FICHE QUESTION
13ème législature
Question N° : 74778  de  M.   Jardé Olivier ( Nouveau Centre - Somme ) QE
Ministère interrogé :  Santé et sports
Ministère attributaire :  Budget, comptes publics, fonction publique et réforme de l'État
Question publiée au JO le :  23/03/2010  page :  3270
Réponse publiée au JO le :  24/05/2011  page :  5393
Date de changement d'attribution :  24/05/2011
Rubrique :  sécurité sociale
Tête d'analyse :  cotisations
Analyse :  professionnel libéral en procédure collective. pénalités et majorations. remise. réglementation
Texte de la QUESTION : M. Olivier Jardé attire l'attention de Mme la ministre de la santé et des sports sur les dispositions de l'article L. 243-5, alinéa 6, du code de la sécurité sociale et l'interprétation qui en est faite au professionnel libéral exerçant à titre individuel soumis à une procédure collective. En effet, le dernier alinéa dudit article pose le principe selon lequel « en cas de redressement ou de liquidation judiciaires, les pénalités, majorations de retard et frais de poursuites dus par le redevable à la date du jugement d'ouverture sont remis ». Les organismes d'assurances vieillesse et invalidité décès considèrent que les professionnels libéraux exerçant à titre individuel ne peuvent pas bénéficier en cas de survenance d'une procédure collective de la remise des pénalités, majorations de retard et frais de poursuites de l'alinéa 6 du texte de l'article L. 243-5 du code de la sécurité sociale qui ne s'appliquerait, à la lumière de l'alinéa 1er dudit article, qu'aux commerçants, artisans ou à une personne morale de droit privée même non commerçante. Les professionnels libéraux soumis à une procédure collective et leurs mandataires estiment en revanche que l'application de l'article L. 243-5 du code de la sécurité sociale n'est nullement conditionnée par les alinéas qui le précèdent dans la mesure où le législateur a choisi d'utiliser le vocable général de « redevable » qui inclut par définition également les professionnels libéraux exerçant à titre individuel. La Cour de cassation a récemment tranché le contentieux né de l'interprétation de ce texte, dans plusieurs décisions rendues par la 2e chambre le 12 février 2009 (pourvoi n° V08-13-459 et n° W08-10-470) en entérinant la position soutenue par les organismes d'assurances vieillesse et invalidité décès : « le premier alinéa de l'article L. 243-5 du code de la sécurité sociale, qui en fixe le champ d'application, ne visant que les créances dues par un commerçant, un artisan, ou une personne morale de droit privé même commerçante, il en résulte que les remises prévues par le sixième alinéa du même article ne s'appliquent pas aux créances dues par une personne physique exerçant à titre libéral, le fait que l'article L. 243-5 figure dans la liste des textes du régime général ; que l'article L. 623-1 du code de la sécurité sociale susvisé rend applicable au régime des non salariés non agricole n'étant pas de nature à en modifier la portée ». Cependant, il lui demande de bien vouloir préciser les dispositions de l'articles L. 243-5, alinéa 6, du code de la sécurité sociale qui doit pouvoir s'appliquer aux professionnels libéraux exerçant à titre individuel et soumis à une procédure collective. D'une part, la loi n° 2005-845 du 26 juillet 2005 relative aux difficultés des entreprises a entendu le bénéfice de la procédure de redressement judiciaire à tout commerçant, à toute personne immatriculée au répertoire des métiers, à toute personne physique exerçant une activité professionnelle indépendante c'est-à-dire sans distinction du mode d'exercice choisi par le profession libéral. L'objectif de cette loi a consisté à mettre en oeuvre toutes les mesures économiques possibles pour permettre le redressement de l'entreprise de sorte qu'il serait contraire à son esprit de considérer que seuls certains débiteurs, en excluant les professionnels libéraux, pourraient bénéficier des remises de pénalités et de majorations des organismes de sécurité sociale. Cela reviendrait en outre à rompre l'égalité entre les débiteurs et donc à violer le principe général du droit d'égalité devant la loi, là où manifestement le texte même de l'article L. 243-5 du code de la sécurité sociale, en son alinéa 6, n'a pas fait de distinction. Il n'y a donc aucune raison de déroger au principe général de droit selon lequel « il n'y a pas lieu de distinguer là où la loi ne distingue pas ». D'autre part, le 6e alinéa de l'article L. 243-5 susvisé a été inséré par la loi du 10 juin 1994 et n'a pas été modifié depuis. Enfin, et en tout état de cause, l'article L. 623-1 du code de la sécurité sociale précise que « pour les professions non agricoles, sont applicables aux organismes et personnes entrant dans le champ d'application des titres 2,3 et 4 du présent, et sous réserve des dispositions particulières dudit livre les articles L. 211-7, L. 216-1 [...] L. 231-12, L. 243-4 et L. 243-5 (loi n° 94-637 du 25 juillet 1994) [...] ». Il résulte donc de ce texte que la totalité des dispositions de l'article L. 243-5, puisque aucune distinction n'est prévue sur les différents alinéas de cet article, s'applique aux professionnels libéraux, quelle que soit la forme de leur exercice, puisqu'on peut considérer que le mot « personne » visé dans l'article L. 623-1 du code de la sécurité sociale peut aussi bien concerner une personne morale, pour un exercice en commun, qu'une personne physique pour un exercice à titre individuel. Et, de même, l'article L. 652-3 du code de la sécurité sociale précise que les caisses d'assurances vieillesse des professions libérales habilitées à décerner des contraintes bénéficient du privilège prévu à l'article L. 243-4 ou ayant donné lieu à inscription de privilège dans les conditions prévues à l'article L. 243-5. Cela revient donc à admettre que la remise des pénalités et majorations visées à l'article L. 243-5 concerne l'ensemble des professionnels libéraux sans distinction de la forme sous laquelle elles exercent. Enfin, la remise des pénalités et majorations ne porte que sur l'accessoire de la créance des organismes d'assurances vieillesse et invalidité décès lesquels continuent à être des créanciers privilégiés pour le principal de leur créance dans le cadre de la procédure collective du professionnel libéral. C'est pourquoi il lui demande quelles sont les intentions du Gouvernement concernant le texte de l'article L. 243-5, alinéa 6, du code de la sécurité sociale.
Texte de la REPONSE : La loi n° 2005-585 du 26 juillet 2005 a étendu le domaine des procédures collectives aux personnes exerçant une profession libérale. Cependant, les dispositions de l'article L. 243-5 du code de la sécurité sociale ont omis dans leur version initiale de mentionner expressément cette catégorie de cotisants en qualité de bénéficiaires de la mesure. Suivant une interprétation littérale des textes, la Cour de cassation a refusé d'étendre aux professionnels libéraux le bénéfice de la remise de plein droit, au jour du jugement d'ouverture, des pénalités, majorations de retard et frais de justice, rejetant l'argument selon lequel le 6e alinéa de cet article aurait pu être considéré comme ayant une portée générale. Saisi sur ce sujet d'une question prioritaire de constitutionnalité, le conseil constitutionnel a considéré le 11 février 2011 que l'interprétation de l'article L. 243-5 du code de la sécurité sociale dans ses 1er et 6e alinéas doit respecter l'intention du législateur de 2005 d'étendre le bénéfice du régime de traitement des dettes en cas de difficultés financières à l'ensemble des membres des professions libérales. Sous cette réserve d'interprétation, le conseil constitutionnel a jugé les dispositions déférées conformes à la Constitution. Toutefois, la loi de simplification et d'amélioration de la qualité du droit, adoptée le 14 avril 2011, prévoit une disposition visant à étendre expressément aux professions libérales le bénéfice de la remise prévue au 7e alinéa de l'article L. 243-5 du code de la sécurité sociale.
NC 13 REP_PUB Picardie O