagers, c'est-à-dire en réduisant les effets de seuil, sans faire de perdants tout en maintenant l'effort de solidarité. Une des options ainsi proposées aux collectivités est de retenir, pour l'attribution des aides, un barème associant plusieurs tranches de ressources permettant de lisser progressivement la sortie des aides avec l'élévation du niveau de revenu des familles. C'est également dans cet esprit qu'a été signée une déclaration commune sur les critères d'attribution des aides facultatives à caractère social par huit institutions (ADF, AMF, ARF, Cnaf, Cnamts, CCMSA, Pôle emploi et Uncass). Parmi les principes énoncés par ce texte figure notamment l'effort à faire pour que ces aides « ne désincitent pas à la reprise ou à l'exercice d'une activité professionnelle par les bénéficiaires de ces dispositifs ». Transformer les aides locales sous conditions de statut en aides sous condition de ressources vise donc un objectif de cohérence avec les réformes au niveau national. En effet, une étude récente « Aides sociales locales, revenu de solidarité active et gain de retour à l'emploi » du 26 août 2010, de Denis Anne et Yannick L'Horty, qui s'attache à évaluer les effets de la mise en œuvre du RSA en substitution du RMI et de l'API, souligne que « le RSA rend le retour à l'emploi rémunérateur dans la quasi-totalité des villes et des configurations familiales, ce que ne permet pas le RMI même si l'on prend en compte l'intéressement ». Mais l'étude rappelle que les ajustements éventuels de l'offre locale d'aides sociales dans le nouveau contexte du RSA sont susceptibles de limiter ces effets positifs. Par ailleurs, une enquête, menée dans le cadre de l’évaluation du RSA généralisé, portant sur les aides locales distribuées par les communes et EPCI à compétence sociale de plus de 20 000 habitants a été rendue, en septembre 2010, par le centre d’études de l’emploi sous la direction de Yannick L’Horty. Ce rapport conclut : « Les collectivités territoriales en général ne semblent pas avoir anticipé les modifications importantes apportées par le RSA et leurs éventuelles implications sur les aides locales. La mise en place de cette réforme majeure de l’aide sociale nationale n’est citée que par un tout petit nombre des villes interrogées. »

UMP 13 REP_PUB Languedoc-Roussillon O