Texte de la QUESTION :
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M. Kléber Mesquida attire l'attention de Mme la ministre de la santé et des sports sur les préconisations du nouveau « plan cancer 2009-2012 » qui suscite d'énormes inquiétudes auprès du secteur viticole, notamment sur les vives recommandations inscrites dans ce rapport. Les déboires de cette filière fragilisée par des changements multiples (agrément AOC, OCM vins) ajoutent à la crise régionale, française et mondiale et atteignent de plein fouet une profession déjà très en colère. Or ce rapport formule deux exhortations inadaptées associant des dispositions absolument dramatiques pour la filière. L'une est de « faire connaître l'alcool comme facteur de risque du cancer », l'autre de « poursuivre l'objectif de réduction de la consommation d'alcool ». Le premier est un message choquant et réducteur faisant état du lien plus que direct entre l'alcool et le cancer, ce qui va « casser l'image du vin » alors que les problèmes d'abus relèvent des alcools forts. Le seconde préconise d'augmenter le prix du vin et de la bière pour le bénéfice de prévention et de modifier la classification des boissons en fonction du degré d'alcool. Ceci est incompréhensible pour le secteur viticole qui subit les marges abusives des grandes enseignes alors que le prix payé au producteur est dérisoire. Ces dispositions raisonnent comme des interdits, elles condamnent, diabolisent, culpabilisent... Ces mesures s'enlisent dans une politique prohibitionniste au lieu d'engager un partenariat avec les filières et promouvoir la modération, éduquer et responsabiliser le citoyen dans une société adulte. Aussi, il lui demande quelles mesures elle compte mettre en place pour veiller, d'une part, au bon fonctionnement du conseil de modération qui doit jouer pleinement son rôle dans ce contexte, d'autre part, pour préconiser des solutions à long terme dans une société de consensus, d'éducation et de responsabilisation à tous les niveaux, au risque de déchaîner les foudres de toute une filière fragilisée et dont le courroux est à son paroxysme.
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Texte de la REPONSE :
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L'éducation du public, notamment par le biais des messages sanitaires de prévention, est un des moyens, parmi d'autres mesures, de prévenir l'usage à risque d'alcool. C'est à cette fin que le législateur a prévu, à l'article L. 3323-4 du code de la santé publique, l'apposition sur les publicités en faveur des boissons alcooliques d'un message de caractère sanitaire précisant que l'abus d'alcool est dangereux pour la santé. Dans la pratique, en s'appuyant sur l'absence de définition stricte du message par la loi (absence de guillemets), les producteurs d'alcool y adjoignent, depuis 1991, une mention non prévue sur une consommation modérée (« à consommer avec modération »). L'adjonction de cette seconde partie de message n'est pas neutre : elle vise clairement à introduire un signal positif « à consommer ». L'approche de la prévention, telle qu'avancée par les producteurs d'alcool, repose en effet sur la promotion d'une « consommation responsable » ou « modérée ». Or, ni l'une ni l'autre de ces approches ne sont satisfaisantes en termes de santé publique. Pour ce qui est de la logique de « consommation responsable », elle ne doit pas être le moyen d'occulter le fait qu'une politique complète de lutte contre le risque alcool ne saurait se contenter d'en appeler à la responsabilité du consommateur. Un équilibre est nécessaire entre appel à la responsabilité individuelle et mesures contraignantes pour les acteurs économiques, dont les études internationales ont fait la preuve de l'efficacité. Pour ce qui est de la notion de modération, différentes études montrent à quel point elle est contingente et dépendante des habitudes de consommations de chacun. Outre cette ambiguïté intrinsèque, la validité même de ce concept est sujette à caution, la consommation usuellement perçue comme « excessive » d'alcool étant en effet loin de constituer le seul problème en termes de santé publique. La notion de modération, interprétable de manière subjective par les consommateurs, ne répond donc pas aux impératifs de santé publique d'une information efficace du consommateur. En matière de prévention, le meilleur message sanitaire est celui que diffuse l'organisation mondiale de la santé (OMS) : « Avec l'alcool, boire moins c'est mieux. » Attachée à un juste équilibre entre les impératifs de santé publique et les préoccupations des professionnels du secteur viticole, la ministre de la santé et des sports maintiendra un arbitrage équitable concernant les mesures du nouveau plan cancer.
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