FICHE QUESTION
13ème législature
Question N° : 567  de  M.   Dionis du Séjour Jean ( Nouveau Centre - Lot-et-Garonne ) QG
Ministère interrogé :  Culture et communication
Ministère attributaire :  Culture et communication
Question publiée au JO le :  29/05/2008  page : 
Réponse publiée au JO le :  29/05/2008  page :  2586
Rubrique :  propriété intellectuelle
Tête d'analyse :  droits d'auteur
Analyse :  oeuvres multimédia. reproduction
DEBAT :

PIRATAGE SUR INTERNET

M. le président. La parole est à M. Jean Dionis du Séjour, pour le groupe Nouveau Centre.
M. Jean Dionis du Séjour. Madame la ministre de la culture, le 1er août 2006, le Parlement adoptait définitivement le projet de loi relative au droit d'auteur et aux droits voisins dans la société de l'information. Ce texte avait un objectif louable : définir un nouveau modèle juridique et économique prenant pleinement en compte notre environnement Internet et jetant les bases d'une juste rémunération des activités de création.
Disons-le brutalement : cette loi a échoué et nous sommes nombreux, dans cet hémicycle, à avoir ce naufrage en mémoire.
Dès le début du nouveau quinquennat, le Gouvernement s'est efforcé à juste titre de revenir sur cet enjeu majeur, complexe et très sensible. Ce fut la mission Olivennes qui, le 23 novembre 2007, a débouché sur un ensemble d'accords entre professionnels de la création et ceux de l'Internet, destinés à lutter contre le piratage des oeuvres sur l'Internet. Aux termes de ces accords, les industries culturelles se sont engagées à améliorer l'offre en ligne et à prendre des mesures pour qu'une oeuvre légalement acquise puisse être écoutée sur tous les matériels. Les accords prévoient également un mécanisme de prévention et de sanction du piratage, lequel est inclus dans un projet de loi en préparation et qui doit être examiné très prochainement par l'Assemblée, en tout cas avant la fin de la session.
Ce projet - appelé Hadopi, ou plutôt, semble-t-il, " Création et Internet " - fait aujourd'hui couler beaucoup d'encre. Certains membres du Parlement européen, notamment, s'interrogent publiquement sur l'une des réponses envisagées au piratage, à savoir la suspension de l'accès à l'Internet.
M. Christian Paul. Ils ont raison, c'est scandaleux !
M. Jean Dionis du Séjour. Le groupe Nouveau Centre se montre réservé sur une telle mesure, qu'il s'agisse de sa faisabilité ou de sa légalité.
À ce stade du débat public, madame la ministre, notre question sera juridique : la suspension de l'accès à l'Internet est-elle compatible avec le droit communautaire et le droit français ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Nouveau Centre et sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. le président. La parole est à Mme Christine Albanel, ministre de la culture et de la communication.
Mme Christine Albanel, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le député Jean Dionis du Séjour, vous avez fait allusion aux accords de l'Élysée qui ont réuni tous les professionnels du secteur, y compris les fournisseurs d'accès à Internet. Ces accords prévoient le dépôt d'un projet de loi destiné à compléter le texte relatif au droit d'auteur et aux droits voisins dans la société de l'information, certes efficace contre les " gros " pirates, ceux qui viennent casser les systèmes, mais pas contre les " petits " pirates, notamment les jeunes.
Ce projet a été examiné par la CNIL et l'est actuellement par le Conseil d'État. Il sera présenté en conseil des ministres entre le début et la mi-juin. J'espère qu'il sera rapidement mis à l'ordre du jour des travaux parlementaires.
M. Christian Paul. Votre politique en la matière est un fiasco !
Mme la ministre de la culture et de la communication. La mauvaise situation de notre industrie musicale mais aussi de notre industrie cinématographique l'exige, d'autant que de puissantes attaques sont portées contre elles.
Je tiens à souligner que ce projet vise à accroître l'offre légale, d'où l'intérêt pour tous les professionnels de le signer. L'offre légale sera plus rapide, meilleur marché et beaucoup plus large. En outre, il s'agit de mettre en place un dispositif essentiellement pédagogique puisque l'autorité régulatrice devra d'abord envoyer au pirate des messages personnalisés, puis une lettre recommandée, la suspension de l'abonnement à Internet n'intervenant qu'en dernier recours, après un dialogue avec le contrevenant qui pourra, s'il s'engage à ne plus pirater, bénéficier d'une réduction de la suspension d'abonnement.
Ce dispositif est tout à fait conforme à nos règles constitutionnelles et communautaires et s'inscrit dans le droit-fil de la jurisprudence " Promusicae " de la Cour de justice des communautés européennes, c'est-à-dire de la jurisprudence la plus récente puisqu'elle date de février 2008. En effet, le dispositif est susceptible de recours devant le juge ; il ne suppose pas de filtrage généralisé des réseaux, les fournisseurs d'accès à Internet n'étant pas chargés de la police ; enfin, il n'est pas en contradiction avec la directive sur la protection des données personnelles.
Il s'agit donc de trouver un équilibre entre la liberté de naviguer sur Internet et la liberté de créer et d'être rémunéré pour sa création. Les Français l'ont compris puisqu'ils se montrent favorables à l'esprit de ce projet. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)

NC 13 REP_PUB Aquitaine O