Texte de la QUESTION :
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M. Christian Bataille s'adresse à Mme la ministre de la santé et des sports. S'exprimant en ouverture du 39e congrès de la Mutualité française, qui s'est tenu le 6 juin, le Président de la République a affirmé qu'à l'avenir "les régimes de base de l'assurance maladie ne pourront pas tout financer". Dans un contexte d'aggravation du déficit de la sécurité sociale (18 milliards en 2009 selon Eric Woerth), auquel le Gouvernement a très largement contribué avec les 5 milliards d'exonérations de cotisations sociales sur les heures supplémentaires accordées aux employeurs (loi Tepa), le chef de l'État a expliqué qu'il souhaitait « que soient confiées de nouvelles responsabilités aux organismes complémentaires » dans le domaine de la santé. Ces intentions sont parfaitement claires : parvenir à un désengagement progressif de l'assurance maladie obligatoire, notamment sur les maladies chroniques. Sous couvert de combler le déficit de l'assurance maladie, cette réforme aura un autre résultat : offrir un marché de la santé de 148 milliards d'euros aux assureurs privés. En effet, cette remise en cause frontale de notre système s'inspire largement du rapport de l'ancien directeur des questions de santé chez Axa de 1990 à 1994. Il prônait déjà à l'époque l'intrusion des assureurs dans la gestion du risque maladie et le renoncement au régime universel d'assurance maladie financé de façon collective. Après avoir instauré les franchises médicales, les forfaits à 18 euros sur les actes hospitaliers, l'augmentation des déremboursements de médicaments, le Gouvernement envisage de mettre fin à la prise en charge à 100 % des affections de longue durée. Les 7,5 millions de bénéficiaires y voient à juste titre un des piliers de la protection sociale française. Sont explicitement visées les trente affections de longue durée (ALD), cancers, maladies cardio-vasculaires, diabète, troubles mentaux..., dont la sécurité sociale, depuis sa création, rembourse les soins à 100 %, parce qu'ils sont particulièrement longs et onéreux. Cette nouvelle étape dans le désengagement de la sécurité sociale risque encore de fragiliser l'accès des Français à la santé. Au bout du compte, les assurés vont subir de plein fouet les augmentations de cotisations ou de primes auxquelles les mutuelles et les assurances seront conduites. Les premières victimes de cette politique seront les retraités, plus souvent frappés par les maladies de longue durée. Privés d'employeurs, et supportant par conséquent intégralement les primes d'assurance complémentaire, ils verraient celles-ci augmenter de 600 euros par an et par ménage en moyennes selon le Haut conseil à l'assurance maladie. Le risque est grand de voir les organismes d'assurance maladie complémentaire et les assureurs appliquer des stratégies purement financières, trier la clientèle et exclure les personnes atteintes de maladies graves. Déjà, plus de 14 % des Français les plus pauvres sont privés de couverture complémentaire, et un Français sur trois renonce à des soins médicaux pour raisons financières. Pourquoi aggraver ces inégalités ? Cette annonce va donner un coup d'accélérateur à la mise en place d'une médecine à deux vitesses. Seule en effet la solidarité nationale offre une prise en charge égalitaire et permet à tous un égal accès aux soins les plus coûteux. Il lui demande de lui préciser quelles sont les maladies graves qu'elle envisage d'exclure du champ de la sphère publique et de la solidarité nationale pour les transférer aux assureurs privés.
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