Texte de la REPONSE :
|
La contrefaçon, qui ne cesse de prendre de l'ampleur, menace la sécurité et la santé des citoyens européens et porte préjudice à l'industrie européenne. En 2009, les autorités douanières de l'Union européenne sont intervenues dans 43 500 affaires, représentant 118 millions de produits soupçonnés d'avoir été contrefaits ou piratés aux frontières de l'Union. Cigarettes, vêtements et produits de marque figuraient parmi les principaux articles interceptés par les autorités douanières. Les routes de la contrefaçon se diversifient et empruntent les voies de l'Internet, où les contrefacteurs bénéficient des perspectives offertes par le développement du commerce électronique. Ceci se traduit, en pratique, par un nombre croissant de saisies douanières d'articles contrefaisants transitant par fret postal et express (de 6 000 saisies environ en 2005 à 15 000 en 2009) ; par comparaison, les saisies opérées sur des articles transitant par les autres moyens de transport (air, rail, route, mer) ont décru ou sont restées stables sur la même période. La contrefaçon est dangereuse pour le consommateur. Au-delà des industries du luxe, qui constituaient, historiquement, la cible privilégiée, la contrefaçon concerne désormais tous les secteurs économiques, en particulier les produits d'utilisation courante (denrées alimentaires, produits de soins corporels comme le shampooing ou le dentifrice, médicaments ou encore jouets), qui représentaient, en 2009, près de 18 % des retenues douanières. Ces produits peuvent présenter des risques sérieux pour la santé humaine : 37 % des produits contrefaisants saisis par les douanes françaises en 2009 et 33 % en 2010 présentaient potentiellement un danger pour le consommateur. Enfin, la contrefaçon porte un préjudice grave à l'industrie européenne. Le coût économique de la contrefaçon est très élevé, de l'ordre de 6 Mdeuros par an pour la France, à titre d'exemple, et son impact est destructeur dans le contexte économique difficile actuel. Selon les industries créatrices européennes, le piratage seul leur coûterait, d'ici 2015, 240 Md$ de pertes, avec à la clé 1,2 million d'emplois sacrifiés. Les PME européennes, qui manquent souvent de ressources et de moyens pour poursuivre les contrevenants, sont particulièrement pénalisées par la contrefaçon. Enfin, au-delà des coûts directs, la contrefaçon décourage la création et l'innovation et menace à moyen terme la compétitivité des entreprises, l'investissement et l'emploi. Négocié entre 37 pays (Australie, Canada, Corée du Sud, États-Unis, Japon, Maroc, Mexique, Nouvelle-Zélande, Singapour, Suisse, UE), l'ACTA (Anti-Counterfeiting Trade Agreement) complètera et renforcera le cadre juridique déjà existant à l'OMC, s'agissant notamment de la protection des indications géographiques et de la lutte contre la contrefaçon sur l'Internet. La 11e session de négociation, à Tokyo (du 23 septembre au 2 octobre 2010), a permis d'aboutir à un consensus. L'accord, une fois finalisé, sera ouvert à d'autres pays. La France a été sensible aux interrogations soulevées par la société civile sur la question de la transparence. Elle est d'ailleurs intervenue en ce sens dès janvier 2010 en demandant à la Commission européenne la publication du texte en négociation. La décision de publication, qui devait faire l'objet d'un accord entre toutes les parties à la négociation, a été prise lors de la session de Wellington en avril 2010. Le texte a été publié sur le site Internet de la Commission européenne pour la première fois le 21 avril 2010. Plusieurs réunions ont par ailleurs été organisées dès 2010 par les ministères techniques compétents afin de répondre aux interrogations et préoccupations de la société civile. En outre, la Commission européenne informe régulièrement le Parlement européen et le Conseil. Lors des consultations ouvertes à toutes les parties intéressées, des réponses substantielles ont été apportées à toutes les questions soulevées. Le moment venu, le processus de ratification impliquera les parlementaires français en raison de la nature mixte de ce projet, qui relève à la fois de la compétence communautaire et nationale. En substance, l'accord de l'OMC sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC), signé en 1994, fournit un ensemble de minima portant sur les règles d'acquisition des droits de propriété intellectuelle, d'une part, et sur les règles de respect des droits, d'autre part. L'ACTA vise uniquement à renforcer ces dernières, minimales et inadaptées aux évolutions du commerce mondiale, notamment via Internet. Il vise à définir des procédures efficaces pour l'application des droits de propriété intellectuelle existants - il ne crée ni ne modifie les droits eux-mêmes. L'objectif est d'ouvrir l'ACTA au plus grand nombre, car il constitue un précédent remarquable, et véhicule un message important sur la propriété intellectuelle, auquel d'autres États sont susceptibles de se rallier progressivement. Le champ de l'accord est extensif, puisqu'il couvre, comme le demandait l'Union européenne et conformément à sa propre législation, l'ensemble des droits de propriété intellectuelle : marques, droits d'auteur et droits voisins, brevets (sauf pour les mesures aux frontières), dessins et modèles, indications géographiques, obtentions végétales. C'est également le premier accord international s'attaquant spécifiquement à la contrefaçon sur l'Internet ; il n'existe, comme précisé supra, aucune disposition sur ce sujet dans l'accord ADPIC. Enfin, l'accord prévoit, pour la première fois dans ce domaine, un mécanisme de coopération internationale, ainsi que l'échange de « bonnes pratiques » entre les États signataires. S'agissant des médicaments génériques, l'ACTA ne couvre pas la durée de protection des brevets ou la période d'exclusivité des données, puisqu'il ne modifie pas les droits tels qu'ils existent dans l'acquis communautaire. Il vise les produits illicites et non les produits légitimes (tels que les génériques). Garantie supplémentaire, les brevets ne sont pas concernés par les mesures aux frontières. De plus, l'accord commercial anticontrefaçon rappelle l'attachement des pays à la « déclaration sur l'accord sur les ADPIC et la santé publique », adoptée par l'OMC le 14 novembre 2001, qui rappelle le droit des États membres de l'OMC de protéger la santé publique, et en particulier de promouvoir l'accès de tous aux médicaments. L'article 2, paragraphe 3, de l'ACTA fait également référence aux objectifs et principes de l'accord sur les ADPIC en matière de développement et de transfert de technologie. S'agissant de l'Internet, l'accord ne comporte aucune entrave à la liberté d'expression et ne comporte aucune stipulation visant à accroître la responsabilité des fournisseurs d'accès. Plus largement, l'ACTA respecte l'ensemble des droits et libertés fondamentaux des citoyens, comme l'ont rappelé les parties à l'accord dans une déclaration commune, publiée en avril 2010. À cet égard, conformément à la demande du Parlement européen dans sa résolution du 10 mars 2010, les stipulations relatives à la protection des droits fondamentaux, comme, par exemple, le droit au respect de la vie privée, ont été renforcées dans le texte de l'accord.
|