Texte de la REPONSE :
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A l'instar du reste de la presse, le photojournalisme traverse une crise tant structurelle que conjoncturelle grave. Les agences de presse photo rencontrent des difficultés chroniques, ainsi que l'illustrent des exemples récents : après la fermeture de L'oeil et la liquidation du groupe Eyedea (agences Gamma, Rapho, Top, Hoa-Qui, Keystone, Stills, Explorer, Jacana) avant sa reprise partielle en avril 2010 par un ancien directeur de Gamma, en mai 2010, c'est Sygma, l'une des plus importantes agences de photojournalisme, qui est placée en liquidation judiciaire, malgré son rachat quelques années auparavant par Corbis. Dans le même sens, les photographes indépendants sont également confrontés à des difficultés pour commercialiser leurs oeuvres. Certains perdent d'ailleurs leur carte de presse car ils ne tirent plus le principal de leurs ressources de la vente de photos à des médias d'information. Cette crise concerne les photojournalistes, les agences de presse, les éditeurs et les conditions dans lesquelles ils exercent leur métier. Les pratiques évoluent, les usages changent et engendrent des problèmes spécifiques au métier du photojournalisme : difficultés économiques et sociales liées à la crise que traverse la presse, émergence de nouvelles concurrences encouragées par la démocratisation numérique et l'explosion corrélative d'une offre portée par la photo « amateur ». Certains éditeurs estiment ainsi que la photo ne fait plus vendre leurs titres. Cela provoque une profonde déstabilisation d'équilibres déjà fragiles. Cette évolution du secteur du photojournalisme en France et à l'international entraîne une mutation profonde du modèle économique de la photographie de presse. Elle a pour conséquence une détérioration des conditions d'exercice de la profession de photojournaliste, voire l'apparition de nouvelles précarités sectorielles. Conscient des difficultés actuelles d'exercice du métier de photojournaliste alors même que les plus grandes agences de presse photo ont, un temps, été françaises et que notre pays conserve un savoir-faire et une notoriété internationale indiscutables en ce domaine, le ministre de la culture et de la communication a pris, ces derniers temps, un certain nombre d'initiatives à la fois pour mieux connaître la réalité de la situation et essayer d'y apporter la réponse la plus adaptée. Ainsi, il a créé, au sein de son département ministériel, une mission spécialement dédiée à la photographie. Depuis le mois de mars dernier, elle a animé de nombreuses réunions et conduit des chantiers afin, entre autres, de valoriser les divers fonds photographiques et de contribuer à leur numérisation. Par ailleurs, il a confié une mission à l'inspection générale des affaires culturelles lui demandant d'établir un diagnostic précis de la situation du photojournalisme et de proposer des pistes opérationnelles d'amélioration des conditions d'exercice du métier. Ce travail s'est fait en concertation avec les représentants de la profession : photographes, organisations syndicales et professionnelles, agences de presse, éditeurs et sociétés de gestion collectives. Le rapport final s'est appuyé sur une analyse socio-économique de la filière publiée en juillet 2010 par le cabinet Ihaque. Bien que cette étude mette en lumière l'extrême disparité des conditions d'exercice de la profession de photojournaliste, elle ne permet pas de conclure, sur ces deux dernières années, à une baisse massive des revenus des photojournalistes ni à une augmentation importante du nombre de ceux qui exercent leur activité en indépendant. Les données de l'AGESSA (Association pour la gestion de la sécurité sociale des auteurs) recueillies par le cabinet Ithaque indiquent que plus de 1500 photojournalistes ont perçu des droits d'auteur en 2009. L'AGESSA confirme en outre l'augmentation du nombre de photographes en France (de 1937 en 1994 à 2837 en 2003) et le nombre croissant de photographes rémunérés en droits d'auteur (revenus passant de 41 MEUR en 1994 à 78 MEUR en 2003). 52 % de ces photographes ont un revenu supérieur au SMIC. D'autres sujets sensibles comme le niveau de rémunération des photographies publiées dans les médias d'information doivent faire l'objet de discussions entre les éditeurs, les agences de presse spécialisées dans la photographie et les photographes pigistes qui ne travaillent pas à la commande. Des grilles tarifaires existent déjà, qu'elles aient été mises en oeuvre par des groupes de presse ou établies par des organisations professionnelles. Enfin, le ministère de la culture et de la communication porte une attention particulière à deux dossiers prioritaires que nous espérons voir aboutir dans les prochains mois et auxquels les représentants de la profession sont associés dans le cadre d'une large concertation. Il s'agit, d'une part, des suites que l'Assemblée nationale donnera à la proposition de loi adoptée par le Sénat le 28 octobre 2010 à propos des oeuvres dites « orphelines » et, d'autre part, de la mise en place d'un observatoire du photojournalisme qui aura pour mission d'assurer le suivi des indicateurs économiques et sociaux de la profession et de décider des études à réaliser en vue d'améliorer les conditions d'exercice du métier de photojournaliste.
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