Texte de la QUESTION :
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M. Dominique Tian attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat, sur la nécessité d'informer au mieux les Français sur les efforts entrepris par notre pays pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. En effet, l'instauration d'une taxe carbone va obliger tous nos compatriotes à payer plus cher leur essence, leurs combustibles de chauffage et leurs transports. Or on ne peut leur demander ces sacrifices en occultant les profits réalisés, grâce au mécanisme d'échange des quotas, par certains pollueurs qui devraient être payeurs et sont en réalité bénéficiaires. Le ministère de l'écologie avait publié le 25 février 2005 une liste de quelques 1 200 sites industriels français donnant le poids de CO2 émis dans le passé par chacun de ces sites et prévus pour la période 2005-2008 (quotas d'émission). Le 23 juin 2006, il publiait les quotas d'émissions de ces sites prévus pour la période 2008-2012. Ce plan national d'allocation des quotas a été revu à la baisse sous la pression des autorités européennes. Un décret du 15 mai 2007 a approuvé ce nouveau plan, mais les nouveaux quotas par site n'ont pas été publiés. De plus aucune information n'a été fournie sur la réalisation de ces objectifs par site, sur les excédents (ou déficits) des quotas par site, ni sur les recettes (ou dépenses) dus à la vente (ou à l'achat) des excédents (ou déficits) par rapport aux quotas alloués. Les seules informations disponibles sont globales, pour 2005 et 2006 : les émissions ont été au total inférieures de 13 % et 19 % aux quotas. Les industriels avaient jusqu'au 30 avril 2009 pour fournir à l'administration les informations correspondantes pour l'année 2008, en donnant l'identité des acheteurs (ou vendeurs) de quotas, qu'ils soient français ou étrangers. Ces informations sont essentielles pour que les Français acceptent la taxe carbone et les efforts qui leur sont demandés pour réduire leurs émissions de CO2, alors que les entreprises soumises aux quotas d'émission ne seront pas soumises à cette taxe. Les sites industriels en question représentent 38 % du total des émissions françaises. Il lui demande donc de bien vouloir publier ces informations par site, avec les totaux par entreprise et par secteur industriel, et les montants versés ou perçus par chaque acheteur et vendeur, pour chacune des années 2005 à 2008. Il lui demande, en outre, d'intervenir auprès de ses collègues européens pour que les mêmes informations soient fournies pour les entreprises et sites industriels européens soumis à des quotas d'émission de CO2.
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Texte de la REPONSE :
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La France s'est fixé un objectif de division par quatre des émissions de gaz à effet de serre d'ici à 2050 dans le cadre du Grenelle de l'environnement. Cet objectif est partagé par tous les pays de l'Union européenne, qui se sont engagés dans le cadre du paquet énergie-climat adopté en décembre 2008 lors de la Présidence française de l'Union européenne. La loi du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement, dans son article 2 voté à l'unanimité par le Parlement, prévoit que l'État étudiera la création d'une contribution carbone ayant pour objet d'intégrer les effets des émissions de gaz à effet de serre dans les systèmes de prix. Dans sa déclaration à l'issue du conseil des ministres du 24 mars 2010, le Président de la République a confirmé sa volonté de mettre en oeuvre une contribution carbone, dans un cadre européen, pour préparer l'avenir en donnant un prix au carbone tout en préservant la compétitivité de nos entreprises. C'est pourquoi le Gouvernement demandera à la Commission européenne de présenter son nouveau projet de directive sur la taxation de l'énergie, comme prévu avant juin 2010, en vue d'une harmonisation des dispositifs de fiscalité écologique dans l'Union européenne. Par ailleurs, le développement de la fiscalité environnementale se poursuit : en deux ans, 70 mesures ont été votées par le Parlement, accompagnant et stimulant la formidable mutation environnementale de notre société et de notre économie. Cette mutation, au-delà de l'impératif climatique, permettra aux entreprises françaises d'être en pointe de l'économie verte qui sera la règle, partout dans le monde et dès demain. S'agissant plus spécifiquement des informations relatives aux sites industriels soumis au système communautaire d'échanges de quotas, les entreprises ont l'obligation d'assurer le suivi de leurs émissions de gaz carbonique et de les faire vérifier par un auditeur indépendant. La déclaration d'émissions ainsi produite chaque année par chacune des installations assujetties aux quotas (plus d'un millier en France) est ensuite contrôlée par les directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) et sert de base au calcul des quotas qui doivent être restitués en contrepartie, au plus tard le 30 avril de l'année n+ 1 au titre de l'année n. Au terme de ce processus rigoureux de collecte et de vérification, qui implique à la fois des auditeurs accrédités et des autorités publiques, les émissions de CO2 de chacun des sites industriels et de production électrique européens sont rendues publiques sur le site du registre communautaire, le CITL (Community independent transaction log). Elles peuvent donc être librement consultées et être comparées, site par site, avec les dotations initiales en quotas reçues par chaque installation. Il est donc possible de déterminer, en toute transparence et sur un pas de temps annuel, l'écart entre les émissions réelles des installations sous quotas et leurs allocations de départ, ce qui donne une première indication brute des besoins d'achat ou, de façon symétrique, des possibilités de vente théoriques de quotas. Ces chiffres se rapportent à des sites industriels. Ils peuvent aussi être reconstitués par entreprise. Il convient de préciser que l'écart brut entre émissions et allocations ne fournit aucun détail sur les achats/ventes effectifs de quotas, qui s'appuie sur une stratégie propre à chaque acteur, et parfois, pour les plus gros d'entre eux, sur des pratiques de couverture contre le risque prix. Les transactions réalisées sur les plates-formes de marché font, quant à elles, l'objet de communications régulières à l'autorité de régulation et de surveillance, mais ne sont pas rendues publiques. Par exemple, dans le cas de Bluenext, la bourse française du CO2, le détail des transactions (acheteur/vendeur, date, prix, volumes) est rapporté à l'autorité des marchés financiers (AMF) pour ce qui concerne les échanges sur les produits dérivés (contrats à terme). En revanche, les transactions sur le compartiment au comptant ne sont ni « rapportées » ni connues du public. Le groupe de réflexion sur la régulation des marchés du carbone, créé dans le cadre du comité de place France carbone et présidé par M. Michel Prada, ancien président de l'AMF, a précisément inclus dans son champ d'investigation la question de la transparence des informations, à la fois sur les fondamentaux de l'offre et de la demande, et sur les données de marché (transactions, expositions des différents intervenants, ...). Cette problématique est au coeur de la surveillance et de la régulation du marché du CO2. La Commission rendra ses conclusions définitives au ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat, ainsi qu'au ministère de l'économie, de l'industrie et de l'emploi, en avril 2010, avec l'objectif d'influer de manière décisive sur les travaux européens en la matière.
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