Texte de la QUESTION :
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M. André Gerin attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur les conséquences des premières décisions présidentielles et gouvernementales conduisant à l'aggravation de la surpopulation carcérale. Au 1er juillet 2007, nous comptions 61 810 détenus dans nos prisons pour seulement 50 557 places disponibles, soit un surnombre de 11 253. La densité carcérale globale s'élèverait à 122 détenus pour 100 places. La politique pénale poursuivie a conduit à augmenter de 4 213 le nombre de personnes écrouées au cours des six premiers mois de cette année, soit une hausse de 7 %, bien supérieure aux taux des années précédentes. La décision du Président de la République de ne pas recourir à une grâce collective le 14 juillet dernier a eu à son tour des conséquences inflationnistes, quand bien même cette prérogative présidentielle est contestable en terme de droit républicain. S'y ajoutent les effets de la loi renforçant la lutte contre la récidive des majeurs et des mineurs instaurant des peines planchers. Il est estimé qu'il en résultera un accroissement du nombre des détenus compris entre 8 000 et 10 000. Sur cette pente, nous compterons 80 000 détenus en 2017. Cette évolution ne peut que conduire à de nouvelles dégradations des conditions de détention, qui sont déjà une honte pour la France. Cette orientation ultrarépressive et fondée sur le tout carcéral n'assure pas à la société une plus grande sécurité et ne conduit pas à un recul de la délinquance. La privation de liberté est certes destinée à protéger la société et ses citoyens d'individus dangereux pour elle. Elle a aussi pour objectif d'oeuvrer à la réinsertion et au retour à la vie sociale de détenus. Or, à l'inverse, elle est aujourd'hui une école du délit et de la récidive, un lieu inhumain de dépravation et de désocialisation. Nous comptons pourtant dans nos prisons 16 366 personnes condamnées à un an ou moins, avec une augmentation de 3 000 en une seule année. Douze mille trois cent trois sont condamnées à moins de cinq ans de détention. Au regard de ces chiffres portant sur les courtes peines, il faut y ajouter les 18 223 détenus qui n'ont pas encore été jugés et qui ne sont donc pas condamnés. Or, face à ces données, nous ne comptabilisons que 4 979 mesures d'aménagement de peine, 2 387 recours au bracelet électronique, 1 773 dispositions de semi-liberté et 819 placements à l'extérieur d'un lieu de détention. Ces résultats dérisoires prouvent le vaste champ qui est ouvert pour la mise en oeuvre d'une politique qui combattrait bien plus efficacement la délinquance, dès lors qu'elle remplirait cette mission irremplaçable qui consiste à protéger la société, à punir lorsque cela est nécessaire, mais à ne jamais considérer qu'un citoyen condamné serait pour toujours un paria. L'ambition républicaine consiste, à rebours, à lui permettre de retrouver sa place dans la vie sociale. Il souhaiterait connaître ses intentions face à la surpopulation carcérale, alors que le Parlement aura prochainement à examiner un projet de loi sur la politique pénitentiaire.
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Texte de la REPONSE :
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La garde des sceaux, ministre de la justice, informe l'honorable parlementaire que la surpopulation carcérale demeure une de ses préoccupations majeures. Au 1er mars 2008, 62 586 personnes étaient incarcérées en France pour 50 737 places. La deuxième enquête menée par le Conseil de l'Europe permet de faire le point sur la situation qui prévalait au 1er septembre 2006, dans les 47 États sur la densité carcérale. Cette densité se calcule à une date donnée, en rapportant le nombre de détenus au nombre de places disponibles. Il convient de préciser à cet égard que le taux de densité carcérale en France de 114,8 est inférieur à celui par exemple de l'Espagne 140, de la Grèce 168 et de la Belgique 117,9. Le Gouvernement souhaite faire de l'amélioration des conditions de détention et de la prévention de la récidive une priorité. À l'issue du programme de construction en cours de réalisation, 13 200 places nouvelles seront livrées : 7 établissements pénitentiaires pour mineurs dont 4 déjà mises en service et 16 établissements pour majeurs. En 2012, la capacité d'accueil sera de 63 000 places. Dès sa nomination, la garde des sceaux a souhaité intensifier les efforts engagés pour développer les aménagements de peine. Par circulaire du 27 juin 2007, elle a ainsi demandé que des conférences régionales de l'aménagement des peines, regroupant l'ensemble des acteurs concernés par cette problématique, soient mises en place au niveau de chaque cour d'appel. Depuis le mois de juin dernier, les aménagements de peine sous écrou (placement sous surveillance électronique et placement à l'extérieur) sont passés de 2 728 à 3 256. Enfin, une large concertation s'est engagée afin de préparer un projet de loi pénitentiaire, attendu depuis des années, qui se traduira par des avancées significatives en matière de respect des droits fondamentaux des personnes détenues, d'amélioration des conditions concrètes de vie en détention et de développement des aménagements de peine.
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