FICHE QUESTION
13ème législature
Question N° : 645  de  M.   Cohen Pierre ( Socialiste, radical, citoyen et divers gauche - Haute-Garonne ) QOSD
Ministère interrogé :  Défense
Ministère attributaire :  Défense
Question publiée au JO le :  28/04/2009  page :  3926
Réponse publiée au JO le :  06/05/2009  page :  3958
Rubrique :  déchets, pollution et nuisances
Tête d'analyse :  stockage d'explosifs
Analyse :  sites. dépollution. Toulouse
Texte de la QUESTION : M. Pierre Cohen rappelle à M. le ministre de la défense que, alors que vient de s'ouvrir à Toulouse le procès de la catastrophe AZF, de nombreuses questions restent encore sans réponse. Il appartient aujourd'hui à la justice de déterminer en toute indépendance les responsabilités. C'est pourquoi ni l'État ni les élus locaux ne doivent intervenir dans ces débats sous peine de perturber la manifestation de la vérité. Un sujet préoccupe les riverains du site et les institutions locales, il relève non pas de la justice mais de son ministère. Le site que l'on nomme « Les Ballastières » est vécu par les Toulousains comme une menace permanente depuis le début du siècle compte tenu des tonnes d'explosif qui y sont stockées. En février 2003, le représentant de la direction générale des armées laissait entendre que la dépollution de l'ensemble de la zone se ferait selon le scénario de la « dépollution sur site ». En décembre 2008, son successeur revient en arrière et annonce que le choix entre les trois scénarii suivants n'a toujours pas été opéré : le maintien en l'état et la sécurisation, la dépollution hors site ou la dépollution sur site. À ce jour, l'État semble se satisfaire de la situation actuelle au motif que le danger ne serait pas avéré tant que les ballastières seraient immergées. Par ailleurs, le niveau d'intensité de dépollution n'est toujours pas officiel et les collectivités locales pourraient être sollicitées pour participer au tour de table financier de la dépollution. Aujourd'hui, il est temps de répondre à toutes ces questions. À l'issue du procès chacun souhaitera, non pas oublier, mais envisager l'avenir avec plus de sérénité. À cette fin, les sinistrés et l'ensemble des toulousains ont besoin de savoir quand et comment le site sera dépollué. Il lui demande quelles mesures il compte prendre pour, qu'après sept ans de tergiversations, une réponse soit enfin donnée aux Toulousains.
Texte de la REPONSE :

DÉPOLLUTION DU SITE " LES BALLASTIÈRES " À TOULOUSE

M. le président. La parole est à M. Pierre Cohen., pour exposer sa question, n° 645, relative à la dépollution du site " Les Ballastières " à Toulouse.
M. Pierre Cohen. Ma question s'adresse à M. le ministre de la défense. Alors que se déroule à Toulouse le procès de la catastrophe d'AZF, de nombreuses questions restent sans réponse. Pour tourner enfin la page, il appartient aujourd'hui à la justice d'identifier les responsabilités mais il y a lieu aussi pour l'État de confirmer les conditions de dépollution du site militaire de Braqueville avec ses 4 700 tonnes de poudre intégrées à 20 000 tonnes de vase à proximité de l'ancien site chimique aujourd'hui reconverti en Cancéropôle. La présence d'une telle quantité d'explosifs en zone urbaine est en effet vécue par les Toulousains comme une menace permanente rendue intolérable pour ceux qui sont restés traumatisés par l'explosion d'AZF.
Dans une lettre du ministère de la défense de mars 2006 au laboratoire pharmaceutique Pierre Fabre, Michèle Alliot-Marie écrivait que le dossier de réhabilitation du site de Braqueville et du site voisin des Ballastières était une priorité. Depuis des années, collectivités territoriales, riverains et entreprises locales attendaient confirmation de l'implication réelle de l'État et du niveau de sa participation financière à ce lourd et complexe chantier de dépollution.
Différents scenarii avaient été avancés : maintien en l'état et sécurisation, dépollution hors site ou sur site. Enfin, en décembre 2008, la DGA annonce le lancement d'une étude de définition et de mise en oeuvre d'un ou deux pilotes industriels destinés au test de traitement des tonnages de poudre résiduelle à proximité du site du Cancéropôle de Toulouse, qui va ouvrir prochainement. L'objectif de la DGA est de terminer cette phase d'étude et de test pré-opérationnel à la fin de 2013 avant d'engager le traitement à grande échelle. Quatre années sont prévues pour valider l'étude et la construction du pilote, une phase qui s'élève à 3,2 millions d'euros et pour laquelle l'État se serait engagé.
Or la clinique universitaire du cancer, les laboratoires de recherche et pharmaceutiques, les entreprises Pierre Fabre et Sanofi seront installés sur le Cancéropôle avant la fin de cette expérimentation. Après de nombreuses tergiversations et dans ce contexte particulièrement anxiogène, pouvez-vous me confirmer, monsieur le secrétaire d'État, que l'État ira jusqu'au bout de ses engagements en s'appliquant à lui-même le principe " pollueur-payeur " ?
M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Bockel, secrétaire d'État à la défense et aux anciens combattants.
M. Jean-Marie Bockel, secrétaire d'État à la défense et aux anciens combattants. Monsieur le député, permettez-moi de vous apporter certains éléments de réponse au sujet de ce dossier, qui pourront être utilement portés à la connaissance des Toulousains.
En premier lieu, je vous rappelle que les produits stockés sur le site des Ballastières ne sont pas des explosifs, mais des poudres pour armes dont le risque principal, sans confinement, est une combustion. Je vous confirme par ailleurs que l'immersion de ces poudres dans les ballastières empêche tout phénomène pyrotechnique. Ce mode de stockage est celui recommandé pour assurer la sécurité, sur le long terme, de ce type de produit, et le niveau d'eau des ballastières est surveillé. Tout risque d'accident pyrotechnique est donc pour l'heure écarté. Un diagnostic approfondi du site a par ailleurs été mené, qui n'a pas révélé de pollution chimique notable ni de menace sur l'environnement nécessitant une intervention.
Depuis cinq ans des efforts constants ont été menés par le ministère de la défense pour améliorer la sécurité des ballastières, et ce en toute transparence pour répondre aux préoccupations légitimes de la population. La surveillance du site a été accrue ; dès 2004, des études ont été menées pour effectuer une analyse et un bilan des risques pyrotechniques, mais aussi pour évaluer les risques hydrologiques, hydrogéologiques et hydrochimiques. Elles ont en particulier permis de ramener la quantité estimée de poudres de 46 000 tonnes à environ 5 000 tonnes. En 2007, l'évaluation détaillée des risques a montré que la situation était acceptable, tant sur le niveau de pollution chimique que sur les risques pyrotechniques, comme je l'évoquais à l'instant.
Aujourd'hui, le ministère s'apprête à engager un marché d'études et de définition qui permettra de préciser les processus techniques de dépollution et de chiffrer finement les divers scénarii de traitement du site.
Tous ces points ont fait l'objet d'informations régulières dans les commissions toulousaines locales et sur le site Internet de la Direction régionale de l'industrie, de la recherche et de l'environnement.
À l'issue de ces travaux, l'État décidera, en lien avec toutes les parties prenantes, de la meilleure solution à retenir pour la réhabilitation du site et son financement. À ce titre, j'appelle votre attention sur le point suivant : le site des ballastières présente des qualités environnementales et une richesse écologique qui ont conduit à son classement au titre du réseau Natura 2000. Or ce classement pourrait s'avérer incompatible avec un scénario de dépollution maximaliste. Des études sont en cours pour préciser ce point.
Comme vous pouvez le constater, ce dossier est assez complexe, mais l'État ne cesse de s'y investir. Enfin, j'insiste une nouvelle fois sur le fait que le risque est maîtrisé et que la sécurité des Toulousains n'est pas menacée par la présence de ce site, ce qui nous permet de poursuivre sereinement notre réflexion, dans la plus large concertation.
M. le président. La parole est à M. Pierre Cohen.
M. Pierre Cohen. Monsieur le secrétaire d'État, le risque est nul tant que le niveau d'eau est assuré. Or vous savez parfaitement que nul ne peut prédire si ces ballastières ne seront pas asséchées à un moment donné, ce qui, compte tenu de la masse de produits stockés, entraînerait non pas une combustion, mais bel et bien une explosion, contrairement à l'information qui vous a été donnée.
Vous comprendrez donc que les Toulousains, traumatisés par la catastrophe d'AZF, que nul n'avait prévue, ne peuvent plus se contenter de ce genre de réponse. Il est aujourd'hui nécessaire que le ministère de la défense respecte ses engagements. L'étude de définition n'est pas suffisante. Nous avons besoin d'une étude réalisée à partir d'un site pilote, qui permette de savoir exactement comment on peut dégrader les produits pour les extraire. Il est donc indispensable que vous alliez plus loin que cette étude, qui se borne à reprendre des scénarios que nous connaissons déjà.

S.R.C. 13 REP_PUB Midi-Pyrénées O