Texte de la QUESTION :
|
M. Jacques Remiller appelle l'attention de M. le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales sur l'insécurité juridique qui résulte des modifications continuelles du décret n° 2005-1123 du 6 septembre 2005 relatif à la formation professionnelle des enquêteurs de droit privé, plus communément dénommés « détectives » ou « enquêteurs privés ». En effet, depuis sa promulgation, ce décret a été modifié à plusieurs reprises, imposant des obligations contraignant les candidats à la profession à engager. Le 23 février 2009, un nouveau décret (n° 2009-214 du 23 février 2009) crée, de façon incompréhensible, de simples CQP (certificat de qualification professionnelle) pour exercer la profession en tant que directeur d'agence ou enquêteur salarié, ce qui va se traduire par une formation de quelques heures ou dizaines d'heures sans commune mesure avec les formations universitaires et professionnelles existantes, dont les personnes qui les ont suivies auraient, à nouveau, pu se dispenser. Au-delà de l'insécurité juridique évidente et des frais, non remboursés par l'État (pourtant fautif par ses changements de réglementation), il est surtout inquiétant de constater que le ministère a créé, dans cette activité sensible - probablement à la demande d'organisations irresponsables qui réclament le moins de réglementation et le moins de contrôles possibles - deux « CQP » qui vont à l'encontre de la volonté d'assainissement du secteur souhaité tant par le Gouvernement que par le Parlement. Alors qu'il existe des formations approfondies, imposant le respect des normes républicaines, dispensées par des universités de la République, ce nouveau texte va permettre de créer des formations « bâclées » de quelques heures ou dizaines d'heures, qui seront totalement insuffisantes pour imposer la connaissance du droit, de la déontologie, du respect des libertés fondamentales, de l'ordre public, de la liberté du travail, de la liberté d'opinion de la liberté syndicale et du droit au travail. Or il convient de rappeler le caractère très sensible de cette activité, dont l'utilité en procédure civile et commerciale est certes incontestable, mais dont les dérives peuvent s'avérer dangereuses pour la société si elle est mal exercée. L'enquêteur de droit privé doit avoir une formation juridique poussée car il comble une lacune du droit français en recherchant des preuves dans des domaines qui ne relèvent pas de la compétence des services officiels de police et de gendarmerie (le droit civil et commercial). Mais, depuis quelques années, il intervient également dans le cadre de contre-enquêtes pénales qui, avec la probable réforme de la procédure pénale, vont se multiplier par le naturel renforcement des droits de la défense qui accompagnera cette réforme. Il est donc anachronique, tout autant que contraire aux intérêts de la société, de minorer les formations techniques et juridiques des enquêteurs de droit privé par la création de « CQP ». Au vu des déviances constatées par plusieurs autorités, il serait donc tout à fait déraisonnable de permettre l'existence de ces formations. La création de ces « CQP » va permettre, à de futurs « professionnels » n'ayant ni les connaissances, ni les compétences, ni la pratique, d'exercer cette activité sensible. Dans ces conditions il lui demande s'il ne serait pas souhaitable de remplacer le CQP d'enquêteur salarié par les diplômes d'université agréés par le ministère ce qui permettrait d'assurer la formation, le contrôle et la moralisation nécessaires du secteur des enquêteurs salariés, sous la garantie d'indépendance d'un établissement public d'enseignement supérieur. Il suffirait, en effet, de remplacer, dans le décret, le terme « CQP » par « diplôme d'université dispensé par un établissement public d'enseignement supérieur » pour que ce problème, qui perdure depuis 2003, soit immédiatement réglé, la formation existant déjà depuis 11 ans, puisque l'université Panthéon-Assas-Paris 2 a anticipé la réglementation, et que d'autres établissements publics pourraient dispenser un enseignement analogue. Il lui demande, dans ces conditions et compte tenu des nombreux problèmes évoqués, s'il ne lui paraît pas souhaitable, dans un premier temps, de suspendre l'application du décret considéré en tant qu'il concerne les agents de recherches privés, puis de confier l'étude de ces problèmes à un membre de son cabinet.
|
Texte de la REPONSE :
|
La loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 sur la sécurité intérieure a abrogé la loi n° 891 du 28 septembre 1942 et inclus un titre II dans la loi n° 83-629 du 12 juillet 1983 afin d'instaurer un nouveau cadre pour l'exercice de l'activité des agents de recherches privées. Le législateur de 2003 a souhaité garantir l'honorabilité et le professionnalisme de cette activité à l'instar des activités de sécurité privée régies par le titre Ier de la loi du 12 juillet 1983. Le décret n° 2005-1122 du 6 septembre 2005 a été modifié en 2007, sur la demande des professionnels des activités de sécurité privée, afin de permettre à la branche professionnelle de créer des certificats de qualification professionnelle (CQP) et de remédier ainsi à l'insuffisance d'offre de formation. De même, les organisations représentatives du secteur de la recherche privée ont souhaité disposer du cadre juridique permettant la création d'un CQP par la branche professionnelle. C'est ce cadre juridique qui a été instauré par le décret n° 2009-214 du 23 février 2009 modifiant le décret n° 2005-1123 du 6 septembre 2005. L'objectif poursuivi en l'espèce n'est pas de baisser le niveau de formation requis (niveau licence) mais bien d'adapter la formation aux enquêteurs de droit privé, salariés des agences de recherches privées, ne diligentant que des enquêtes simples. De l'avis des professionnels, ces fonctions ne nécessitent pas de détenir un titre du niveau d'une licence. L'organisation de formations communes pour de nouveaux métiers, dont la technicité est moindre, constitue une mesure indispensable au maintien de l'emploi dans ce secteur. Les CQP constituent une alternative aux titres enregistrés au répertoire national des certifications professionnelles, dont font partie les licences, qu'ils ne visent nullement à remplacer mais bien à compléter, par la diversification de l'offre de formation. Leur caractère sérieux et leur vocation professionnelle sont garantis tant par l'édiction d'un cahier des charges pour leur élaboration que par la nécessité d'obtenir un agrément ministériel.
|