Texte de la QUESTION :
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M. Hervé Féron attire l'attention de M. le ministre de la culture et de la communication sur les négociations entre Google et la Bibliothèque nationale de France (BNF) pour la numérisation de son fonds. Depuis 2004, la société américaine Google a mis en oeuvre un programme international de numérisation de grandes bibliothèques qui concerne des millions de livres. Ce projet arrive en France, via un accord entre la bibliothèque de Lyon et le moteur de recherche américain. Les discussions sont désormais entamées entre ce moteur de recherche, les autorités françaises et la Bibliothèque nationale de France. Ce contrat autoriserait Google a s'octroyer « la pleine propriété sans limitation dans le temps » des fichiers originaux qu'il a produits. Or ce projet de bibliothèque numérique globale et gratuite pourrait comporter un certain nombre de risques pour notre patrimoine. La numérisation d'un tel patrimoine, l'un des fonds les plus importants de France, particulièrement précieux sur l'histoire de l'édition en Occident durant plusieurs siècles, est donc confiée à une entreprise privée. On peut s'inquiéter de l'absence de garanties quant à la préservation du patrimoine numérisé. Selon certains juristes en numérisant un fonds entier, ou du moins une partie considérable des collections, le moteur de recherche s'assure un droit de propriété sur une bibliothèque, c'est-à-dire un bien unique constitutif d'une universalité. Il lui demande donc de préciser quel est l'intérêt de l'opération engagée par la BNF, ainsi que les garanties susceptibles d'être apportées quant à la préservation du patrimoine. Enfin, il lui demande de donner l'avis du Gouvernement sur cette association de la BNF avec un partenaire privé.
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Texte de la REPONSE :
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La numérisation et l'accessibilité en ligne des fonds des bibliothèques constituent un enjeu majeur pour la valorisation du patrimoine écrit, pour le dynamisme de la création de contenus et pour l'émergence de nouveaux services en ligne, comme l'a rappelé le débat qui a suivi l'annonce dans la presse de discussions entre la Bibliothèque nationale de France (BnF) et l'entreprise Google. Elles contribuent à la démocratisation de l'accès à la culture, au développement de la société de l'information et de l'économie de la connaissance. Depuis 2005, la BnF a entrepris de faire de la bibliothèque numérique Gallica un outil majeur de diffusion des contenus francophones et européens sur le Web, notamment à travers sa participation au projet Europeana soutenu par la Commission européenne et dont la France est aujourd'hui le premier contributeur. Cet objectif a impliqué, pour la BnF, la mise en oeuvre d'une politique de numérisation de masse particulièrement ambitieuse, fortement soutenue par l'État à travers les financements accordés depuis 2007 par le Centre national du livre. Aujourd'hui, Gallica propose plus de 850 000 documents en ligne dont environ 140 000 livres. Animés par le souci de proposer aux internautes une offre diversifiée et contemporaine, le ministère de la culture et de la communication et la BnF ont également développé un partenariat avec plus d'une centaine d'éditeurs français permettant, via Gallica, la consultation d'oeuvres sous droits. Ce partenariat est effectif depuis 2008 et plus de 10 000 livres numérisés sont accessibles dans ce cadre. Afin d'évaluer la pertinence d'un partenariat entre la BnF et l'entreprise Google et d'étudier plus largement l'opportunité et les modalités d'un éventuel accord avec un opérateur privé pour numériser ou mettre en ligne les fonds des bibliothèques, le ministre de la culture et de la communication a mis en place une mission sur la numérisation des fonds patrimoniaux des bibliothèques sous tutelle de son ministère, a confié la présidence à M. Marc Tessier, ancien directeur général du Centre national de la cinématographie (CNC), ancien président de France Télévisions et actuel directeur général de Vidéo futur entertainment group. Cette commission a pris en compte la libre disposition du patrimoine numérisé national, la conservation sur le long terme des fichiers numérisés, la visibilité de la culture et l'accès aux contenus français sur internet, l'intérêt économique et financier pour l'État et le message politique à adresser à la communauté internationale. Elle a rendu ses conclusions le 12 janvier 2010 et propose notamment un autre type de partenariat avec Google. Le ministère de la culture et de la communication procède à l'analyse de cette hypothèse. Au niveau européen, la France souhaite donner une nouvelle impulsion à la bibliothèque numérique européenne, Europeana, et insiste sur la nécessité de renforcer les programmes européens de numérisation, afin de proposer une offre régionale qui viendrait en contrepoint de celle de l'entreprise Google.
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