Texte de la REPONSE :
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L'Europe de la défense est devenue, en moins de dix ans, une réalité politique et opérationnelle incontestable, illustrée par plus d'une vingtaine d'opérations civiles et militaires sur trois continents. Bien qu'exceptionnels, ces progrès doivent être poursuivis pour faire face aux menaces de plus en plus complexes auxquelles l'Europe et le monde sont aujourd'hui confrontés. Afin de s'adapter à ces nouveaux défis et répondre à l'attente croissante des citoyens européens, la France a souhaité faire du renforcement de l'Europe de la défense l'un des axes prioritaires de sa présidence de l'Union européenne (UE), du 1er juillet au 31 décembre 2008. Cet objectif a été pleinement atteint. Sous l'impulsion de la présidence française, les Européens ont actualisé leur vision commune des menaces et des moyens d'y faire face. Ils ont renouvelé leur niveau d'ambition. Ils ont ainsi décidé que, sans préjudice des objectifs capacitaires civil et militaire existants, l'Union européenne devait désormais être en mesure de planifier et de conduire simultanément plusieurs opérations de plus ou moins grande intensité et combinant l'ensemble des outils civils et militaires nécessaires, y compris en réaction rapide. De même, pour améliorer la capacité de l'Union à réagir efficacement dès l'émergence d'une crise, a été décidée la création d'une capacité civilo-militaire unique de planification stratégique (CMPD). Parallèlement, pour la première fois dans le laps de temps contraint d'une présidence de l'Union européenne, treize États membres se sont mis d'accord sur une dizaine de projets capacitaires structurants. Complémentaires, l'adoption des directives du « paquet défense » et les engagements pris en décembre 2008 par les chefs d'État et de gouvernement pour le renforcement de la base industrielle et technologique de défense européenne (BITDE) marquent une étape décisive vers la constitution à terme d'un véritable marché européen des produits de défense. Le « paquet défense », qui est constitué de deux directives, l'une relative aux marchés publics de défense et de sécurité, l'autre aux transferts intercommunautaires des produits de défense, vise à réduire les obstacles à la libre circulation des produits liés à la défense (munitions, véhicules, matériel électronique...). Il a été définitivement entériné par le Parlement européen lors de la séance plénière du 14 janvier 2009. Enfin, les partenariats de sécurité de l'Union européenne, en particulier avec l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord (OTAN), ont été approfondis. Au-delà de ces avancées, l'Union européenne, sous présidence française, a démontré sa réactivité et sa volonté d'agir pour la gestion des crises et la protection des intérêts de sécurité européens. Médiateur du conflit russo-géorgien dès les premiers jours de la crise, l'Union européenne a ainsi décidé, le 15 septembre 2008, de déployer une mission civile de surveillance en Géorgie. Elle a également planifié en moins de trois mois, sur une proposition de la France et de l'Espagne, la première opération navale européenne (ATALANTE) qui permet de réduire la piraterie au large de la Somalie. Ces succès intervenus au cours du deuxième semestre de 2008 s'expliquent en grande partie par la dynamique que la France a insufflée et la méthode pragmatique qu'elle a su développer. L'action de la France s'est inscrite dans une démarche politique globale au service d'une ambition renouvelée pour l'Europe de la défense. Cette démarche reposait sur une séquence simple : définir une vision stratégique commune (mise à jour de la stratégie européenne de sécurité de 2003), en tirer les conséquences opérationnelles (nouveau niveau d'ambition) et développer les moyens y afférents (lancement de projets capacitaires structurants). C'est dans le domaine capacitaire que la méthode adoptée a été la plus innovante. Préfigurant la coopération structurée permanente prévue par le traité de Lisbonne, la démarche de la France a consisté à fédérer le plus d'États possibles autour des projets capacitaires les plus structurants, tout en laissant à nos autres partenaires la liberté de nous rejoindre ultérieurement. Les avancées réalisées concernent principalement la projection, l'espace et l'action maritime, en particulier : l'initiative de création d'une flotte européenne de transport aérien stratégique (EATF) a recueilli l'aval de douze États membres (France, Allemagne, Belgique, Espagne, Grèce, Italie, Luxembourg, Pays-Bas, Portugal, République tchèque, Roumanie et Slovaquie) ; une déclaration d'intention affirmant la volonté de coopérer sur le projet de système multinational d'imagerie spatiale pour la surveillance, la reconnaissance et l'observation MUSIS a été signée par les ministres de la défense de cinq pays (France, Allemagne, Belgique, Espagne et Grèce). Des accords ont également été signés pour la mise à disposition d'imagerie des satellites Cosmo SkyMed, SAR-Lupe et Hélios 2 au profit du centre satellitaire de l'Union européenne ; l'initiative franco-britannique de constitution d'un groupe aéronaval européen a reçu le soutien de tous nos partenaires. Neuf États (France, Allemagne, Belgique, Espagne, Grèce, Italie, Pays-Bas, Portugal et Royaume-Uni) sont devenus membres à part entière de ce projet en signant la déclaration d'intention et se sont organisés sur cette base. En outre, l'initiative visant à promouvoir les échanges de jeunes officiers entre grandes écoles militaires européennes (« Erasmus » militaire), proposée à l'occasion de la présidence française de l'Union européenne, a été validée par l'ensemble des États membres. Elle fait l'objet de travaux intensifs au sein de multiples groupes d'experts. La présidence française a également permis au Conseil de réaffirmer son soutien à l'engagement de l'Agence européenne de défense (AED) dans le développement des capacités militaires. L'AED travaille désormais au développement des capacités européennes de surveillance maritime, notamment sur le projet du futur drone de surveillance, la mise en réseau des systèmes de surveillance maritime militaires européens et le développement d'un projet, validé officiellement fin 2008, de déminage maritime. Ainsi, au vu de ces résultats, après l'ère fondatrice ouverte il y a dix ans par le sommet franco-britannique de Saint-Malo et le Conseil européen de Cologne, l'Europe de la défense est aujourd'hui entrée, sous l'impulsion de la présidence française de l'Union européenne, dans une phase de consolidation. Mais pour maintenir cet élan, notre ambition pour l'Europe ne doit pas fléchir. La démarche de renforcement capacitaire initiée par la France n'a de sens que si elle est soutenue dans la durée. La plupart des projets initiés progressent de façon satisfaisante, en particulier dans le domaine capacitaire. Ainsi, par exemple, l'accord de cession d'imagerie spatiale militaire Hélios 2 au centre satellitaire de l'Union européenne a connu un véritable succès au bénéfice des opérations EUFOR Tchad/République centrafricaine, ATALANTE et des principales missions civiles de la politique européenne de sécurité et de défense (PESD), démontrant la nécessité de développer cette capacité. L'effort donné aux capacités doit donc être poursuivi. Dans un contexte budgétaire de plus en plus contraint, les capacités militaires doivent de préférence être développées et produites en coopération. À ce titre, l'introduction de méthodes plus innovantes en matière de financement, de mutualisation, spécialisation et partage des tâches peut s'avérer utile pour développer de nouveaux projets et atteindre nos objectifs. Enfin, l'Union européenne est la seule organisation internationale à disposer en propre des instruments à la fois économiques, commerciaux, diplomatiques, culturels et militaires nécessaires à la gestion des crises. L'UE ne profitera pleinement de cet avantage que si elle parvient à une meilleure articulation des aspects civils et militaires, intérieurs et extérieurs, de la gestion des crises. L'entrée en vigueur du traité de Lisbonne devrait renforcer encore la capacité d'action de l'Union en permettant une meilleure cohérence de l'action extérieure.
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